LA VOIE MYSTIQUE

adveniat regnum tuum

Sœur Marie de Saint-Pierre
(Perrine Éluère)
1816-1848

JOURNAL SPIRITUEL

22
“Dieu est le Chef de son Christ”

« ... Ce matin, en arrivant à l’oraison, Notre-Seigneur s’est emparé des puissances de mon âme. Il m’a fait entrer dans son divin Cœur et Il m’a fait voir et entendre des choses admirables en me faisant connaître ses admirables desseins sur l’Œuvre de la Réparation...

C’est ici, ma Révérende Mère, que j’ai grand besoin que l’Esprit Saint conduise ma plume, car je ne sais comment écrire ce que j’ai vu et entendu. Voici donc à peu près ce que je crois que Notre-Seigneur m’a communiqué.

Notre divin Sauveur, ayant recueilli les puissances de mon âme dans son divin Cœur, Il m’a fortement appliquée à la contemplation de sa Face adorable et Il m’a fait connaître par la lumière de ses divins rayons que cette Face auguste et Sainte, offerte à nos adorations, était le miroir ineffable des perfections divines qui sont renfermées, exprimées, contenues dans le très Saint nom de Dieu. D’après cette vue intellectuelle que Dieu m’a donnée, mais qu’il m’est impossible d’exprimer si ce n’est par ces paroles de l’Apôtre saint Paul, que j’ai lues depuis peu et qui m’ont vivement touchées parce que j’ai reconnu en ces paroles ce que j’avais vu et entendu en cette lumière: “Dieu est le chef de son Christ”. Et j’ai compris par cette communication que, comme le Sacré-Cœur de Jésus est l’objet sensible offert à nos adorations pour représenter son amour immense au très Saint-Sacrement de l’Autel, de même aussi, la Face adorable de Notre-Seigneur est l’objet sensible offert à l’adoration des associés de l’Œuvre de la Réparation, pour honorer et vénérer avec un profond respect, cette Sainte-Face couverte d’opprobres par les blasphémateurs qui attaquent la divinité dont elle est la figure, le miroir et l’expression; et par la vertu de cette Sainte-Face, offerte au Père éternel, on peut apaiser sa colère et obtenir la conversion des impies et des blasphémateurs. Cette dévotion n’est pas contraire à l’Œuvre; elle ne peut que lui être avantageuse. Notre-Seigneur m’a donné aussi une autre lumière en me faisant voir que l’Église est son corps mystique et que la religion était la face de ce corps. Alors, Il m’a fait voir cette face en butte à tous les ennemis de son Saint Nom; et je voyais que tous les blasphémateurs et les sectaires renouvelaient à la Sainte-Face de Notre-Seigneur tous les opprobres de sa Passion. Je voyais à la faveur de cette divine lumière, que les impies qui profèrent de mauvaises paroles et blasphèment le Saint Nom de Dieu crachait à la Face de Notre-Seigneur et la couvraient de boue, et que tous les coups que les sectaires donnaient à la Sainte Église, à la religion, étaient le renouvellement de nombreux soufflets que la Face de Notre-Seigneur avait reçus et qu’ils faisaient sur cette Face divine, en s’efforçant d’anéantir les divins travaux!

En suite de cette vue, Notre-Seigneur m’a dit :

— Je cherche des « Véronique » pour essuyer et adorer ma divine Face qui a peu d’adorateurs.

Et il m’a fait entendre de nouveau que tous ceux qui s’appliqueraient à cette Œuvre de la Réparation feraient en cela l’office de la pieuse Véronique.

Ensuite, Notre-Seigneur m’a dit :

Je vous donne cette Sainte-Face en récompense des services que vous m’avez rendus depuis deux ans. Vous avez fait peu de choses, il est vrai; mais votre cœur a conçu de grands désirs. Je vous donne donc cette Face en présence de mon Père, dans la vertu du Saint-Esprit, et en présence des Anges et des Saints. Je vous fait ce « don » par les mains de ma Sainte Mère et de sainte Véronique, qui vous apprendra à la vénérer.

Ensuite, Notre-Seigneur m’a dit :

— Par cette Sainte-Face, vous ferez des prodiges.

Ce divin Sauveur me faisait connaître en même temps le désir qu’Il avait de voir sa Sainte-Face offerte à l’adoration de ses enfants, comme l’objet de la dévotion des associés de l’Œuvre de la Réparation des blasphèmes. Il semblait m’inviter à faire connaître son adorable Face. Ensuite, Notre-Seigneur me fit entendre que la grâce qu’Il m’avait faite en ce jour était la plus grande qu’Il pouvait me faire, après la grâce des sacrements, et qu’Il m’avait préparée, en labourant la terre de mon âme par les grandes peines intérieurs que j’avais souffertes il y a peu de temps. Il me fit entendre qu’Il ne tentait point ses enfants au-dessus de leurs forces. Je compris aussi qu’Il députait saint Louis, roi de France, pour protecteur de cette Œuvre de la Réparation, à cause du zèle qu’il avait eu pour la gloire de son Nom, et la pieuse Véronique, à cause du service qu’elle Lui avait rendu dans la route du Calvaire, en essuyant sa Face adorable. Après que Notre-Seigneur m’eût donné ces vives lumières sur l’Œuvre de la Réparation des blasphèmes, Il me dit :

— Maintenant, ceux qui ne reconnaîtront pas ici mon œuvre, c’est qu’ils fermeront les yeux.

A la fin de cette communication, je sentis un peu d’inquiétude sur la véracité de cette opération à cause de sa longueur; mais Notre-Seigneur me rassura en me disant qu’Il avait divers moyens pour se communiquer aux âmes et qu’Il s’accommodait à ma faiblesse; que je devais déjà avoir l’expérience qu’Il s’était communiqué à mon âme de cette manière douce et paisible. C’est comme un tendre Père qui me donne ses ordres et qui me fait connaître ses désirs. Mais il faut pour cela que mon âme ne soit agitée d’aucune passion: une grande joie ou une grande peine qui causent la moindre agitation, m’empêchent de recevoir ces lumières de Notre-Seigneur. Mais quand, par pure bonté, Il se fait entendre à mon âme, tout cela se passe si doucement et s’imprime tellement en moi que je ne peux plus m’appliquer qu’à ce que mon divin Maître m’a montré être de son bon plaisir.

Il m’avait promis, à mon entrée en religion, que, si je voulais, pour l’accomplissement de ses desseins, lui faire un parfait abandon de moi-même et de tout ce que je pourrais mériter, il dirigerait lui-même mon âme dans ses voies; mais je peux bien assurer ici, à la gloire de cet aimable Pasteur, qu’il me conduit pas à pas, comme une de ses brebis, malgré mon indignité. Il me mène à son gré, paître tantôt dans des vallons délicieux, puis dans des déserts arides, selon le besoin de sa pauvre brebis et pour le besoin spirituel de mon âme. J’ai pensé qu’il n’était pas inutile de faire connaître en peu de mots la manière dont Notre-Seigneur conduisait mon âme, afin qu’on puisse mieux juger ces lumières que je crois recevoir de notre divin Sauveur. Que son saint Nom soit béni d’avoir tant de soins d’une misérable pécheresse ». [1]


[1] Lettre du 27 octobre 1845.

   

 

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