CHEMIN DE SAINTETÉ

adveniat regnum tuum

.

La PASSION de MARIE
selon
Anne-Catherine EMMERICH

3
Le jugement et la condamnation

 

Jésus chez Anne et Caïphe

Jésus, après avoir subi un premier interrogatoire chez Anne, se trouve maintenant devant Caïphe. Les faux témoins se sont empêtrés dans leurs mensonges et Caïphe livre Jésus aux terribles mains des archers. C’est à ce moment que “Jean, dans sa profonde affliction, pensa à la pauvre mère de Jésus. Il craignait que la terrible nouvelle ne lui arrivât d’une manière plus douloureuse, peut-être par la bouche d’un ennemi; il regarda encore le Seigneur, disant en lui-même: 'Maître, vous savez pourquoi je m’en vais', et se rendit en hâte près de la Sainte Vierge comme s’il y eût été envoyé par Jésus même...”  [1] 

Marie était constamment en lien spirituel avec Jésus: elle savait tout ce qui Lui arrivait, et souffrait avec lui, et, comme Lui, priait pour ses bourreaux. Mais son cœur maternel avait un irrésistible besoin de se rapprocher de son Fils. Aussi, lorsque Jean, après avoir entendu le cri de Caïphe: “Il est digne de mort.” fût venu la trouver et lui eût raconté la situation, demanda-t-elle  à être menée près du lieu où Jésus souffrait. “Jean... conduisit Marie et les saintes femmes à travers les rues éclairées par la lune... Elles marchaient voilées, mais leurs sanglots... attirèrent sur elles l’attention de plusieurs groupes, et elles eurent à entendre bien des paroles injurieuses contre le Sauveur. La mère de Jésus contemplait intérieurement le supplice de son fils, et conservait cela dans son cœur, comme tout le reste; elle souffrait en silence comme Lui...”  [2] 

Comme elles approchaient de la maison de Caïphe, elles passèrent par un endroit où l’on travaillait à la Croix de Jésus. Les croix des deux larrons avaient été préparées par les Romains, mais les ennemis de Jésus, pressés, étaient décidés à exécuter le jugement dès qu’il aurait été rendu par Pilate. Les saintes femmes arrivèrent dans une des cours de la maison de Caïphe et durent s’y arrêter.

L’âme de Marie était auprès de Jésus, mais elle sentait qu’une porte seulement la séparait de son Fils qui, au second chant du coq avait été conduit dans le cachot de la maison. “La porte s’ouvrit, et Pierre... se précipita au dehors les mains étendues en avant, la tête voilée et pleurant amèrement. Il reconnut Jean et la sainte Vierge à la lueur des torches et de la lune: ce fut comme si sa conscience, révélée par le regard du Fils, se présentait maintenant à lui dans la personne de la mère. Marie lui dit: “Simon, que devient Jésus?” Ces paroles retentirent jusqu’au fond de son âme. Il ne put supporter son regard et se détourna en tordant ses mains: mais Marie alla à lui et lui dit avec une profonde tristesse: “Simon... tu ne me réponds pas?” Alors Pierre s’écria en gémissant: “Ô Mère, ne me parlez pas; ils l’ont condamné à mort, et je l’ai honteusement renié trois fois.” Jean s’approcha pour lui parler; mais Pierre, comme hors de lui-même, s’enfuit de la cour, et gagna cette caverne du Mont des Oliviers où les mains de Jésus priant s’étaient imprimées dans la pierre...”  

Marie voulut se rapprocher de son Fils et Jean la conduisit, ainsi que les saintes femmes devant le lieu où le Seigneur était enfermé. Elle était en esprit avec Jésus, et Jésus était avec elle. Quoiqu’elle conserva une grande dignité, elle eut cependant à entendre de cruelles paroles: “N’est-ce pas là la mère du Galiléen? Son fils sera certainement crucifié; mais pas avant la fête, à moins que ce ne soit le plus grand des scélérats.” Elle s’éloigna, et poussée par une inspiration intérieure, alla jusqu’au foyer, dans le vestibule où se trouvait encore un reste de populace. Les saintes femmes la suivaient dans un morne silence. A l’endroit où Jésus avait dit qu’il était le Fils de Dieu et où les fils de Satan avaient crié: 'il est digne de mort,' elle perdit connaisssance et Jean et les saintes femmes l’emportèrent plus semblable à une morte qu’à une vivante. la populace ne dit rien: elle resta dans le silence et l’étonneemnt: c’était comme si un esprit céleste eût traversé l’enfer...”  [3] 

