1 - La
Sainte Eucharistie[1]
1-1-La Sainte Messe et la Sainte communion
Le Père
Eymard, s’extasiant sur les merveilles de l’Eucharistie s’écrie:
“L’institution de la divine Eucharistie est, au dire de Saint Thomas
d’Aquin, le plus grand des miracles de Jésus-Christ: il les surpasse
tous par son objet, il les domine par la durée. C’est l’Incarnation
permanente, c‘est le sacrifice perpétuel de Jésus-Christ; c’est le
buisson ardent qui brûle toujours sur l’autel; c’est la manne, véritable
pain de vie, qui descend tous les jours du Ciel... Celui qui, du limon
de la terre, a fait le corps de l’homme, peut bien changer le pain et le
vin en son Corps et en son Sang. D’ailleurs l’homme change bien,
naturellement, le pain qu’il mange et le vin qu’il boit, en sa chair et
en son sang.”
Pour le
Père Eymard, l’Eucharistie c’est Jésus passé, présent et futur.
C’est la fin de sa vie mortelle, c’est l’expression de son Amour. Dans
l’Eucharistie, tous les mystères divins sont glorifiés, et toutes les
vertus sont présentes. “L’Eucharistie est le royal mystère de la foi
où toutes les vérités aboutissent comme les fleuves dans l’océan. Dire
l’Eucharistie, c’est tout dire.”
Le Père
Eymard envisageait l’Eucharistie, Pain de vie, sous tous ses aspects et,
en particulier, sous celui de ses fruits et de son efficacité dans les
âmes. Il ne craignait pas de déclarer: “C’est le jansénisme qui,
fermant les tabernacles, a préparé l’apostasie des peuples, dont la
Révolution a été la manifestation; c’est en ouvrant les tabernacles
qu’on ramènera les nations à Dieu.”
1-2-Les circonstances de l’Eucharistie
C’est la
veille de sa mort que Jésus institua ce grand Sacrement, au moment où
Judas le quitta après avoir reçu des mains du Maître qu’il trahissait la
bouchée de pain de l’amitié. Jésus avait ardemment désiré cette Pâque,
“sa Pâque”. Jésus livre son Corps à ses apôtres, en utilisant le
temps présent: “Ceci est mon Corps. Ceci est
mon Sang.” Il convient de remarquer que Jésus n’utilise pas le futur,
-ce n’est que demain que son Corps sera livré, que son Sang sera versé-
mais son Sacrifice est vivant tout au long des siècles.
“L’Eucharistie et le Calvaire ne font qu’UN.”
“Àu
Cénacle, comme sur le Calvaire, le Corps du Christ est séparé de son
Sang, et c’est la mort... À l’autel la consécration séparée des deux
espèces rappelle et signifie la mort du Christ... La Sainte Messe n’est
donc pas un simple mémorial, le souvenir vide et froid d’une chose
passée; elle est véritablement la représentation du Sacrifice du
Calvaire, représentation qui contient et nous offre celui-là même
qu’elle figure: Jésus-Christ s’immolant pour nous.”
“Si
Jésus-Christ meurt sur le Calvaire, c’est pour devenir la victime
perpétuelle du sacrifice non sanglant de la sainte Messe.
En
conséquence, pendant le Saint Sacrifice de la Messe[2] ,
nous avons quatre devoirs à remplir envers Jésus:
— Un
devoir latreurique, c’est-à-dire de souveraine adoration,
— Un
devoir eucharistique, c’est-à-dire d’action de grâces
— Un
devoir impétratoire, en le présentant au Père comme le gage qu’il nous a
donné de son amour,
— Un
devoir satisfactoire, en l’offrant pour l’expiation de tous nos péchés,
et pour la réparation de tant de crimes qui se commettent dans le
monde.”
2 - L’Eucharistie
est le Don de Dieu
2-1-L’Eucharistie, Don de Dieu par excellence
L’Eucharistie est, par excellence, le Don de Jésus qui “a réuni tous
ses dons dans un seul Don, et trouvé le moyen, non pas d’épuiser, mais
de dilater sa bonté. La Sainte Eucharistie est la grâce des grâces, le
Don des dons, en elle l’amour de Notre Seigneur s’est multiplié pour
venir jusqu’à nous, par tous les effets d’une bonté qui a traversé
toutes les générations.” Le Père Eymard rappelle le Concile de
Trente qui déclare: l’Eucharistie “c’est l’antidote qui nous préserve
des péchés mortels et nous libère de nos fautes quotidiennes.”
