Chapitre VI
Spécificités de la morale chrétienne
2
Les vertus cardinales
(Livre 9,
chapitre 1)
Après avoir
longuement parlé des vertus théologales, Jésus va s'attarder sur
les vertus morales de prudence, de justice, de force et de
tempérance, vertus qui servent à diriger les mœurs du chrétien.
Ces vertus morales sont données avec la grâce sanctifiante.
2-1-La prudence
Jésus continue à
enseigner Marie Lataste. Il commence par dire que "la
prudence est parmi les vertus morales ce qu'est la foi parmi les
vertus théologales. Elle affecte l’intelligence dont l’action
précède celle de la volonté et dirige toutes les forces, toutes
les puissances qui sont dans l'homme... La prudence est
cette inclination de l'âme qui fait que l'homme dirige ses
actions avec une connaissance sûre pour opérer le bien."
Jésus indique qu'il
y a plusieurs espèces de prudence et cite plusieurs vertus qui
sont comme les compagnes de la prudence. "En conséquence, la
mémoire, l’intelligence, la docilité, l’habileté, la raison, la
prévoyance, la circonspection, les précautions, sont autant de
parties intégrantes de la prudence. La mémoire rappelle le
passé; l'intelligence donne la connaissance du présent; la
docilité fait qu'on s’instruit par l'enseignement d’autrui;
l'habilité interprète bien ce qui est passé; la raison par la
connaissance d'une chose vous en fait connaître une autre; la
prévoyance, par laquelle on devine les moyens pour arriver au
but qu'on se propose; la circonspection, par laquelle on
remarque les circonstances d'un événement, et la précaution, par
laquelle on prévient les obstacles ou les dangers. Sans toutes
ces choses, il n'y a point de prudence possible. "
Puis Jésus cite les
trois puissances de la vertu de prudence qui sont le bon
conseil, le jugement droit et une vue claire et distincte. Mais
l'objectif de Jésus étant la vertu surnaturelle de prudence, il
ne parlera que de cette vertu et des vertus secondaires qui lui
sont annexées: discrétion, docilité, la sollicitude et
circonspection.
2-1-1-La
vertu surnaturelle de prudence
Jésus reprend la
définition qu'il a donnée de la prudence: cette inclination de
l'âme qui fait que l'homme dirige toutes ses actions avec une
connaissance sûre d’opérer le bien. Puis il ajoute: "La
prudence est la vertu de l'intelligence en action pour opérer le
bien. Par la prudence, l'intelligence cherche dans le conseil le
moyen d’arriver au bien, elle trouve ces moyens dans le jugement
vrai de ce qu'elle voit, et elle emploie ces moyens en suivant
la voie capable de la mener au but... La prudence surnaturelle
est seule capable d’opérer le bien surnaturel... Elle vient de
Dieu, c'est Dieu qui la donne et la place dans l’âme.
Il faut ardemment
désirer cette vertu, car sans la prudence, l'homme risque de
tomber dans de grands dangers; la prudence montre ce qu'il faut
faire et ce qu'il faut éviter. Jésus rappelle la parabole des
dix vierges de l’Évangile: les cinq vierges folles étaient des
vierges sans prudence; les vierges sages, au contraire,
possédaient la prudence, et leurs lampes étaient allumées quand
l’époux arriva. Il faut demander à Dieu la prudence; il nous
l’accordera, et nous la reconnaîtrons quand, dans nos actions,
nous chercherons le bon plaisir et la gloire de Dieu, c'est à
dire si nous consultons les lois de Dieu, si nous prions pour
connaître en tout la volonté divine, et si nous recourons à
notre intelligence. Nous sommes prudents si, dans les conseils
que nous recevons, nous savons distinguer ce qui est bon de ce
qui ne l’est pas, ce qui est en rapport avec notre vocation et
nos forces, si nous savons distinguer ce qu'il y a de meilleur
pour conduire notre vie. (Livre 9 chapitre 1)
2-1-2-Le
discernement (Livre 9 chapitre 1)
Mais il y a plus.
Jésus précise: "La prudence s’exerce sur les actions
extérieures des œuvres morales; il est une autre sorte de
prudence qui s’exerce sur les œuvres intimes ou intérieures de
l’âme, c'est le discernement. Le discernement, c'est la prudence
spirituelle par laquelle on distingue, dans tout ce qui a
rapport à l’intérieur, le bien du mal, le vrai du faux, le mieux
de ce qui est bien, pour opérer ce qui est bien, saisir ce qui
est vrai et répudier ce qui est faux... Ainsi le juste, par le
discernement que lui donne la grâce, discerne toutes choses dans
le monde qui est en lui, mettant toutes choses à leur place et
réservant pour Dieu ce qui est et doit être à Dieu. Le
discernement, c'est l’œil de l'âme; celui qui n’a pas le
discernement est un pauvre aveugle, victime de mille maux qu'il
ne peut éviter parce qu'il n'y voit point. Le discernement fait
connaître ce qui est bien, ce qui est mieux, ce qui est parfait,
ce qui est mal, ce qu'il y a de plus mauvais.
