LA VOIE MYSTIQUE

adveniat regnum tuum

Vade Mecum

PETIT TRAITE DE CHARITE

Âme religieuse ! dit Jésus, pour m’aimer de tout ton cœur, tu dois m’aimer en toutes les créatures et donner toujours la préférence au prochain, parce que tu dois l’aimer plus que toi-même.

Tu dois, par amour considérer dorénavant tes sœurs comme autant d’Hosties consacrées, dans lesquelles, à travers l’apparence, parfois défectueuse, tune voies plus que moi. Cela te rendra égale avec toutes, parce que tu ne feras plus de distinction : un seul est ton Jésus, caché sous quelque personne que ce soit.

Tu m’aimeras également dans toutes tes sœurs ; tu me consoleras, tu ‘aideras en elles, et surtout, s’il t’arrive de souffrir quelque chose de leur part, tu le cacheras dans ton cœur, comme l’on fait d’une chose précieuse, que l’on tient cachée pour ne pas la perdre.

De ton côté, tu tâcheras de ne jamais faire souffrir personne. Il t’en coûtera, parce que tu devras toujours te sacrifier, mais souviens-toi que dire sacrifice, c’est dire amour, et dire amour, c’est dire sacrifice.

Tu aideras le prochain le plus que tu pourras, par ton exemple. Souviens-toi que tu dois être dans la communauté comme la personnification de ma bonté, de ma miséricorde et de ma charité, par conséquent, sacrifier toujours tes intérêts à ceux du prochain.

Et puis, aide-le beaucoup, le cher prochain, en me le recommandant par tes prières. Tu as tout pouvoir sur mon Cœur, sache t’en prévaloir. Souviens-toi que la bénignité doit surnager en tout. Ne fais jamais de jugement sur ton prochain, mais excuse-le toujours. Si u l’excuses, je t’excuserai auprès de mon divin Père.

S’il te vient des pensées contre la charité, ce n’est pas mal. Les mauvaises herbes se cachent parmi les bonnes sans avoir été semées. Ton travail doit consister à les extirper aussitôt et mettre à leur place la bonne semence.

Regarde le prochain comme la pupille de ton œil, puisque je te considère comme la pupille de mon œil divin.

Je veux que tu tiennes le prochain dans ton cœur comme dans une serre d’amour. Dans la serre, les fleurs jouissent du soleil, mais elles ne sont pas frappées par la tempête ni secouées par le vent. C’est ce que je veux de toi pour le prochain : que tu l’exposes au soleil, c’est-à-dire que tu ne laisses passer aucune sorte d’exquise attention, de celles qui réchauffent le cœur ; mais ce qui pourrait le blesser ou le faire souffrir, si peu que ce soit, je veux que tu l’éloignes de lui, que tu le prennes sur toi, comme font les vitres qui reçoivent sur elles la pluie, la tempête , les brouillards, mais qui n’en laissent rien passer sur les fleurs. Souviens-toi toujours que ceci est une maxime évangélique : tu dois aimer le prochain comme je t’ai aimée, par suite plus que toi-même. Si tu savais comme je repose dans un cœur aussi charitable ! J’y trouve mes délices et je les fais goûter l’âme que j’inonde de paix, de joie, de célestes consolations.

Enfin, tu dois désirer au prochain tout le bien spirituel que tu désires pour toi, et le favoriser dans le prochain comme en toi-même.

DECALOGUE DE L’AMOUR

1- Se donner à l’Amour.

2- S’abandonner à l’Amour.

3- Suivre l’Amour.

4- Ne pas sortir de l’Amour.

5- Croire à l’Amour.

6- Seconder l’Amour.

7- Inculquer l’Amour.

8- Se laisser brûler par l’Amour.

9- Se laisser employer par l’Amour.

10- Se laisser consumer par l’Amour.

L’Amour se donne à qui se donne à lui sans réserve, sans retour, sans préoccupation.

L’Amour prend un soin amoureux de celui qui s’abandonne totalement à lui.

L’Amour guide, il donne la main, et s’il est nécessaire, porte l’âme qui se livre à lui.

L’Amour renferme en soi l’âme qui s’est une fois donnée à lui, et ne la laisse plus sortir, à moins qu’elle ne le veuille de sa libre volonté ; rien d’autre ne la peut enlever du pouvoir de l’Amour.

L’Amour jouit de ce que l’âme croit e lui dans toutes ses opérations, même les plus douloureuses.

L’Amour aime être favorisé, secondé, et il fait des progrès admirables dans l’âme qui l’aide ainsi.

L’Amour aime à être communiqué et il croît en l’âme dans la mesure même où elle le communique.

L’Amour brûle tout ce qui est apte à brûler, et plus la chose est sèche, plus il la brûle vite et facilement.

L’Amour jouit de disposer non seulement de l’âme, mais encore de ses œuvres pour qui il lui plait.

Finalement l’Amour consume jusqu’au bout l’âme qui s’est donnée à lui, si elle n’oppose pas de résistance.

DECALOGUE DE L’HUMILITE

Tu n’es rien, tu es moins que rien, parce que tu es une misère coupable et un rien pécheur.