“L’Eucharistie est un don perpétuel fait au monde par Jésus-Christ, son
amour le demande, sa gloire le réclame. L’amour a deux grands ennemis:
l’absence et la mort. C’est comme une flamme sans foyer; rien ne résiste
à cette épreuve. Notre-Seigneur le savait. Aussi son mémorial est-il le
signe et la réalité signifiée. C’est lui-même, voilé sans doute, mais
plein de vie.”
Au
milieu de nous il y a quelqu’un que nous ne connaissons pas.
Préparons-nous à la rencontre du Seigneur, là où vit l’Agneau de Dieu.
N’oublions jamais que c’est l’Eucharistie qui fait l’Église.
2-2-L’Eucharistie, Présence de Jésus
La
présence de l’être aimé est nécessaire à l’amour. “Avec l’Eucharistie
nous savons que Notre-Seigneur nous aime actuellement et personnellement.
Chacun de nous peut se dire: “Il m’aime, il m’aime personnellement.”
Au Saint
Sacrement Jésus est présent et nous pouvons Le servir comme Il le désire:
“L’adorer comme Dieu en Lui offrant l’hommage parfait de tout notre
être, et L’aimer comme homme, de tout notre amour. Par l’Eucharistie une
union parfaite s’établit entre Notre Seigneur et nous.”
2-3-L‘Eucharistie, Don du Cœur de Jésus
“Jésus est arrivé au terme de sa vie mortelle... Mais son Cœur ne peut
se résoudre à laisser sa nouvelle famille, les enfants qu’il engendrera
dans son sang par le Sacrifice du Calvaire... Il ne veut pas les laisser
seuls au milieu de leurs ennemis... Jésus-Christ aura donc deux trônes:
un trône de gloire, au Ciel; un trône de grâce, sur la terre...
Le
Cœur de Jésus estime que ce qui suffit à l’œuvre de la Rédemption, ne
satisfait pas son amour... Son amour fera encore plus pour ses enfants
de la Croix, que la mère la plus tendre pour les enfants de sa
chair...”
2-3-1-Comment
faire?
“Le
Cœur de Jésus résidera au milieu des siens sous la forme d’un sacrement
qui voilera même son humanité... Ainsi,
Jésus choisit l’Eucharistie, “pour que tous puissent venir à lui
sans difficulté et en toute confiance.” Les hommes comprendront
mieux ses paroles: “Apprenez de moi que je suis doux et humble de
cœur.”
2-3-2-L’Eucharistie
est le sacrement de l’amour
La
tradition catholique appelle l’Eucharistie le Sacrement de l’Amour.
”Les autres sacrements produisent la grâce sanctifiante; l’Eucharistie
contient et donne l’Auteur même de la grâce... L’Eucharistie est le
soleil de justice et d’amour, le foyer incandescent de ce feu divin dont
Jésus-Christ a dit: ‘Je suis venu apporter le feu sur la terre, et quel
est mon désir sinon de le voir incendier tous les cœurs’...”
C’est
l’amour qui a établi l’Eucharistie et c’est l’amour qui se donne dans
l’Eucharistie. L’amour veut être aimé dans son Eucharistie.
“L’Eucharistie est l’aliment et l’école de l’amour envers Jésus-Christ...
L’Eucharistie vient du Cœur de Jésus-Christ; elle est par excellence son
don d’amour; elle attend notre amour comme un droit, mais aussi comme
une compensation réparatrice.”
3 - L’Eucharistie,
Sacrifice perpétuel de l’Agneau immolé
3-1-Jésus est l’Agneau de Dieu.
L’Agneau
¨Pascal est une figure de l’Eucharistie; selon Pierre-Julien Eymard, il
y a trois aspects principaux de l’Agneau Pascal: l’Agneau immolé,
l’Agneau mangé et l’Agneau Sauveur.
3-1-1-L’Agneau
immolé
“Jésus-Christ est le véritable Agneau de Dieu: Isaïe parle expressément
de l’agneau dont l’offrande apaisera le roi de Juda.”
[3] C’est
l’agneau que l’on mène à la boucherie et qui se soumet à la souffrance
sans proférer une plainte. “Jean, le précurseur, ne désigne pas Jésus
comme le prince de la paix, mais il dit: ‘Voici l’Agneau de Dieu, celui
qui ôte le péché du monde.’” Jean l’Évangéliste décrit sa vision du
ciel comme “le triomphe de l’Agneau Immolé.”
