« ... Ce matin, en
arrivant à l’oraison, Notre-Seigneur s’est emparé des puissances
de mon âme. Il m’a fait entrer dans son divin Cœur et Il m’a
fait voir et entendre des choses admirables en me faisant
connaître ses admirables desseins sur l’Œuvre de la
Réparation...
C’est ici, ma
Révérende Mère, que j’ai grand besoin que l’Esprit Saint
conduise ma plume, car je ne sais comment écrire ce que j’ai vu
et entendu. Voici donc à peu près ce que je crois que
Notre-Seigneur m’a communiqué.
Notre divin Sauveur,
ayant recueilli les puissances de mon âme dans son divin Cœur,
Il m’a fortement appliquée à la contemplation de sa Face
adorable et Il m’a fait connaître par la lumière de ses divins
rayons que cette Face auguste et Sainte, offerte à nos
adorations, était le miroir ineffable des perfections divines
qui sont renfermées, exprimées, contenues dans le très Saint nom
de Dieu. D’après cette vue intellectuelle que Dieu m’a donnée,
mais qu’il m’est impossible d’exprimer si ce n’est par ces
paroles de l’Apôtre saint Paul, que j’ai lues depuis peu et qui
m’ont vivement touchées parce que j’ai reconnu en ces paroles ce
que j’avais vu et entendu en cette lumière: “Dieu est le chef
de son Christ”. Et j’ai compris par cette communication que,
comme le Sacré-Cœur de Jésus est l’objet sensible offert à nos
adorations pour représenter son amour immense au très
Saint-Sacrement de l’Autel, de même aussi, la Face adorable de
Notre-Seigneur est l’objet sensible offert à l’adoration des
associés de l’Œuvre de la Réparation, pour honorer et vénérer
avec un profond respect, cette Sainte-Face couverte d’opprobres
par les blasphémateurs qui attaquent la divinité dont elle est
la figure, le miroir et l’expression; et par la vertu de cette
Sainte-Face, offerte au Père éternel, on peut apaiser sa colère
et obtenir la conversion des impies et des blasphémateurs. Cette
dévotion n’est pas contraire à l’Œuvre; elle ne peut que lui
être avantageuse. Notre-Seigneur m’a donné aussi une autre
lumière en me faisant voir que l’Église est son corps mystique
et que la religion était la face de ce corps. Alors, Il m’a fait
voir cette face en butte à tous les ennemis de son Saint Nom; et
je voyais que tous les blasphémateurs et les sectaires
renouvelaient à la Sainte-Face de Notre-Seigneur tous les
opprobres de sa Passion. Je voyais à la faveur de cette divine
lumière, que les impies qui profèrent de mauvaises paroles et
blasphèment le Saint Nom de Dieu crachait à la Face de
Notre-Seigneur et la couvraient de boue, et que tous les coups
que les sectaires donnaient à la Sainte Église, à la religion,
étaient le renouvellement de nombreux soufflets que la Face de
Notre-Seigneur avait reçus et qu’ils faisaient sur cette Face
divine, en s’efforçant d’anéantir les divins travaux!
En suite de cette vue,
Notre-Seigneur m’a dit :
— Je cherche des
« Véronique » pour essuyer et adorer ma divine Face qui a peu
d’adorateurs.
Et il m’a fait
entendre de nouveau que tous ceux qui s’appliqueraient à cette
Œuvre de la Réparation feraient en cela l’office de la pieuse
Véronique.
Ensuite,
Notre-Seigneur m’a dit :
— Je vous donne
cette Sainte-Face en récompense des services que vous m’avez
rendus depuis deux ans. Vous avez fait peu de choses, il est
vrai; mais votre cœur a conçu de grands désirs. Je vous donne
donc cette Face en présence de mon Père, dans la vertu du
Saint-Esprit, et en présence des Anges et des Saints. Je vous
fait ce « don » par les mains de ma Sainte Mère et de sainte
Véronique, qui vous apprendra à la vénérer.
Ensuite,
Notre-Seigneur m’a dit :
— Par cette
Sainte-Face, vous ferez des prodiges.
Ce divin Sauveur me
faisait connaître en même temps le désir qu’Il avait de voir sa
Sainte-Face offerte à l’adoration de ses enfants, comme l’objet
de la dévotion des associés de l’Œuvre de la Réparation des
blasphèmes. Il semblait m’inviter à faire connaître son adorable
Face. Ensuite, Notre-Seigneur me fit entendre que la grâce qu’Il
m’avait faite en ce jour était la plus grande qu’Il pouvait me
faire, après la grâce des sacrements, et qu’Il m’avait préparée,
en labourant la terre de mon âme par les grandes peines
intérieurs que j’avais souffertes il y a peu de temps. Il me fit
entendre qu’Il ne tentait point ses enfants au-dessus de leurs
forces. Je compris aussi qu’Il députait saint Louis, roi de
France, pour protecteur de cette Œuvre de la Réparation, à cause
du zèle qu’il avait eu pour la gloire de son Nom, et la pieuse
Véronique, à cause du service qu’elle Lui avait rendu dans la
route du Calvaire, en essuyant sa Face adorable. Après que
Notre-Seigneur m’eût donné ces vives lumières sur l’Œuvre de la
Réparation des blasphèmes, Il me dit :
— Maintenant, ceux qui
ne reconnaîtront pas ici mon œuvre, c’est qu’ils fermeront les
yeux.
A la fin de cette
communication, je sentis un peu d’inquiétude sur la véracité de
cette opération à cause de sa longueur; mais Notre-Seigneur me
rassura en me disant qu’Il avait divers moyens pour se
communiquer aux âmes et qu’Il s’accommodait à ma faiblesse; que
je devais déjà avoir l’expérience qu’Il s’était communiqué à mon
âme de cette manière douce et paisible. C’est comme un tendre
Père qui me donne ses ordres et qui me fait connaître ses
désirs. Mais il faut pour cela que mon âme ne soit agitée
d’aucune passion: une grande joie ou une grande peine qui
causent la moindre agitation, m’empêchent de recevoir ces
lumières de Notre-Seigneur. Mais quand, par pure bonté, Il se
fait entendre à mon âme, tout cela se passe si doucement et
s’imprime tellement en moi que je ne peux plus m’appliquer qu’à
ce que mon divin Maître m’a montré être de son bon plaisir.
Il m’avait promis, à
mon entrée en religion, que, si je voulais, pour
l’accomplissement de ses desseins, lui faire un parfait abandon
de moi-même et de tout ce que je pourrais mériter, il dirigerait
lui-même mon âme dans ses voies; mais je peux bien assurer ici,
à la gloire de cet aimable Pasteur, qu’il me conduit pas à pas,
comme une de ses brebis, malgré mon indignité. Il me mène à son
gré, paître tantôt dans des vallons délicieux, puis dans des
déserts arides, selon le besoin de sa pauvre brebis et pour le
besoin spirituel de mon âme. J’ai pensé qu’il n’était pas
inutile de faire connaître en peu de mots la manière dont
Notre-Seigneur conduisait mon âme, afin qu’on puisse mieux juger
ces lumières que je crois recevoir de notre divin Sauveur. Que
son saint Nom soit béni d’avoir tant de soins d’une misérable
pécheresse ».
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