Jésus chez Pilate

Jésus est conduit à Pilate. Premier passage chez Pilate :

On conduisit le Sauveur à Pilate à travers la partie la plus fréquentée de la ville, laquelle fourmillait, en ce moment, de Juifs venus... pour les fêtes de Pâques, et d’une multitude d’étrangers.” La populace affluait de partout. Elle avait été convoquée pour parodier, en quelque sorte l’entrée royale du jour des rameaux. Sur ce chemin Marie rencontra Jésus “et constata l’horrible réalité.”  Son âme cependant était toujours avec Jésus, elle savait bien ce que souffrait son Fils. Mais son oeil intérieur ne pouvait voir l’ignominieuse réalité. “Quand elle s’approcha, elle s’écria en sanglotant: “Hélas! est-ce là mon fils? ô Jésus, mon Jésus!”... Le Sauveur lui jeta un regard touchant, et elle perdit connaissance.” Ensuite elle se fit conduire par Jean au palais de Pilate. [4] 

Origine du Chemin de Croix

Pendant que Jésus était devant Pilate, “la Mère de Jésus, Madeleine et Jean s’étaient tenus dans un coin du forum, regardant et écoutant avec une douleur profonde. Lorsque Jésus fut mené à Hérode, Jean conduisit la sainte Vierge et Madeleine sur tout le chemin qu’avait suivi Jésus: chez Caïphe, chez Anne, dans Ophel, à Gethsémani, dans le jardin des Oliviers. Dans tous les endroits  où le Sauveur était tombé, où il avait souffert, ils s’arrêtaient en silence, pleuraient et souffraient avec lui... Ce fut là le commencement du Saint Chemin de la Croix et des honneurs rendus à la Passion du Christ, avant même qu’elle fût accomplie.” 

C’est la Mère virginale du Fils de l’Homme qui commença la méditation de l’Église sur les douleurs de son Rédempteur. “Dès ce moment, quand Il n’était encore qu’à la moitié de sa voie douloureuse, la Mère pleine de grâce arrosait de ses pleurs et révérait les traces des pas de son fils et son Dieu. O  quelle compassion! Avec quelle force le glaive tranchant et perçant ne s’enfonça-t-il pas dans son cœur!”  C’est ainsi que Marie inaugura, pour l’Église, le Chemin de Croix pour y ramasser les mérites inépuisables de Jésus-Christ. Tous ceux-là, d’hier et d’aujourd’hui, “faisaient ce chemin avec Marie, s’affligeaient,  priaient, s’offraient en sacrifice dans le cœur de la Mère de Jésus qui est aussi une tendre mère pour tous ses frères réunis par la foi au sein de l’Église.”

“Et Jean conduisait pour la première fois la mère de son Maître et de son Dieu... sur ces traces du Chemin de la Croix où l’Église devait la suivre.”[5] 

Jésus est ramené d’Hérode à Pilate  

Il était huit heures un quart quand le cortège arriva au palais de Pilate. Les pharisiens continuaient à exciter la foule. Pilate constata “qu’Hérode n’avait pas trouvé cet homme criminel. Je vais donc le faire fouetter et le renvoyer.”  C’est ici que se situe l’épisode de Barabbas... “Les saintes femmes, revenues du mont des Oliviers, se tenaient dans un lieu où elles pouvaient tout entendre.”

“Quoique la mère de Jésus sût bien que la mort de Jésus était le seul moyen de salut pour les hommes, elle était pleine d’angoisses et de désir de l’arracher au supplice. Marie souffrait toutes les douleurs que peut ressentir une mère à la vue d’un fils vertueux et saint, ainsi traité par un peuple ingrat... Marie priait pour qu’un si grand crime ne s’achevât pas. Elle disait, comme Jésus au jardin des Olives: ”Si cela est possible, que ce calice s’éloigne.”... Elle pensait, et tous pensaient comme elle, que”  Barabbas serait repoussé. Mais il n’en fut pas ainsi, et l’on demanda que Jésus fût crucifié. [6]  