Sur la
Croix, Jésus-Christ est l’Agneau Immolé. L’Eucharistie, “c’est Jésus
présent sous les saintes espèces, comme Il était sur la Croix, en état
de Victime.”
3-1-2-L’Agneau
mangé
Dans
tous les sacrifices, on consomme la victime immolée. La manducation de
la victime était un gage sacré pour ceux qui s’en nourrissaient. “Par
la communion, la Victime est consommée. Jésus perd, dans le fidèle qui
Le reçoit, sa vie sacramentelle: tombeau de résurrection dans l’âme du
juste, tombeau de mort, et de mort éternelle, pour l’âme coupable. Dans
le communiant bien disposé, Jésus-Christ ressuscite... Le chrétien
devient ainsi un porte-Christ, christophorus, ou même un autre Christ”
Par le
sacrifice de l’autel, Jésus nous donne notre part personnelle des fruits
de la Rédemption. “Ô admirable invention de l’amour de Dieu!”
L’Eucharistie, c’est l’extension, le prolongement de l’Incarnation,
c’est Jésus toujours présent parmi nous et pour tous les hommes. “Le
chrétien ne doit donc s’approcher de la sainte Table, pour manger
l’Agneau divin, qu’avec des sentiments de charité fraternelle, pour
réaliser l’union des cœurs...”
3-1-3-L’Agneau
Sauveur
L’Agneau
pascal était, pour les Hébreux, un gage de vie et l’annonce de leur
libération. Jésus-Christ, l’Agneau de Dieu, est, par l’Eucharistie, la
vie du monde.
3-2-Jésus est le Pain vivant
3-2-1-L’Eucharistie
annoncée dans l’Ancien Testament
“L’Eucharistie est force et douceur. C’est ainsi qu’elle est figurée
dans l’Ancien Testament. Le pain d’Élie, apporté par un ange au prophète
exténué, lui a permis de marcher jusqu’au but qu’il s’était proposé. La
nuée du désert était une ombre pendant le jour et une lumière durant la
nuit. La manne avait toute suavité selon le goût de chacun. Telle est
l’Eucharistie: elle est lumineuse, douce, rafraîchissante, selon les
besoins de l’âme qui la reçoit. Nous aider dans les difficultés, nous
consoler dans nos ennuis, tel est son but.”
3-2-2-Pierre-Julien
Eymard cite quelques paroles de Jésus:
“Je
suis le Pain vivant descendu du Ciel... Ma chair est vraiment une
nourriture et mon sang est véritablement un breuvage. Celui qui mange ma
chair et boit mon sang, demeure en moi et moi en lui... Celui qui mange
de ce pain vivra éternellement.”
Pour le
Père Eymard, en effet, “la communion a pour but, pour effet
particulier, d’assurer, de rendre plus étroite et plus féconde, l’union
entre Jésus-Christ et ses membres; par elle une véritable société de vie
s’établira entre eux et lui; ils seront comme deux cires fondues
ensemble, ils deviendront, en quelque manière, corporels et consanguins
avec lui.”
3-2-3-L’Eucharistie
est notre nourriture
“L’homme transforme en sa substance la nourriture ordinaire parce qu’il
lui est supérieur: il est vivant, elle est morte. En l’Eucharistie,
Jésus-Christ est un pain vivant, d’une vie divine: c’est lui qui
assimile l’homme à sa propre vie.”
“Parlant d’avance du rôle qui achèverait son œuvre rédemptrice, Jésus
disait: “Je suis le Pain de vie.”... Pain de vie! Voilà bien le nom qui
dit tout Jésus-Christ. Comme le grain de froment est broyé, puis blutté
pour devenir de la farine, ainsi, pouvons-nous dire, en fut-il de Jésus-Christ
pendant sa Passion. Après sa Résurrection il aura, pour nos âmes, les
mêmes propriétés que le pain pour nos corps...
L’Eucharistie, c’est la merveille des merveilles... parce qu’elle est
cette nourriture que le Seigneur, clément et miséricordieux, donne à
ceux qui le craignent.”
