
Méditations
préparatoires à la Grande Passion du Christ

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Et Marie ?
L’Humble
Servante du Seigneur
Jésus
meurt sur la Croix. Au pied de la Croix, il y a Marie, et Jean, et
Marie-Madeleine. Jésus meurt, et Marie est là. Marie est là, au pied de la
Croix, pour partager, avec son fils
la douleur effroyable qui conclut la première célébration de la Nouvelle Pâque.
Marie
est là, au pied de la Croix; elle achève avec son Fils la première fête de
la Pâque chrétienne. Marie est là, pour participer à la fin sanglante de la
fête... Mais pourquoi n’y était-elle pas au commencement? Pourtant, la mère
de famille est toujours présente quand les juifs célèbrent la Pâque?
Revenons
au Cénacle, quand Jésus institua l’Eucharistie. Jésus est seul avec ses apôtres
dans la grande salle de la maison, la salle du Cénacle. Il a célébré la Pâque,
la Pâque juive, avec deux jours d’avance: c’était permis... Or, cette fête
de Pâque, la plus solennelle de toutes les fêtes juives, est toujours célébrée
en famille. Et lors des multiples fois où Jésus avait célébré la Pâque, à
Nazareth en particulier, Marie était toujours présente, et près de Lui.
Aujourd’hui, c’est pour Jésus la grande Pâque de l’Adieu; cela, Il le
sait puisque c’est son Heure, et la Maman n’est pas là...
Marie
n’est pas avec Jésus pour célébrer sa dernière Pâque terrestre. Pourtant,
elle n’est pas loin, elle doit même être tout à côté, dans une pièce
voisine. Alors? L’Évangile ne nous dit rien de la présence de Marie à
quelques mètres de Jésus, mais il est certain qu’elle est à Jérusalem,
puisque dans quelques heures elle suivra son chemin de Croix.
Il
y avait aussi d’autres femmes ici, tout à l’heure, dans la maison, mais
plusieurs ont dû repartir chez elles ou chez des parents ou des amis. Marie est
donc restée avec Jésus, son Fils, ce qui est normal. Pourquoi Jésus, ce soir
de fête, a-t-Il laissé sa Mère toute seule?
Avec
Jésus, les choses sont rarement simples, ou du moins simples selon nos petits
raisonnements humains. C’était son grand Adieu avant son agonie, son
arrestation, sa mort,... puis sa Résurrection. L’Heure est solennelle! La fête
est solennelle! Et Jésus laisse Marie, sa Mère, à l’écart alors qu’elle
aurait très bien pu être là. Sa présence aurait été d’autant plus
plausible que Jésus l’avait longuement préparée, elle, la toute Sainte, à
être la Corédemptrice, à devenir la Mère de l’Église qu’Il allait
instituer, et la conseillère des apôtres. Mais Jésus laisse Marie seule, à
part, comme à l’écart...
Jésus
laisse sa Mère comme à l’écart... Il célèbre la Pâque avec les douze,
dont l’un est un démon... Il les enseigne longuement et pour cela, Il va même
jusqu’à leur laver les pieds: ils ont besoin d’apprendre l’humilité, et
de découvrir l’humilité du Maître, l’humilité de Dieu. Marie n’avait
pas besoin de cet enseignement, elle, l’humble Servante du Seigneur...
Maintenant,
Jésus va préparer ses apôtres à devenir ses prêtres, lesquels, comme Lui,
sont destinés à être les vivantes victimes de son Sacerdoce. Marie n’était
pas destinée à être prêtre, sa mission était tout autre: elle était et
devait rester la Mère, celle qui prépare la naissance à la Vie de Dieu, cette
vie spirituelle si grande qu’elle doit faire de nous des dieux par
participation. Le prêtre est l’intermédiaire obligé entre Dieu et les
hommes. Mais Marie est la Mère, bienheureuse entre toutes les femmes.
Bienheureuse entre tous les humains!