Le discernement
fait connaître les devoirs envers les trois personnes de la
sainte Trinité, envers le prochain... envers les saints et les
élus de Dieu. Il fait connaître le temps du repos et du travail,
de la parole et du silence... Pour que la prudence soit entière
et parfaite, il faut qu'elle soit suivie de la docilité à
écouter les conseils de Dieu... Tous les saints ont usé de
docilité, et parce qu'ils ont été dociles, ils ont été prudents,
et la prudence les a sanctifiés..."
Il y a une infinité
de choses dictées par la prudence et le discernement, et il est
impossible de les juger toutes par soi-même; en conséquence il
faut savoir demander des conseil aux personnes réfléchies et
sages, qui sont pleines de docilité et dont la parole est
claire. Il faut suivre les avis de son directeur et lui dévoiler
tout ce qui se passe dans l’intérieur de son cœur. Cette
docilité supplée à ce qui pourrait nous manquer de prudence et
de discrétion. Il convient donc d'être docile et rempli de
sollicitude qui est la promptitude de l'âme à opérer ce que la
prudence et le discernement nous montrent comme conforme aux
règles du vrai et du bien.
2-1-3-La
sollicitude et la circonspection (Livre 9 chapitre 1)
La sollicitude,
c'est l’empressement chaleureux de l'âme à faire le bien. Jésus
met en garde Marie Lataste: "La sollicitude arrête la tiédeur
et empêche de tomber dans le péché. Voyez quelle sollicitude
parmi les mondains pour accroître leur fortune, pour ramasser
gloire et honneurs... Ils sont toujours en mouvement pour cela.
Pourtant, qu’est-ce que la gloire du monde devant la gloire du
ciel et les trésors de l’éternité? La sollicitude, ma fille,
vous portera à faire vos bonnes œuvres avec empressement et
attention, à l’heure convenable, dans le lieu opportun. Elle
éloignera les obstacles et les difficultés, et vous fera
accomplir chaque action comme si elle était la dernière de votre
vie.
Enfin, ma fille,
pour que la prudence soit entière et parfaite, il faut avoir
encore la circonspection c'est-à-dire cette attention ferme de
l'âme sur tout ce qui entoure l’action qu’on veut entreprendre,
afin qu'elle se fasse selon les règles du vrai et du bien, et
qu'on éloigne tous les obstacles, afin qu’une fois entreprise on
ne soit point obligé de l’abandonner. Sans la circonspection, il
est impossible d’opérer le bien; voilà pourquoi en envoyant mes
disciples prêcher la bonne nouvelle de l’Évangile, je leur
parlai ainsi: 'Voici que je vous envoie comme des brebis au
milieu des loups; soyez simples comme des colombes et prudents
comme des serpents.' Je voulais, par ces paroles, leur
recommander la circonspection et la prudence:
– pour accomplir
tout ce que je leur avais recommandé et se fier à moi;
– et être très
avisés face aux crimes, aux vices et aux scandales qu'ils
devaient trouver dans le monde...
Que de périls
dans le monde. Satan est toujours prêt, comme un lion rugissant,
à vous dévorer. Les passions sont toujours prêtes à se
déchaîner... Il faut donc avoir l’œil ouvert pour apercevoir les
dangers et aussi les moyens de les éviter..."
La circonspection
évite les extrêmes, elle marche dans le droit chemin où se
trouve la vertu. Elle consulte dans le doute; elle ne se hâte
pas pour agir, mais attend le moment opportun. La circonspection
mesure les pensées et tous les sentiments et elle ne dévoile pas
ce qu'il faut tenir secret. Dans les dangers, qu'elle se fie à
Dieu et demeure impassible, pour ne pas se laisser tromper ou
séduire. La circonspection ne concède rien sans réflexion et ne
fait pas de promesse qu’elle ne puisse tenir.
D'où la conclusion
de Jésus: "Ô ma fille, soyez circonspecte, docile, pleine de
sollicitude, acquérez le discernement et la prudence, même pour
le bien de votre vie matérielle et terrestre; vous ferez toutes
choses selon Dieu et son divin Fils, votre Sauveur, Dieu et
homme tout ensemble, et la paix qui vous donnera la vie
spirituelle, reposant dans le bien, vous donnera aussi la paix
du cœur." (Livre 9, chapitre 1)
2-2-La justice
(Livre 9, chapitre 2)
La justice est,
parmi les vertus morales, ce qu'est la charité parmi les vertus
théologales. La justice commence dans le temps et durera
jusqu'à l’éternité. La vertu de justice est une inclination
surnaturelle qui porte l'homme à rendre à Dieu, au prochain et à
soi-même, ce qui est dû à chacun. La justice humaine consiste à
rendre à chacun ce qui lui est dû. Jésus ne traitera pas de la
justice humaine ou naturelle; il n'entretiendra Marie Lataste
que de la vertu surnaturelle de justice. Jésus commence donc par
rappeler les "devoirs de religion qu'il a prescrits et
l’observation des commandements qu'il a donnés. On doit la
reconnaissance à Dieu pour tous les bienfaits dont il nous a
comblés, et, si nous l’avons offensé, nous lui devons réparation
et repentir; tels sont nos devoirs envers Dieu."