3-2-4-L’Eucharistie
est l’aliment de notre âme
Selon
Pierre-Julien Eymard, notre âme possède une vie physiquement
indéfectible; elle est de sa nature, immortelle. Mais il y a en elle une
vie surnaturelle, inaugurée par le Baptême. Cette vie surnaturelle doit
être alimentée, et son aliment, c’est Jésus-Christ dans l’Eucharistie:
“Notre-Seigneur a dit: celui qui me mange a, lui aussi, la vie. Mais
quelle vie? Celle de Jésus... Jésus, Pain vivant, ne se changera pas en
nous, il nous fera vivre de lui, il nous donne sa propre vie.”
S’adressant à des personnes du monde, P.J. Eymard insiste: “Un Maître
nourrit sa servante: communiez tous les jours. Quel sera votre travail
si vous ne mangez pas le pain de la vie? Mangez pour pouvoir travailler...
La communion vous est nécessaire comme la respiration aux poumons...
Abandonner la sainte Communion quotidienne, ce serait abandonner votre
place au festin des enfants de Dieu...
Allez
toujours, pourvu que vous puissiez vous traîner, même en souffrant, à la
sainte Table: on vous y attend...”
3-2-5-Nécessité
de la communion
P. J.
Eymard écrit: “Je pose en principe que plus on doit être pur, plus on
doit être saint, et plus on a besoin de communier... Plus la vie que
vous menez est sainte et difficile, plus vous devez vous approcher de la
Table sainte.”
Pour
être fort, il faut communier, il faut avoir faim. “Vous dites:
donnez-nous aujourd’hui notre pain quotidien. Désirez donc le pain de
votre âme, et alors, venez le chercher.
Communiez donc, mais en regardant le Cœur de Notre-Seigneur qui vous
appelle... Sans doute, lorsque la Communion sacramentelle ne vous sera
pas possible, Dieu la remplacera par la communion de sa présence de
grâce et d’amour; il faut cependant désirer la première, parce que Jésus
et l’Église la veulent.”
3-2-6-L’Eucharistie,
Sacrement de vie
Le Père
Eymard insiste:
“Ni
le Baptême qui donne la vie de la grâce, ni la Confirmation qui
l’augmente, ni la Pénitence qui la restaure, ne suffisent. Tous ces
sacrements sont une préparation à l’Eucharistie qui les complète et les
couronne...
Jésus a
dit: Celui qui demeure en moi porte beaucoup de fruits. Mais “Comment
demeurer en Jésus? Il l’a bien précisé: celui qui mange ma chair et boit
mon sang demeure en moi et moi en lui.“
“L’Eucharistie est le pain
des faibles, et elle est aussi le pain des forts. Elle est nécessaire
aux uns comme aux autres. Aux faibles, c’est évident. Aux forts car
l’Apôtre les avertit: ‘Que celui qui a l’impression d’être debout prenne
garde de tomber.’ Ils portent leur trésor dans des vases d’argile; leur
route est entourée de brigands.”
3-3-L’Eucharistie est le gage de notre résurrection
3-3-1-L’Eucharistie,
c’est le Testament de Jésus
L’Eucharistie, c’est le Testament de Jésus, c’est le but de la mort du
Sauveur. L’Eucharistie prolonge en nous l’immolation et la mort de Jésus-Christ.
Écoutons le Père Eymard:
“Le
prêtre consacre séparément le pain et le vin en disant sur l’un ceci est
mon corps; sur l’autre: ceci est mon sang. Par la vertu précise de ces
paroles, le corps devrait être séparé du sang. Si la mort ne se produit
pas, c’est que l’état glorieux de Jésus ressuscité s’y oppose: la mort
ne peut plus l’atteindre...”
L’Eucharistie “est le testament d’amour, l’alliance qu’Il a scellée
avec nous dans sa mort... L’Eucharistie est le Testament de Jésus-Christ.”
3-3-2-Et
pour nous?
“L’Eucharistie prolonge en nous la mort du Christ... afin de nous faire
mourir au péché... afin de nous faire mourir au monde qui a servi
d’instrument au péché et qui reste son puissant instrument en nous.
C’est afin de nous faire mourir à nous-mêmes... et à nous revêtir de
Jésus ressuscité... La communion est donc le gage d’une résurrection
glorieuse.”
4 - L’Eucharistie,
c’est Dieu caché
Jésus
s’est fait homme, pauvre, humble et obéissant. Il est mort sur une
Croix. Cela étonne le Père Eymard, mais, à la limite, il peut le
comprendre. Mais, dit-il, “ce que l’on ne comprend plus, ce qui
épouvante la foi de l’homme, c’est que Jésus-Christ ressuscité, glorieux,
triomphant, ait choisi, pour rester au milieu de nous, un état plus
humble que dans l’Incarnation, plus soumis qu’à Nazareth, plus anéanti
que dans la Passion. Mais...