Tu ne peux rien par toi-même ; une seule chose t’est possible : m’offenser en abusant de mes grâces, et te préparer une éternelle damnation.

Tu ne mérites rien, et par conséquent le rien ne juge rien, ne dit rien, ne dit rien, ne demande rien, ne se lamente de rien.

Le rien se contente de tout, parce que le rien ne mérite rien, ne demande rien, ne se lamente de rien.

Le rien ne prétend pas que les autres s’occupent de lui, et quand ses supérieurs le font, par charité, il s’enfonce dans l’abîme de son indignité.

Mon épouse, tu dois te considérer comme un chiffon ; non comme n chiffon net, dont tant de fis encore on fait cas, parce qu’il sert à essuyer, mais comme un haillon tout malpropre qui fait horreur à voir, et que l’on fait courir sous les pieds pour ne pas le toucher avec les mains ; ou bien si on le prend avec les mains c’est seulement du bout des doigts pour ne pas les souiller. Voilà comment tu dois te regarder en communauté pour te tenir à ta place.

Tu dois te tenir constamment abîmée dans la considération de ton néant, et t’estimer indigne de tout ce qui t’est donné.

Ne t’oppose en rien à ce que l’Amour veut faire de toi. Même si je te fais de grandes grâces, reçois-les avec humilité. J’ai créé le monde de rien. Dans le monde, j’ai créé le soleil — et combien il set, le soleil ! — J’ai créé aussi le petit moucheron… Et tous deux servent à ma gloire. Ne méprise aucune grâce, même la plus petite. Fais-les valoir toutes, mais par amour. Et puis, ne te fais pas entendre. Quand est-ce qu’un arbre porte des fruits et qu’il e donne le plus ? Quand ses racines sont au plus profond de la terre ; plus elles s’enfoncent, moins elles se voient au dehors. Ainsi dois-tu faire : te cacher toujours plus dans la vie intérieure. Au dehors, vie commune, régulière oui, mais rien d’extraordinaire ; à l’intérieur, au contraire que tout soit extraordinaire, en commençant par la charité, puis l’humilité, puis la mortification.

Laisse-toi enlever par l’Amour, quand il lui plaira de te retirer de la terre de tes misères, afin de te placer pour l’éternité dans la couronne de gloire de mon Cœur.

Finalement, tant que tu te tiendras abîmée dans ton néant _ ce qui t’attirera beaucoup de grâces _ je serai toujours pour toi un Dieu de bonté, de miséricorde, un Dieu d’amour. Mais, le jour où tu t’enorgueillirais, je deviendrai pour toi un Dieu de justice. Je te le dis, non pas pour t’effrayer, mais pour t’avertir, parce que je t’aime. Si tu pratiques l’humilité, tu trouveras la paix ; et si tu ne vis et tu ne respires qu’humilité, tu seras poursuivie par mon amour, par es prédilections, par mes faveurs… Ame religieuse, je voudrais pouvoir te nommer mon Humilité, et j’y réussirai si tu es fidèle à l’Amour.

DECALOGUE DE LA PLUS HAUTE PERFECTION

Pour tendre à la plus haute sainteté, à la perfection la plus consommée, à la plus étroite, la plus intime et la plus suave union avec Dieu, il faut que l’âme se tienne habituellement dans un abîme d’anéantissement, d’humilité, de mépris d’elle-même et d’oubli de tout le créé.

Quand Dieu, comme Maître absolu de toute créature, retire cette âme de l’abîme où la grâce l’avait fait cacher pour la mettre en sûreté, elle ne doit pas, sous prétexte d’humilité, opposer d’obstacles à l’Amour dans ses opérations, mais le suivre comme une éponge qui, retirée de l’eau où elle était plongée, porte cette eau avec elle, en reste pleine, et non seulement la donne si elle est pressée, mais aussi la perd sans même être pressée. Ainsi l’âme, retirée par la grâce divine de cet abîme d’anéantissement, doit en porter avec soi le parfum et les fruits, non seulement quand elle est pressurée, c’est-à-dire corrigée, mais aussi en quelque moment que ce soit.

Une fois que l’âme a servi l’Amour en ce qu’i réclamait d’elle, il la remet en sécurité dans l’abîme de l’anéantissement, de l’humilité et du épris de soi, et elle doit se trouver si bien dans cette atmosphère qu’elle n’en désire plus sortir, sinon pour servir de nouveau à l’Amour. Les opérations de l’âme en cette demeure d’anéantissement consistent à s’unir aux dispositions intérieures du Verbe de Dieu lorsqu’il se revêtit de la nature humaine. Tout son travail se résume en ces mots : admiration, adoration.