Jésus rappelle
aussi le respect, l’amour et la vérité que nous devons à notre
prochain que sont nos parents, nos supérieurs... nos égaux et
nos inférieurs... Il faut rendre un amour spécial à nos parents
parce qu'ils sont pour nous les représentants de Dieu. Il faut
également rendre à nos supérieurs amour, obéissance, respect et
reconnaissance. À nos inférieurs il faut rendre les secours et
les soutiens que nous pouvons leur donner. "On pèche contre
la justice: envers Dieu par négligence, envers son prochain par
cupidité, envers soi-même par amour-propre." (Livre 9,
chapitre 2)
2-3-La force
(Livre 9, chapitre 3)
La vertu de force
repousse la crainte coupable qui empêche de faire le bien; elle
chasse aussi la témérité qui ferait entreprendre une œuvre
contraire à la raison. La force soutient toutes les autres
vertus. Par la force l'homme conserve le bien qui est en lui.
Grâce à la force, on ne craint ni les périls, ni la mort, ni les
épreuves, ni les douleurs, ni les misères de la vie; on ne
craint ni les attaques du démon, ni ses tentations, ni les
assauts du monde ou de ses passions.
Avec la vertu de
force, l'homme combat noblement tous ses ennemis, ne cherchant
que la gloire de Dieu. Il entreprend avec sécurité tout ce que
Dieu inspire; surtout il ne regrette rien de ce qu'il a donné à
Dieu: fortune, tranquillité, bonheur, et il persévère dans le
bien et évite le mal sans se lasser, jusqu'à sa mort. Certes,
l'homme peut, parfois, soupirer vers la patrie du ciel, mais
avec la vertu de force, il attend patiemment l’heure de Dieu.
Jésus fortifie Marie Lataste: "Vous serez comme une colonne
de fer assise sur un roc de l’océan. Vainement les flots et les
vents se déchaînent contre elle, elle demeure inébranlable. Vous
serez ainsi, ma fille, vous serez ferme comme la montagne de
Sion." (Livre 9, chapitre 3)
2-4-La
tempérance (Livre 9, chapitre 4)
Jésus rappelle que
les vertus morales sont celles qui dirigent le cœur de l'homme
selon la raison, pour l’éloigner du mal et lui faire pratiquer
le bien dans l’usage des créatures. On peut considérer la
tempérance comme une règle qui gère les actions et l’usage de la
vie, et qui dirige l'homme dans l’usage des choses pouvant le
plus facilement le séparer du bien, à savoir: les plaisirs de la
nourriture et des sens.
2-4-1-Tempérance
dans les plaisirs des sens
Jésus donne ici un
enseignement peu courant; il dit: "Parmi les choses qui se
portent contre la raison et voudraient l’opprimer, il n’en est
pas dont l’empire soit plus puissant que celui des plaisirs des
sens, d’autant plus sentis qu'ils viennent d'un acte plus
naturel ou plus en rapport avec la nature; par conséquent, le
plaisir sera plus grand dans les actes qui tendent à la
conservation de la nature humaine. Ces actes peuvent être
considérés par rapport à la conservation de l’individu, qui
s’opère par le boire et le manger, ou par rapport à la
conservation de l’espèce humaine, qui s’opère par la
génération. Voilà les actes les plus naturels à l’homme, les
actes où il éprouve le plus de plaisir, les actes, par
conséquent, qui tendent le plus à l’éloigner de Dieu.
C'est donc sur
ces actes que la raison... doit s’exercer d’une manière toute
particulière. C'est l’exercice de cette raison, donc la règle
par laquelle elle dirige ces actes, qui est la vertu de
tempérance. Par la vertu de tempérance que Dieu lui donne,
l'homme exerce une domination ferme et juste sur les plaisirs
qui sont dans le goût et le toucher, pour vivre d’une manière
raisonnable et conformément aux desseins de Dieu sur lui. Deux
choses sont essentielles à la vertu de tempérance: la honte,
sentiment qui éloigne de la turpitude de tout acte contraire à
la tempérance, et l’honnêteté, sentiment qui fait aimer la
beauté inhérente à la tempérance... La tempérance réclame cet
honneur qui ressort de la vertu, et l’intempérance, le
déshonneur qui ressort du vice."
2-4-2-Le
toucher
Dans les exposés
qui suivent, Jésus entre profondément dans quelques sujets
particulièrement délicats. Il dit: "La vertu de tempérance a
pour objet principal le toucher, dont elle règle l’usage. C'est
la tempérance qui règle la sensation de plaisir qu'on éprouve au
toucher... C'est pourquoi les vertus qui agissent sur les
mouvements intérieurs du cœur, sur les mouvements extérieurs et
les actes du corps, et qui, en observant la valeur réelle des
choses de la vie tendent à réfréner, à modérer ou à diriger une
inclination quelconque vers le mal, sont une partie de la vertu
de tempérance...
-la tempérance
règle les mouvements de l'âme qui l’attirent vers quelque chose,
attraction qui est le toucher intérieur de l'âme. On peut citer:
Le mouvement de
la volonté émue par l’impétuosité de la passion, est maîtrisé
par la continence, qui fait que l'homme, éprouvant les assauts
de la concupiscence, loin d’être battu par elle, lui résiste et
lui commande en maître.