1°Par son état voilé, Jésus-Christ continue, au milieu de
nous sa mission de Sauveur à la gloire de son Père et pour notre amour.
L’orgueil a perdu l’homme. C’est par l’humilité que Jésus le relève, le
réhabilite, le rétablit dans sa première dignité.
Quelle est belle son humilité eucharistique!
Quelle est riche sa pauvreté eucharistique!
Quelle est ravissante son obéissance sacramentelle!
Qui
refusera d’obéir à Dieu quand Dieu lui-même obéit ici à l’homme?
2°Jésus-Christ voilé encourage ma faiblesse. Il voile sa
gloire afin que j’ose m’approcher de lui, le regarder, lui parler...
Jésus
voile sa puissance; elle effrayerait, elle épouvanterait la faiblesse de
l’homme.
Jésus
voile sa sainteté; elle est si haute, si sublime, qu’elle découragerait
nos faibles vertus.
Jésus
voile son amour; il est si grand, si ardent, si infini, qu’il nous
consumerait s’il n’était tempéré par le voile sacramentel.
3°Le voile eucharistique perfectionne la foi du chrétien...
En l’Eucharistie surtout, les sens ne servent de rien. C’est le seul
mystère de Jésus-Christ où il en est ainsi... Il faut croire sur la
parole de Jésus-Christ, en faisant le sacrifice de nos sens et de notre
esprit, de notre raison... Cette foi ainsi libre et dégagée des sens,
pure dans son action, nous unit simplement à la vérité de Jésus-Christ
au Très Saint Sacrement... L’âme entre alors dans l’admirable
contemplation de cette divine présence, assez voilée pour en tempérer
l’éclat, mais assez transparente à la vue de la foi. Ce voile
eucharistique est un aiguillon pour la foi plutôt qu’une épreuve.
4°Le voile eucharistique perfectionne l’amour du fidèle. Il
purifie cet amour et le dégage des sens... Le voile eucharistique
spiritualise notre amour pour Jésus-Christ. L’union se fait alors
d’esprit à esprit, de cœur à cœur... L’état caché favorise admirablement
la contemplation... Cependant le voile eucharistique conserve le respect
chez les fidèles, auxquels il inspire une sainte crainte de cette
Majesté cachée, en même temps qu’il est une miséricorde pour les
incrédules, en ne les exposant pas à braver, comme les démons, cette
Majesté divine. D’ailleurs, l’amour de Notre-Seigneur a besoin du
mystère, parce qu’il est infini en puissance.”
Et le Père Eymard de conclure:
“Jésus-Christ ne se cache dans ce mystère que par égard pour la
faiblesse de l’homme, pour se manifester graduellement à lui, à mesure
qu’il grandit dans l’amour...
Ainsi
en l’Eucharistie l’âme n’épuise jamais Jésus. À mesure qu’elle entre
dans les profondeurs insondables de sa bonté, elle y découvre toujours
des trésors nouveaux. Jésus est toujours plus aimable à ses yeux. “Celui
qui m’aime, dit-il, sera aimé de mon Père, et moi aussi je l’aimerai et
je me manifesterai à lui.
Qu’est-ce que cette manifestation de Jésus? C’est le mystère de son
amour qui devient lumière, douceur, force, joie, bonheur: le Ciel dans
l’âme.”
5 - La
Sainte Communion
L’acte
de recevoir l’Eucharistie, c’est la Communion. Au temps du Père Eymard,
au XIXè siècle, on utilisait davantage le mot de Communion que celui
d’Eucharistie. L’Eucharistie, c’est Jésus présent dans son Don suprême;
la Communion, c’est l’acte qui conduit le fidèle au Don de Jésus.
5-1-La Sainte Communion est une force
“La
Sainte Communion est plus qu’un remède, c’est une force. Elle nous aide
à devenir bons, vertueux et saints.” Par
son amour, Jésus notre bienfaiteur, “éveille en nous l’amour pour lui,
le désir de lui ressembler, l’attrait vers ce bonheur qui consiste à
l’imiter et à vivre de sa propre vie...”