La flagellation de Jésus

Pendant la flagellation, Jésus se tourna un instant vers sa mère qui se tenait, navrée de douleur, dans le coin d’une des salles du marché, et comme il lui fallut ôter jusqu’au linge qui ceignait ses reins, il dit en se tournant vers la colonne pour cacher sa nudité: “Détournez vos yeux de moi.” “Je ne sais pas,  dit la voyante, s’il prononça ces paroles ou s’il les dit intérieurement, mais je vis que Marie l’entendit  car au même instant elle tomba sans connaissance dans les bras des saintes femmes qui l’entouraient.”  [7]   

Marie pendant la flagellation de Jésus

La voyante vit, pendant toute la durée de la flagellation, Marie en extase, priant et souffrant en son âme avec son Fils. Souvent de faibles gémissements sortaient de sa bouche et ses yeux étaient rouges de larmes. Les amies de Jésus et de Marie étaient là aussi, tremblantes d’inquiétude. Claudia, la femme de Pilate, croyant que Jésus serait délivré, fit parvenir à Marie de grandes pièces de toile pour panser les blessures de Jésus.

Quand Jésus, conduit par les archers, sortit, après la flagellation, Marie Le vit tout déchiré. Jésus essuya ses yeux pleins de sang et regarda sa mère qui suivit des yeux la trace sanglante de ses pieds. Il était environ neuf heures du matin. Malgré les plaisanteries grossières des bourreaux, la Mère de Jésus avec l’aide des saintes femmes et de quelques hommes compatissants put s’approcher furtivement de la colonne et y essuyer le sang de Jésus répandu avec les linges remis par Claudia. [8] 

Portrait de Marie pendant la Passion

Anne-Catherine fait le portrait de Marie, si digne pendant ces heures dramatiques, contrairement à Madeleine défigurée par la violence sans borne de son désespoir:

“Les joues de la sainte Vierge sont pâles et tirées; ses yeux sont rouges de larmes. Elle n’a cessé, depuis hier, d’errer, dans son angoisse, à travers la vallée de Josaphat et les rues de Jérusalem, et pourtant il n’y a ni dérangement ni désordre dans les vêtements de Marie.... Tout en elle est simple, digne, plein de pureté et d‘innocence... Ses mouvements sont sans violence, et au milieu de la plus poignante douleur, toute son allure est simple et calme... Elle est belle, d’une beauté inexprimable et tout à fait surnaturelle; cette beauté n’est que pureté ineffable, simplicité, majesté et sainteté.”  [9] 

Après avoir recueilli le sang de Jésus, Marie et ses amis se retirèrent du forum. Elles entrèrent avec leurs linges sanglants dans une petite maison peu éloignée. Pendant ce temps, Jésus était soumis aux pires degrés de la souffrance physique et morale et subissait le couronnement d’épines tout en continuant à prier pour ses ennemis qu’il aimait toujours et à implorer leur conversion.[10]  

La voyante précise que, grâce à ces prières du Sauveur et à celles de Marie, le nombre de ceux qui se convertirent après la mort de Jésus fut considérable: “le nombre des juifs qui se convertirent après la mort de Jésus fut assez considérable, car, pendant toutes ces horribles souffrances, Jésus et Marie ne cessèrent pas de prier pour le salut des bourreaux, et tous ces affreux traitements ne leurs causèrent pas un instant d’irritation... Je vois Jésus toujours priant, toujours aimant ses ennemis, toujours implorant leur conversion jusqu’à son dernier soupir.”  [11] 

Avertissement

Il paraît nécessaire maintenant, de noter ici, plusieurs des remarques faites par la voyante. Anne-Catherine Emmerich tient, en effet, à donner quelques précisions sur ses visions, ce qu’elle voit, et ce qu’elle peut en rapporter:

“Lorsque, pendant des visions de ce genre, je tourne mes pensées vers les âmes des ennemis de Jésus et sur celles du Sauveur et de sa sainte Mère, tout ce qui s’y passe m’est montré sous diverses figures que les gens d’alors ne voyaient pas, quoiqu’ils ressentissent l’impression de ce qu’elles représentent. Je vois une infinité de démons s’agiter parmi la multitude... Mais dans tout ce qu’ils font, il y a quelque chose de désespéré, de confus, de contradictoire: c’est un tiraillement désordonné et insensé dans tous les sens. Autour de Jésus, de Marie, et du petit nombre de saints qui sont là, beaucoup d’anges sont rassemblés... leurs actions représentent la consolation, la prière, l’onction ou quelqu’une des oeuvres de miséricorde...