Le mouvement que
produit une espérance fausse et une audace criminelle, est
réprimé par l’humilité... qui se croit incapable de tout par
elle-même.
Le mouvement de
la colère, qui porte à la vengeance, est réprimé par la douceur
et la clémence.
-La tempérance
règle aussi les mouvements du corps en lui-même, par la modestie
et les mouvements de la langue, par la réserve et le silence;
elle règle enfin les mouvements du corps vers les choses créées,
par la discrétion, la pauvreté et l’économie.
Jésus va maintenant
s'exprimer sur la honte, l’honnêteté, l’abstinence, la sobriété,
la continence, l’humilité, la douceur, la clémence, la modestie,
le silence, la discrétion et l’économie. Il donne un éclairage
précieux sur ces thèmes difficiles. (Livre 9 chapitre 4)
2-4-3-La
honte
Le Sauveur Jésus
dit à Marie Lataste:
"Les sentiments
de honte et d'honnêteté sont deux sentiments ou
deux inclinations de l'âme nécessaires pour la vertu de
tempérance. La honte est la crainte du déshonneur par
l’accomplissement d'un acte mauvais.
Il y a quatre
espèces de honte:
– La honte qui
empêche de faire le bien est coupable, mauvaise; c'est le
respect humain; ne craignez jamais de faire le bien, n’en
rougissez jamais, ne craignez que le mal.
– La honte du
mal qu'on commet est mauvaise, si elle ne produit rien que la
fuite des regards d’autrui, si elle ne fait point éviter le
péché.
– La honte du
mal qu'on a commis est bonne, si elle porte à éviter le mal;
elle est sans effet véritable, si elle ne fait point éviter le
péché.
– La honte qui
empêche non seulement de commettre le péché, mais encore qui le
fait fuir et donne de l’horreur pour lui, est bonne et
appartient à la vertu de prudence.
Dans la honte,
il n'y a que tendance à fuir le mal. Ainsi la honte ne se trouve
ni dans ceux qui sont endurcis dans le vice, ni dans les
parfaits. Les uns ne font que le bien, les autres, loin de
craindre l’opération du mal, vivent continuellement dans le mal.
– La honte n’est
point dans les enfants, parce qu'elle suppose un jugement, et
qu'ils n'ont point l’usage de la raison et ne peuvent juger de
rien. La honte se trouve dans les imparfaits qui tendent vers la
perfection; elle est d’autant plus forte, elle a d’autant plus
d’empire sur les hommes, que le vice et le péché sont plus
grands, qu'ils se trouvent en face de personnages probes et
vertueux, ou de personnes qui les voient plus souvent et sont
plus à même de s’apercevoir de leurs défauts." (Livre 9,
chapitre 4)
Quelle attitude
avoir par rapport à la honte?
Jésus examine les
différents cas à propos desquels la honte peut se manifester.
Mais Il commence par une mise en garde: "Pour que la honte ne
soit pas nuisible et qu'elle soit avantageuse, il faut tantôt
l’éviter et la mépriser, et tantôt la modérer ou l’exciter en
soi."
Jésus précise:
"Il faut éviter la honte dans tout ce qui est bon. Si vous
rougissez de moi, ma fille, pendant votre vie, je rougirai de
vous à la fin des temps. Il faut mépriser la honte quand il n'y
a aucune raison de rougir... comme la pauvreté et la misère. Il
faut modérer la honte que l'on a de ses péchés... afin qu'elle
n’empêche point d’en faire l’aveu au ministre chargé de les
pardonner. Il faut exciter la honte dans la tentation... quand
on risque de tomber dans le péché. C'est alors le moment de
considérer la noirceur de l’offense envers Dieu et l’opprobre
dont on se couvre par cette faute, parce que cette vue fait
éviter le péché.
L'honnêteté
Comme la honte,
l'honnêteté, jugement intime de l'âme sur la valeur d'un acte,
est essentielle à la vertu de tempérance. Elle fait aimer la
beauté inhérente à la tempérance. Elle a son principe dans
l’intérieur de l'homme, mais elle se manifeste par
l’accomplissement de l’acte; et c'est l’acte bon accompli qui
fait juger de l’honnêteté de quelqu'un. Jésus dit à Marie
Lataste: "Comme la tempérance est la vertu qui incline à
faire le bien et à éviter le mal, vous comprenez, ma fille, que
l’honnêteté doit nécessairement précéder la tempérance et être
constamment avec elle."
2-4-4-L'abstinence
et la sobriété
Vertu par laquelle
on modère le plaisir et l’usage de la nourriture,
l’abstinence consiste, non à se priver complètement de
nourriture, au risque de détruire sa santé et sa vie, mais à
prendre la quantité suffisante afin de ne pas trop exciter les
mouvements déréglés de la nature. Jésus dit: "Je vous ai
donné l’exemple de l’abstinence dans l’usage que je fis sur la
terre des mets les plus communs et dans le jeûne que je
supportai dans le désert. Suivez mon exemple et pratiquez
l’abstinence telle que je vous l’ai indiquée... Elle disposera
votre âme à prier avec plus de ferveur... Elle développera votre
mémoire et la rendra apte à se rappeler tous les bienfaits dont
Dieu vous a comblée... Celui qui ne pratique pas l’abstinence
est toujours dans une sorte d’engourdissement qui empêche
l’usage de ses facultés... Le matin, vous vous trouvez plus
disposée, plus apte à la prière, votre esprit se porte plus
naturellement vers moi... Voilà pourquoi je vous entretiens le
matin, à l'heure de votre prière, et plus particulièrement dans
le lieu saint, près de mon tabernacle.