5-2-La Sainte Communion est une source de bonheur
“La
Sainte Communion est une source de bonheur... Elle est la possession
réelle de Jésus-Christ; la possession des trois Personnes divines est
son fruit ineffable. Elle est aussi la paix, car Jésus est le Dieu de la
paix. Elle est encore la douceur, le parfum céleste de la vraie manne du
désert... Comme nous sommes heureux sur la poitrine de Jésus!”
Car
nous avons besoin de sentir de temps en temps la douceur de l’amour:
“Il le savait bien, ce bon Maître, que
nous avons besoin, de temps en temps, de ressentir la douceur de l’amour;
on ne peut pas toujours être sur le Calvaire, ni sur le champ de
bataille. L’enfant repose sur le sein de sa mère; le chrétien, sur le
Cœur de Jésus... Après tout, c’est l’amour qui fait le bonheur de
l’homme... Notre Seigneur a promis à celui qui communie, non seulement
une joie céleste sur la terre, mais de plus il lui a garanti la vie
éternelle.”
À des
personnes du monde le Père Eymard conseillait: “Regardez la sainte
communion comme un pur don de la miséricordieuse bonté de Dieu, une
invitation à sa table de grâce, parce que vous êtes pauvres, faibles et
souffrantes; alors vous irez avec joie... Partez de ce principe: plus je
suis pauvre, plus j’ai besoin de Dieu; c’est votre carte d’entrée vers
ce bon Maître. C’est la Communion des saints. C’est la communion de
l’infirme.
La
sainte Communion est un grand feu qui dévore en un instant toutes les
pailles de nos imperfections quotidiennes... Cherchez, en Jésus seul,
force, joie et consolation...
Communiez pour aimer, communiez en aimant, communiez pour aimer
davantage... Communiez en pauvre, communiez en mendiante, en infirme, en
malade, mais toujours avec humilité et confiance, avec le désir de mieux
faire et de bien aimer Notre-Seigneur.”
5-3-L’unique nécessaire
“Une
seule chose est nécessaire ici-bas: aimer Dieu et le servir, et c’est la
sainte Communion qui, en nous faisant vivre de Notre-Seigneur, alimente
en nous cet amour et nous fait avancer dans la voie de la sainteté... La
sainte Communion est la fin de la vie et sa perfection, elle est la
dévotion royale et qui remplace tout. Elle est pour vous le grand
exercice des vertus chrétiennes, l’acte souverain de l’amour, la pluie
du matin.”
5-4-Les richesses de la Communion
S’adressant à des enfants préparant leur communion solennelle, le Père
Eymard affirme que la visite personnelle de Notre Seigneur Jésus-Christ
leur apportera toutes les grâces, tous les trésors du Ciel. “Le Roi
du ciel et de la terre, Notre Seigneur Jésus-Christ, descend de son
trône de gloire et vient nous visiter; il vient visiter votre corps et
votre âme, il vient y demeurer avec amour, en un mot, il vient vous
communier de son Corps, de son Sang, de son âme et de sa divinité... Il
vient en vous pour vous faire part de toutes ses grâces, de tous ses
mérites de la Rédemption...”
Par son
Eucharistie, Jésus nous apporte le bonheur. “Celui-là seul est
heureux qui a le cœur content, la conscience en paix, l’esprit du bien,
Dieu pour lui, Jésus-Christ avec lui. Tout dans l’homme est content et
satisfait... On est toujours heureux quand on peut se dire: Jésus m’aime
et je l’aime; nous sommes unis, rien ne me séparera de son amour, de son
service, de sa sainte loi.”
Jésus
règne dans les âmes qui le reçoivent dans l’Eucharistie. ”Il y
imprime les stigmates de son amour crucifié pour la rendre plus heureuse
au ciel.”
6 - La
grandeur de l’Eucharistie
6-1-La préparation
6-1-1-Préparation
lointaine
“Dieu
le Père a, pendant quatre mille ans, préparé les hommes à la venue de
Jésus-Christ... Il les a aussi préparés au don de l’Eucharistie par des
prophéties mystérieuses et des réalités figuratives. David chante la
nourriture, la manne nouvelle, que, dans sa bonté, Dieu donnera à ceux
qui le craignent. Malachie annonce l’offrande d’une victime pure qui, en
tout lieu, remplacera les autres sacrifices et glorifiera le nom de
Seigneur.