Je vois aussi souvent, lorsque je dois en être instruite, les mouvements de l’âme, les souffrances intérieures, en un mot tous les sentiments se montrer à travers la poitrine et tout le corps sous mille formes lumineuses ou ténébreuses, suivant des directions différentes avec divers degrés de lenteur ou de vitesse. Je comprends alors tout cela, mais c’est impossible à expliquer parce qu’il y a infiniment trop de choses. D’ailleurs je suis si malade et si accablée par la douleur que me causent mes péchés et ceux de tous les hommes, je suis si déchirée par les souffrances de Notre-Seigneur que je ne sais comment je puis mettre le moindre ordre dans ce que je raconte.  

Beaucoup de ces choses, spécialement les apparitions de démons et d’anges, racontées par d’autres personnes qui ont eu des visions de la Passion de Jésus-Christ, sous des fragments d’intuitions intérieures ou symboliques de ce genre, qui varient selon l’état de l’âme du spectateur, sont en liaison avec le récit.  De là des contradictions nombreuses, parce qu’on oublie ou qu’on omet beaucoup de choses. Tout ce qui est mal a coopéré au supplice de Jésus-Christ, tout ce qui est amour et charité a souffert en lui; en sa qualité d’Agneau de Dieu, Jésus a pris sur lui tous les péchés du monde: il y a donc là à voir et à raconter des choses infinies en fait d’abomination et de sainteté. Du reste, si les visions et les contemplations de plusieurs personnes pieuses ne concordent pas parfaitement, cela vient de ce qu’elles n’ont pas eu le même degré de grâce pour voir, comprendre et raconter.”   [12] 

Voilà qui a le mérite  de répondre à un certain nombre d’objections ou de questions que de nombreuses personnes peuvent se poser.

Jésus est condamné à la mort de la Croix

“Jésus portant toujours son manteau rouge et sa couronne d’épines fut conduit au tribunal et placé entre deux malfaiteurs.”  

Marie, qui s’était retirée après la flagellation revint dans la foule et entendit la sentence de mort prononcée à l’encontre de son fils et de son Dieu. “Aux mots de Pilate: ”Je condamne Jésus de Nazareth, roi des juifs, à être crucifié.” Marie tomba sans connaissance comme si la vie l’eût abandonnée. Maintenant il n’y avait plus de doute, maintenant, la mort de son fils bien-aimé était certaine, la mort la plus cruelle et la plus ignominieuse. Jean et les saintes femmes l’emportèrent... Mais, revenue à elle, Marie voulut parcourir les lieux témoins des souffrances de Jésus... Le désir de s’associer à la Passion de Jésus par un culte mystique la poussait à offrir le sacrifice de ses larmes, partout où le Rédempteur, né de son sein, avait souffert pour les péchés des hommes, ses frères.

C’est ainsi que la mère du Sauveur consacra par ses larmes, et prit possession de ces lieux sanctifiés, pour l’Église, notre mère à tous...”   [13] 


[1]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre VIII “Jésus devant Caïphe”.
[2]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XI “Marie dans la maison de Caïphe” .
[3] -Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XI “Marie dans la maison de Caïphe” .
[4]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XV “Jésus est conduit à Pilate”.
[5]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XVIII “Origine du Chemin de la Croix” .
[6]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XXI “Jésus ramené d’hérode à Pilate”.
[7]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XXII “La flagellation de Jésus” .
[8]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XXIII “Marie pendant la flagellation de Jésus”.
[9]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XXV “Saint Joseph enfant interrompt les visions de la Passion”.
[10]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XXVI “Couronnement d’épines”.
[11]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XXVIII “Réflexions sur ces visions”.
[12]-Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XXVIII “Réflexions sur ces visions”.
[13] -Extraits de “La douloureuse Passion de N.S. Jésus-Christ” d’Anne-Catherine Emmerich - Chapitre XXIX “Jésus condamné à la mort de la croix”.

 

   

 

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