L'abstinence
produit aussi le développement de l’intelligence qui ne se
trouve pas arrêtée dans son essor par le poids des choses
sensibles... Puisque l’abstinence est si avantageuse,
pratiquez-la ma fille; elle servira non seulement à votre âme,
mais aussi à votre corps, le temple de Dieu. Le temple de Dieu
est saint, dit l’apôtre, et ce temple, c'est l'homme...
Le corps est
l’instrument de l’âme, et l'âme par le corps opère des œuvres de
vertu et évite le péché... Il pratique le bien et fait de bonnes
œuvres parce qu'il a la vigueur nécessaire, et que les aliments
qu'il a pris ne le retiennent point attaché à la matière.
L’abstinence est donc comme une porte fermée au mal et ouverte à
la vertu... L’abstinence est l’assaisonnement de la nourriture
de l'homme et le soutien de sa santé. Celui qui pratique
l’abstinence ne mange que ce qui lui est nécessaire... Et cette
nourriture le soutient, le fortifie sans altérer sa santé..."
D'où les conseils
pratiques, et quelques réflexions sur la sobriété: "Pratiquez
l’abstinence, ma fille; elle est utile aux intérêts de votre
corps comme à ceux de votre âme; elle conservera la santé de
votre âme et celle de votre corps. Ne recherchez point les mets
délicats et bien préparés. Ne mangez jamais autant que votre
appétit vous le permettrait... Enfin ne vous occupez point de la
nourriture que vous aurez pour en désirer une plus recherchée...
La
sobriété est pour
l’usage du vin
ce que l’abstinence est pour l'usage de la nourriture. C'est une
vertu par laquelle on modère le plaisir et l’usage de la
boisson. C’est une vertu morale qui dépend de la vertu de
tempérance, car... elle défend le bien de la raison contre tout
ce qui peut l’attaquer... L'usage du vin, quand il est immodéré,
fait perdre la raison. Il faut donc un rempart contre ce vice:
c'est la sobriété, la règle dans l'usage qu'on doit faire du vin
que Dieu a donné à l'homme pour le désaltérer et réparer ses
forces, non pour lui faire perdre sa raison.
En effet, la
sobriété conserve la lumière de l’intelligence, car l'usage
modéré du vin fortifie le cœur, d’où procèdent tous les actes
naturels et vitaux de l'homme; elle développe la puissance de
l'esprit en l’excitant doucement et avec mesure; elle conserve
le cerveau dans toute sa pureté; enfin, elle réjouit l'âme dans
toutes ses facultés, et en particulier, celle qui saisit la
vérité pour perfectionner toutes ses œuvres et leur donner de la
fermeté...
La sobriété
réprime la concupiscence de la chair. Le vin en effet, ma fille,
excite tout l’organisme de l'homme; il augmente le penchant
qu'il a pour le mal et porte naturellement au vice d’impureté...
La sobriété est la conservatrice de la paix parmi les hommes. La
paix disparaît parmi les hommes quand ils perdent la raison, ou
que leur intelligence est voilée, ou que leur esprit est
surexcité. Or, la sobriété conserve la raison, empêche la raison
de se voiler et les esprits ou les forces de l'homme de se
surexciter...
La sobriété
n'est pas l’abstention complète du vin, elle est la règle de son
usage. Elle convient à tout le monde... Elle convient en
particulier aux religieux, afin qu'ils puissent vaquer aux
œuvres de piété que leur devoir leur impose, afin qu'ils
mortifient leur chair et s’exercent facilement dans la pratique
de toutes les vertus. Elle convient à la jeunesse, pour ne point
augmenter l’entraînement qu'elle a vers le mal, et aux femmes
pour conserver toujours intacte la dignité de leur sexe."
(Livre 9 chapitre 4)
2-4-5-La
continence
Le Seigneur
continue l'examen des vertus liées à la tempérance. Il explique
à Marie Lataste l'intérêt de la continence: "La continence,
ma fille, est une vertu qui donne la force de résister à toute
passion... C'est, au sens large, la répression des entraînements
mauvais provenant du toucher et de tous les autres sens. La
continence s'entend aussi de la chasteté dans l’état de mariage.
Enfin, c'est la répression des mouvements déréglés de la
concupiscence qu'on éprouve dans son âme. De quelque manière que
vous l’entendiez, la continence est la fermeté de la raison
contre les passions pour qu'elles n’entraînent point au mal...
Que de maux, que de peines, que de regrets, que de malheurs dont
préserve la continence!... La continence donne une vie
tranquille et pacifique, elle donne une vie estimable et estimée
des hommes, des anges et de Dieu; elle assure la vie heureuse du
ciel..."