L’agneau pascal, la manne tombant dans le désert, le pain apporté par un
Ange à Élie persécuté, figuraient l’Eucharistie, et, plus encore, les
miracles du changement de l’eau en vin aux noces de Cana et la multitude
des pains en faveur des auditeurs de Jésus.”
6-1-2-Jésus
prépare ses disciples
L’Eucharistie, c’est si grand, que le Seigneur a voulu préparer ses
disciples à la recevoir, et Il a accompli Lui-même cette grande tâche.
“Personne autre que Notre-Seigneur lui-même n’a eu la mission
d’annoncer l’Eucharistie, pas plus que de la donner. Un ange a annoncé
l’Incarnation; ici, Jésus-Christ traite son affaire, il promet, il pose
ses conditions. Et pour l’annoncer, Notre Sauveur n’a pas attendu la fin
de sa mission évangélique...
Jésus
a lancé l’idée eucharistique. On l’a d’abord repoussée, puis on a dit:
peut-être est-ce bon. Jésus savait que ses disciples et le peuple juif
allaient se soulever contre cette révélation. Mais il n’a pas reculé.”
Notre-Seigneur promet l’Eucharistie et prépare les âmes à la recevoir:
“C’est pourquoi, avant la promesse, il a opéré un miracle qui
faciliterait l’acceptation. Il n’a rien voulu brusquer, mais amener
doucement les esprits à se laisser persuader... Ce miracle, c’est la
multiplication des pains.”
6-1-3-Et pour nous?
L’Éducation divine
Le Père
Eymard écrit: “Notre préparation doit s’inspirer de celle de Jésus;
elle doit être faite de désir, d’humilité, de pureté.”
Jésus
nous apprend lui-même à nous préparer
Dans une
de ses paraboles, Jésus parle du repas de noces du fils d’un Roi. Pour y
assister, il n’était pas besoin d’être riche: tout le monde était appelé...
mais, tous les invités devaient, pour entrer dans la salle des noces,
avoir revêtu la robe nuptiale. Un homme, on ne sait pas pourquoi, avait
réussi à entrer sans avoir revêtu cette robe. “Le roi le vit, et le
fit mettre dehors... Les autres, quoique pauvres et estropiés purent
rester, parce qu’ils portaient le manteau blanc, la tenue de
circonstance.”
Notre
Seigneur n’exige pas grand’chose pour nous admettre à sa table: il
demande seulement que nous ayons faim...”
et que nous soyons revêtus de la robe de pureté et d’humilité. “Car
rien ne remplace la pureté de l’âme... Plus l’âme et pure, plus elle
devient un paradis de délices pour le Dieu de l’Eucharistie.”
D’où un
conseil, peut-être difficile à mettre en œuvre de nos jours: “La
confession de chaque semaine reste la règle ordinaire du chrétien admis
à la communion fréquente; l’Église la lui conseille vivement. Mais le
moyen quotidien de se purifier de ses fautes de fragilité humaine, c’est
l’amour de Dieu.”
6-2-La foi en l’Eucharistie
La foi
en l’Eucharistie n’est pas seulement une croyance qui échappe à notre
raison. Sous l’action de l’Eucharistie elle-même qui la développe, notre
foi devient forte conviction de la présence réelle de Jésus, et
sentiment surnaturel de la vérité de l’Eucharistie.
“Cette
foi plus vive en l’Eucharistie ne peut manquer de produire dans l’âme un
plus grand amour pour Jésus-Christ. Impossible de mieux le connaître
sans l’aimer davantage. Cet amour est d’abord un amour de raison, puis...
si on est fidèle, cet amour devient un centre de vie, une activité de
retour d’amour qui occupe le cœur tout entier. La foi elle-même s’élève
à être l’adoration et l’amour de la souveraine volonté de Dieu dans le
don de l’Eucharistie. La raison est venue jusqu’à la porte du
tabernacle; l’amour seul y entre, mais pur et libre, affranchi de toute
servitude des sens...
Alors
commence la contemplation de Jésus-Christ qui communique sa science et
fait entrer dans les profondeurs de l’amour divin. “Cette action de
Jésus-Christ requiert la sainte Communion; c’est là que se trouve sa
source. Elle se poursuit dans l’adoration eucharistique. L’âme goûte
alors un profond repos. Elle a trouvé son centre et sa fin en la divine
Eucharistie... Elle goûte Jésus-Christ avec tous les mystères de sa vie
mortelle et de son état glorieux... L’âme n’épuisera jamais l’objet,
toujours nouveau pour elle, de l’amour et de la bonté de Jésus-Christ
dans l’Eucharistie.”