Maintenant
c’est le silence absolu dans la salle du Cénacle: Jésus vient d’instituer
l’Eucharistie. Il vient de livrer son Corps pour le salut des hommes, et son
Sang va être versé. Le Père L’a glorifié. Les apôtres ne comprennent
rien, mais ils sentent confusément que quelque chose de très grand vient de se
produire, et ils se taisent: ils prient. Jésus peut les laisser seuls quelques
minutes.
Marie
est seule dans la pièce voisine: elle prie et elle pleure. On frappe: c’est
le Fils. Comme Il est grand et solennel! Marie essuie ses larmes et se lève. Jésus
s’approche, lui tend une bouchée de pain et lui fait boire quelques gouttes
de vin. Puis Jésus l’embrasse et murmure quelques paroles. Marie pleure plus
fort mais laisse partir Jésus, sans un mot...
Comme
il serait bon de rester avec Marie pendant que Jésus retourne
vers ses apôtres, puis lorsqu’Il va avec eux jusqu’au jardin des
Oliviers. Comme il serait bon de rester avec Marie au moins quelques instants,
avec Marie pendant que Jésus souffre son Agonie. Mais non,
c’est au pied de la Croix sur laquelle Jésus meurt, que nous devons
nous retrouver, que nous allons retrouver Marie...
Jésus
va mourir... Malgré le déluge des douleurs qui Le cernent de toutes parts Il
pense encore aux autres. Marie est là, la Vierge toute sainte, la Maman fidèle.
Qui prendra soin d’elle maintenant? Il y a aussi Jean, l’apôtre vierge.
Hier soir, Jésus a complètement purifié le cœur de son apôtre bien-aimé
quand ce dernier s’est nonchalamment couché sur sa poitrine. Jean est jeune,
il est bon, il est pur et vierge, et Jésus sait qu’il le restera. Oui, Jean
peut prendre chez lui la Mère Immaculée. (Jn XIX, 25-27)
Jésus
va mourir... Il regarde aussi la grande pécheresse devenue l’amoureuse fidèle
au Seigneur son Dieu. Jésus pardonne de nouveau ses nombreux péchés et bénit
son grand amour. Jésus pardonne aussi aux autres pécheurs qui meurent ou
s’agitent près de Lui: les larrons, les soldats, les juifs du Sanhédrin et
les juifs fidèles. Jésus réserve même de grandes grâces à quelques-uns
d’entre eux.
Jésus
va mourir... Mais son Cœur de Rédempteur accueille le larron qui se repent.
Dans quelques instants Jésus laissera percer son Cœur par le soldat romain
qui, baigné dans le Sang de l’Agneau, sera le premier à proclamer sa divinité
à la face monde. (Mt XXVII, 50-54)
Jésus
va mourir... Jésus meurt, et Il a soif de nous, de nous tous... Tout étant
accompli, Jésus peut remettre l’Esprit au Père. Jésus meurt dans un grand
cri et la terre, plongée dans l’obscurité, pleure le Fils de Dieu. Jésus
meurt...
Jésus
est mort. Au pied de la Croix il y a le monde entier: les purs, les pécheurs,
les femmes, les vierges: hommes et femmes, et toutes les nations, de tous les
temps, de tous les lieux, des siècles passés et des siècles à venir. Au pied
de la Croix sur laquelle Jésus est mort, nous sommes tous là.
Au
pied de la Croix de Jésus, parmi les trois personnes qui touchent sa Croix, les
trois qui L’aimaient, il y a deux femmes et un seul homme; il y a deux êtres
vierges: Marie et Jean, et une pécheresse. Curieuse proportion! Est-ce coïncidence?
Deux vierges: un homme et une femme, et une grande pécheresse, repentie et brûlante
d’amour. Deux femmes, sexe méprisé du temps de Jésus, et un jeune homme,
tout jeune adulte... Qu’est-ce que Jésus peut bien vouloir nous enseigner à
travers ses choix toujours déconcertants?
Les
choix de Jésus: un très jeune homme, purifié par Lui; une grande pécheresse
repentie, et purifiée aussi. Et Marie... Marie, Notre-Dame des douleurs.


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