2-4-6-L’humilité,
la douceur et la clémence
Le Seigneur Jésus
revient encore longuement sur la vertu d'humilité qu'il
associe à la tempérance. C'est une vertu par laquelle l'homme,
ayant une connaissance intime de la majesté de Dieu et de son
propre néant, sait réprimer les mouvements qui le portent à
s’élever au dessus de lui-même. Celui qui réprime ces mouvements
désordonnés de lui-même est véritablement humble, parce que,
s'il trouve en lui quelque chose de bien, il reconnaît ne
l’avoir que par le don de la miséricorde de Dieu, se sachant
indigne des biens que Dieu lui accorde. Il rapporte à Dieu
toutes les faveurs qui lui viennent des hommes afin qu'elles
retournent à Celui qui seul les a véritablement méritées.
Jésus décrit les
attitudes le l'homme vraiment humble. Il dit, entre autres
choses: "L'homme humble, parce qu'il se fait volontiers le
serviteur de tous, cherche partout la dernière place et les
emplois les plus vils. Il se tient vis-à-vis de Dieu comme un
esclave soumis en toutes choses à la volonté de son maître, et
comme un pauvre pécheur indigne de paraître devant lui..."
Un jour, Jésus
avait déclaré à Marie Lataste que la foi était le fondement de
toutes les vertus. Or voici qu'Il affirme que "la vertu
d'humilité est la première des vertus, avant la foi, l’espérance
et la charité. Elle est leur fondement." Marie s'étonne, et
Jésus lui répond: "L'humilité est le fondement des vertus,
mais d’une manière différente de la foi... La connaissance d’une
chose précède le désir, et le désir précède les moyens pour
acquérir sa possession. Les vertus théologales précèdent donc
les vertus morales, parce qu'elles sont la connaissance, le
désir et l’amour de Dieu, tandis que les vertus morales ne sont
que les moyens pour atteindre Dieu. Or, la foi est la première
des vertus théologales, donc elle est avant l’humilité, qui est
une vertu morale, puisqu’elle se rattache à la tempérance, et,
sous ce rapport, la foi est le fondement de toutes les vertus,
même de l'humilité.
Par ailleurs,
l’humilité est le fondement de toutes les vertus, même de la
vertu de foi. Personne, en effet, n’aura la foi s’il ne commence
par chasser l’orgueil de son âme et s'il n’y place l’humilité
qui le soumet à la parole et à la révélation de Dieu. L’humilité
est donc le fondement de la foi. L'humilité est aussi le
fondement de l’espérance car elle dit: 'Je ne suis que
faiblesse, je ne suis qu’impuissance, mais je puis tout dans
Celui qui me fortifie.' L'homme humble, sachant qu'il ne peut
rien par lui-même, met tout son espoir en Dieu, et dans son
espérance, il s’écrie: 'Je puis tout dans Celui qui me
fortifie.' Ainsi, l’humilité... met tout son espoir en Dieu.
Enfin, l'humilité est le fondement de la charité. Celui qui
s’estime ne pense qu’à lui, voilà pourquoi il oublie Dieu;
L'humble ne pense qu’à Dieu... et cette pensée produit l'amour,
l'amour pour Dieu...
Sans l'humilité,
la foi chancelle; sans l’humilité, l’espérance diminue; sans
l'humilité, la charité est détruite. Ce que je dis des vertus
théologales, je le dis aussi des vertus morales. Sans
l’humilité, la prudence est aveugle, la justice trompeuse, la
force impuissante et la tempérance immodérée."
Jésus va encore
plus loin dans l'éloge de l'humilité. "L’humilité, ma fille,
est la grande voix de l'âme qui va de la terre au ciel et qui
pénètre jusqu'au trône de Dieu. C'est la voix la plus agréable
qui résonne aux oreilles de Dieu; c'est la prière la plus
puissante qui monte jusqu'à lui, et voilà pourquoi elle obtient
à l'âme les faveurs de Dieu les plus signalées. La Vierge Marie
fut la plus humble des créatures et elle est devenue ma mère.
Est-il faveur comparable à cette faveur? De plus, l'humilité
préserve du péché, maintient dans le bien, enseigne la véritable
sagesse, et donne enfin le bonheur véritable par la
participation à la vue de Dieu.
Ma fille, aimez
donc l’humilité. Marchez, sur mon exemple, dans la voie des
humiliations ne cherchez point à vous produire, effacez-vous en
tout... Comprenez que tout ce que vous avez, vous l’avez reçu de
Dieu... Si je vous comble de mes faveurs les plus signalées,
méritez-les encore plus par votre humilité, et en reconnaissant
qu'il n'y a rien en vous qui vous rende digne de si grands
témoignages de mon amitié pour vous... et dans ces sentiments
de l’humilité la plus profonde, tenez-vous toujours comme une
servante devant Dieu... (Livre 9 chapitre 4)
La douceur
et la clémence sont deux vertus qui ont une grande
analogie... La douceur et la clémence concourent à refréner la
colère, c'est là leur but commun, et en cela ces deux vertus
paraissent se ressembler; elles diffèrent pourtant par leur
manière d’opérer.