L’Eucharistie est un très grand mystère. L’eucharistie n’existe que si
Jésus-Christ est vraiment Dieu, et s’Il est vraiment ressuscité. Aussi
Jésus s’est-il souvent efforcé de donner les signes qui permettront,
plus tard, de Le reconnaître comme Dieu, Fils de Dieu. À ceux qui Lui
demandaient ce qu’il fallait faire pour faire les œuvres de Dieu, Jésus
dit: “C’est de croire en Celui qu’Il a envoyé... C’est Lui, le Fils de
l’Homme, qui vous donnera la nourriture qui demeure éternellement...
Notre
Seigneur fait appel au témoignage de son Père, pour obtenir un acte de
foi à sa propre divinité: au Jourdain, le Père a marqué, a sacré son
Fils incarné; il a montré ainsi qu’il a communiqué à l’humanité du
Sauveur, le droit de faire des miracles. Avant de réclamer la foi à
l’Eucharistie, Jésus affirme sa puissance divine qui le rend capable de
faire un pareil prodige... Avant de croire à l’œuvre du Cœur de Jésus-Christ,
il faut croire à sa divinité et dire: Seigneur, vous pouvez faire plus
que je ne puis comprendre.”
6-3-L’enseignement de Jésus sur l’Eucharistie
Après la
multiplication des pains, “Notre-Seigneur leur dit: je suis moi-même le
pain de vie... le pain vivant descendu du ciel afin qu’on en mange et
qu’on ne meure point... Le pain que je donnerai, c’est ma chair,
celle-là même que je donnerai pour le salut du monde.”
Mais
l’objection revient sans cesse contre la divinité de Jésus: “Les juifs
murmurent: n’est-ce pas là Jésus, le fils de Joseph, dont nous
connaissons le père et la mère?... Comment cet homme peut-il nous donner
sa chair à manger? Notre-Seigneur a beau insister sur son origine et sa
mission divines... cela ne les remet pas. Ils sont scandalisés, et non
seulement la foule, mais beaucoup de ses disciples se retirent disant:
ce langage est trop dur, et qui peut l’accepter?”
Beaucoup
s’en vont et Jésus ne fait rien pour les retenir... “Jésus avait
toujours recherché et accueilli les pécheurs. Ici non. Il était même
prêt à renvoyer les douze... Mais Pierre s’écrie: “Seigneur, à qui
irions-nous? Tu as les paroles de la vie éternelle!” Jésus ne relève pas
la profession de foi de Pierre; sans doute est-il triste à cause de
Judas, car “Jésus savait, dès le commencement, qui étaient ceux qui ne
croyaient pas et qui était celui qui le trahirait... Il parlait de
Judas, fils de Simon Iscariote, car c’était lui qui devait le trahir.”
Le Père
Eymard conclut: “Croire à l’amour, tout est là; il ne suffit pas de
croire à la vérité, il faut croire à l’amour. Et l’amour, c’est
Notre-Seigneur Jésus-Christ au Très Saint Sacrement. Voilà la foi qui
fait aimer Notre-Seigneur.
[1] Le
recueil de texte intitulé “La Sainte
Eucharistie”
est une compilation d’écrits du Père Eymard, traitant de la
Présence réelle, de la Sainte Messe et de la Sainte Communion.
Les livres dont nous les avons extraits ont été publiés en 1953,
par la Librairie Eucharistique (23 Avenue de Friedland à Paris,
VIIIè)
[2] Saint
Pierre-Julien Eymard rappelle ici la signification des vêtements
liturgiques revêtus par le prêtre qui va célébrer la Messe.
-L’amict est l’image du voile jeté par les soldats sur la face
adorable de Jésus.
-L’aube symbolise la robe blanche dont, par dérision, Hérode fit
revêtir Jésus.
-Le cordon rappelle les liens imposés à Jésus pour le conduire
de Gethsémani au tribunal de Caïphe.
-Le manipule, les chaînes qui le lièrent à la colonne de la
flagellation.
-L’étole, les cordes avec lesquelles il fut traîné jusqu’au
Calvaire.
-La chasuble figure le manteau d’écarlate dont on affubla Jésus
au prétoire, ou encore la croix dont il fut chargé.
[3] Extraits
de conférences ou de sermons du Père Eymard
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