La colère porte
à se venger d'une offense et à infliger une sévère punition. La
douceur est une force qui empêche la colère et par conséquent
qui prévient toute punition. La clémence porte à diminuer la
peine ou la punition méritée et que la colère a augmentée. Ces
deux vertus tendent donc à régler la colère; la douceur en la
faisant disparaître, la clémence en diminuant la vengeance
excitée par la colère; la douceur en combattant la colère, la
clémence en combattant l’acte produit par la colère.
Ma fille... il
n'est rien de plus suave dans la vie que les relations avec les
personnes qui sont douces. C'est un parfum délicieux dont
l’odeur se répandant sur toute la terre ravit tous les cœurs...
Cette odeur si aimable s’insinue dans les âmes dont vous
approchez, autant par votre air et vos manières que par vos
paroles. C'est la compagne fidèle de l’humilité. Toute personne
humble est douce en même temps. Mais une personne qui est douce
peut n'être pas humble; alors elle n'a pas la véritable vertu de
douceur, elle n'a qu'une douceur naturelle... la douceur de
caractère...
Quand on a la
douceur, on est affable, prévenant, aimable, patient, sans
chercher jamais à déplaire en rien; on est toujours égal dans
ses actions comme dans ses paroles... on a toujours une figure
calme et sereine... on se possède même dans les torts ou les
injures qu'on reçoit; on oublie le mal et on le pardonne; on
fait du bien à ses plus grands ennemis. On m’imite dans ma
manière d’agir... Quand on n'a pas la douceur, au contraire, on
est brusque, froid, sévère, irascible; on éloigne les cœurs de
soi. Exercez-vous, ma fille, dans la vertu de douceur. Elle
convient à tous en général, mais en particulier aux supérieurs
quels qu'ils soient, afin qu'ils puissent gagner la confiance et
l’affection des inférieurs; elle convient en particulier aux
prêtres, à cause de leurs relations intimes avec les consciences
des fidèles... Demandez à Dieu cette belle vertu de douceur."
La clémence
est une vertu qui porte à pardonner et à diminuer une peine
méritée ou une partie de cette peine. La clémence est, par
conséquent, une vertu morale, car elle soumet le mouvement du
cœur à la raison. Jésus dit: "La sévérité est l’application
rigoureuse de la loi. La clémence diminue la peine qui serait
due, selon l’expression de la loi, parce que celui qui
l’applique interprète l’intention du législateur plutôt que sa
loi; aussi la clémence modère-t-elle le mouvement du cœur pour
que la peine ne soit pas appliquée dans toute sa rigueur. La
clémence doit être la grande vertu des princes, des prélats, des
magistrats et des supérieurs. Ils doivent se rappeler la
clémence de Dieu et de son Fils sur les hommes, et ne point
punir selon l’étendue de leurs pouvoirs. La clémence guérit plus
de maux que la sévérité...
Les passions
sont apaisées par la clémence, qui souvent obtient ce que jamais
n’aurait obtenu la sévérité. Rien de plus propre à exciter en
vous la clémence que la considération de la fragilité humaine,
de votre propre fragilité. Que de fautes aussi commises par
mégarde ou par ignorance! Aussi ne faut-il point les punir selon
la rigueur de la loi. Soyez clémente, ma fille, c'est-à-dire
pardonnez toute la peine que mériteraient ceux qui pourraient
vous offenser... Pardonnez-leur de grand cœur; traitez-les comme
frères et amis. Rendez-leur service si vous le pouvez;
témoignez-leur que vous avez tout oublié et que votre esprit n'a
gardé aucun souvenir de leurs injures."
2-4-7-La
modestie et le silence
Jésus nous a montré
comment la tempérance réglait les mouvements intérieurs de l'âme
par la continence, l’humilité, la douceur et la prudence. Il va
maintenant expliquer à Marie Lataste comment elle règle aussi
les mouvements personnels et extérieurs du corps par la modestie
et le silence. La modestie règle les mouvements du corps,
gouverne les sens, indique la manière dont on doit se récréer et
préside à l’arrangement extérieur des vêtements, selon une juste
pudeur. Jésus donne quelques précisions dont nos contemporains
devraient bien tenir compte:
"La modestie est
une vertu morale. Elle vous apprendra à régler les mouvements du
corps; à ne point marcher avec précipitation ni avec trop de
lenteur; à ne point agiter les bras d’une manière inconvenante;
à ne point étendre votre corps avec mollesse; à vous tenir
toujours, même seule, comme devant les personnes de distinction
ou qui méritent votre respect... La modestie vous apprendra
surtout à ne point tourner vos yeux de tous cotés, à ne point
les fixer sur toutes choses; elle vous apprendra à regarder non
avec fureur, mais avec bonté; non avec orgueil, mais avec
humilité; non avec inconvenance, mais avec chasteté et pudeur...
Elle vous apprendra à ne point garder un silence obstiné, mais à
adresser quelques paroles dictées par la circonstance et
toujours empreintes de dignité autant que de franchise et de
sincérité.
La modestie vous
apprendra à user de délassements convenables à votre âge, à
votre condition, à votre sexe, pour récréer et refaire votre
esprit et ne point le tenir toujours tendu. Elle vous
apprendra... à fuir dans vos récréations tout ce qui peut
blesser l’honnêteté ou la politesse et à ne vous récréer que
dans les lieux et aux moments convenables. Elle vous apprendra à
vous habiller d'une manière digne et en rapport avec votre
position, sans chercher des habits de luxe ou des formes trop
élégantes qui favorisent le dérèglement des passions. Elle vous
apprendra à être au contraire toujours vêtue avec simplicité,
ordre et propreté..."
La modestie est la
première vertu qui règle les mouvements extérieurs du corps;
voici la seconde, le silence. Le silence peut être
l'abstention de langage et la modération de la parole ou l'amour
du silence. "L'amour du silence est une vertu qui a pour but
d’interdire à la langue toute parole illicite, comme la
médisance, la calomnie, le mensonge, le parjure, toute parole
déshonnête, impure, oiseuse ou inutile; il interdira à la langue
des paroles même utiles ou licites quand il n'y a point de
nécessité. Vous reconnaîtrez en vous l'amour du silence, si vous
ne prononcez jamais de paroles déplacées, si vous ne parlez que
dans le lieu où vous pouvez parler, c'est-à-dire hors du lieu
saint... si vous vous abstenez non seulement du langage
extérieur, mais encore du langage intérieur de votre esprit, en
contenant votre imagination... si vous ne parlez jamais pour
votre propre satisfaction, par amour-propre, mais toujours par
charité et pour la plus grande gloire de Dieu...
Ma fille, je
vous recommande l'amour du silence. Suivez l’exemple que je vous
ai donné. Je suis la parole éternelle de Dieu le Père, et j’ai
demeuré les trente premières années de ma vie en ne me
manifestant qu'une seule fois dans le temple de Jérusalem...
Gardez le silence et vous aurez la paix avec Dieu, avec le
prochain, avec vous-même. Gardez le silence et vous avancerez
rapidement dans la perfection, car vous fuirez de nombreuses
occasions de péché... "
2-4-8-La
discrétion et l’économie
Contre toute
attente, Jésus établit un lien entre la discrétion, vertu
morale, et le don de science ou de la connaissance. La
discrétion est le contraire de la curiosité. Il nous rappelle
"qu'il y a des sciences utiles, d’autres dangereuses et d’autres
coupables... La discrétion apprend à connaître celles qui sont
utiles et... aussi, à réprimer le désir trop grand des sciences
même utiles, parce que la science enfle le cœur et engendre
l’orgueil. La discrétion apprend à connaître les choses utiles
et incite à les étudier..." Jésus énumère les sciences les
plus importantes dont la première est la science de Dieu, donc
la connaissance de la religion et du salut. Puis il passe aux
sciences secondaires.
Il ne faut pas
oublier que Marie Lataste vécut dans la première moitié du 19ème
siècle, époque où relativement peu de personnes du peuple
savaient lire et écrire, et que ce que l'on appelle aujourd'hui
'la science moderne', commençait à peine à se développer. Il ne
faut donc pas s'étonner que Jésus commence par citer ce qui
facilitera le moyen de perfectionner la science du salut: la
lecture et l’écriture...
Jésus revient aussi
à la discrétion qui apprend à repousser les sciences inutiles
pour le bien... et les sciences dangereuses, notamment la
science du mal, parce que l'homme qui connaît le mal peut
l’opérer très facilement: "La discrétion apprend à réprimer
le désir qu'on a de connaître ce qui regarde autrui, elle porte
aussi à ne point communiquer ce qu'on a appris quand il y a des
motifs suffisants pour ne point faire ces communications.
Demandez à Dieu la discrétion, ma fille, et vous croîtrez comme
votre Sauveur en âge, en sagesse et en grâce devant Dieu..."
L’économie
est la vertu qui règle l'usage convenable et nécessaire des
choses, surtout les objets matériels dont nous avons besoin pour
vivre. "L’économie règle les forces de l'âme en mesurant
leur emploi, en donnant celles qui sont indispensables. Elle
règle les forces du corps en mesurant la manière dont l'homme
doit travailler, le travail qu'il doit faire, l'heure et le
temps dans lequel il doit le faire. Enfin, l’économie règle
l'emploi des choses extérieures que l'homme a à sa disposition,
afin d’en user selon ses besoins, et de ne point les dissiper
d'une manière inutile.
L'économie est
essentiellement une conservation des forces de l'âme et du corps
et des biens de la fortune... Cette conservation des forces,
tant de l'âme que du corps, tend à les augmenter pour conserver
à l'âme qu'il renferme sa vigueur et sa fermeté, et permettre
ainsi, au corps soumis à l'âme d’accomplir les actions
nécessaires à la vie naturelle et surnaturelle.
La conservation
des biens de la fortune tend à les augmenter, afin de s’en
servir ensuite selon les desseins de Dieu, afin de secourir les
pauvres et les malheureux, et de pourvoir soi-même à des
malheurs imprévus qui pourraient advenir. Ainsi, ma fille,
l’économie se rapporte à la tempérance et règle en vous toutes
vos actions selon l'ordre et la raison." (Livre 9, chapitre
4)
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