Quand l’Amour, attiré par l’âme humaine se présente elle avec ses divines faveurs, la première chose qu’elle doit faire, c’est se prosterner aux pieds de son Dieu, confessant son indignité. Ensuite, lorsque satisfait de cet accueil, Dieu la relève en se communiquant à elle, son devoir est d’adhérer aussitôt avec amour, avec joie, avec reconnaissance à quelque grâce que ce soit, fût-ce la plus extraordinaire, parce qu’alors ce n’est pas elle qui les cherche, mais elle les reçoit, et Celui qui les lui donne pense encre à la tenir dans l’humilité. Tout consiste à bien établir la préparation, le fondement, la base : Humilité, humilité, toujours humilité. Quand il y a de l’humilité, je donne ; quand j’en trouve davantage, je donne davantage, et quand je vois une âme ne vivre que d’humilité, ne désirer qu’humiliations, elle m’attire comme un aimant.

Je porte insensiblement, mais efficacement, l’âme qui m’est fidèle à ceci :

a) A un grand désir de disparaître, de ne plus faire occuper d’elle ; et lorsque, en quelque rencontre, elle doit recourir à la charité de ses supérieurs, elle en est confuse comme si elle dérobait leur temps.

b) A se faire la servante de tous et toujours céder, mais sans laisser paraître qu’elle cède ; à contenter les autres ; à favoriser les autres ; à secourir les autres ; au prix de continuelles mortifications : voila les fruits du véritable amour.

c) A une telle faim et soif d’obéissance, quelle ne respirerait même plus que par obéissance. C’est aussi un fruit très précieux de l’amour : l’obéissance est comme la sœur de l’humilité.

d) Enfin j’allume dans l’âme qui m’aime un tel feu d’amour, d’imitation, qu’elle ne peut plus vivre sans agir pour Dieu : le sacrifice est sa vie, comme l’huile est la vie de la flamme qui brûle.

6- L’âme humble étant ainsi ensevelie dans l’abîme de l’humilité et de l’anéantissement, je descends avec amour au lieu de sa retraite et, m’approchant d’elle avec mes communications spéciales, je lui fais goûter par avance les délices du paradis. Oh ! qui pourra exprimer ce que je dis à l’âme humble, et qui pourra répéter ce que je lui explique ! Ce sont les leçons que l’Amour donne par amour et qu’il donne uniquement à l’âme humble, parce que, à elle seule il donne la capacité de les comprendre. La disposition intérieure de l’âme en cet état si sublime doit être celle-ci : silence avec Dieu, attendre tout de lui, et recevoir avec une souveraine gratitude tout ce que Dieu lui donne. Ce n’est as humilité de refuser les grâces quand Dieu les donne, mais c’est véritablement humilité de s’en reconnaître indigne et de les prendre en le remerciant et en magnifient sa bonté.

7- Un état auquel j’appelle une âme fidèle, dès le principe d sa vie d’union avec moi, c’est celui d’une particulière imitation de ma vie dans le sein de ma très pure Mère, l’auguste Vierge Marie. Cette âme est ensevelie en Dieu, Dieu la porte, il se sert d’elle pour faire le bien, mais l’âme ne voit rien, n’est point en vue ; elle est l’instrument de beaucoup de bien que Dieu fait passer par elle, mais c’est un instrument ignoré. C’est la voie la plus sûre. C’est celle des âmes intérieures qui n’ont pas de relations extérieures avec le prochain. Tout leur bien est au-dedans. C’est un bien personnel et un bien en faveur du prochain, mais tout caché.

8- Un autre état auquel j’appelle les âmes, spécialement les prêtres et tous ceux qui ont le soin des âmes, c’est l’imitation de ma vie cachée. Elle est moins cachée que celle que j’ai écu dans le sein de ma Mère, mais elle est plus difficile à imiter. La retraite en est moins profonde et il faut plus de vigilance pour air purement pour Dieu, pour rapporter tout à Dieu, pour recevoir de lui les consolations que donne la bonne conduite de ceux dont on est chargé. Oui, il est beaucoup plus facile à une âme qui opère d’une manière cachée, de faire du bien purement pour Dieu ; mais elle ne dit as pourtant se mettre en peine si elle est appelée au ministère des âmes. Qu’elle se souvienne alors qu’elle est seulement un signe sensible, mais que c’est Dieu qui opère, et qu’elle se tienne dans un profond sentiment d’humilité. Le bien qu’elle fera sera en proportion de son abaissement, de sa défiance d’elle-même et de s confiance en Dieu.

9- En quelque état que se trouve une âme quand je la favorise, je lui donne l’attrait d’imiter ma vie eucharistique. C’est une vie de mort, que par là, je lui inspire. Avoir des yeux, et ne pas voir ; avoir des oreilles, et ne plus écoute que ce qui peut accroître l’amour ; avoir une bouche et ne l’employer que pour parler de l’Amour ; avoir des mains, des pieds…, avoir un cœur et ne s’en servir qu’autant que le voudra l’Amour : dépendre de l’Amour comme un petit enfant dépend de sa mère, en tout. Vivre seulement pour s’immoler à l’amour de Jésus, et par chaque immolation, acquérir une force nouvelle pour servir l’Amour.

10- L’Amour est joie, l’amour est paix, il est repos, tranquillité, fidélité. Lorsque ce divin amour prend possession d’un cœur, il y porte à sa suite une paix divine, une confiance inébranlable, une fidélité absolue et un parfait repos ; puis il s’arrête dans cette âme fortunée, en fait le centre de ses divines faveurs et comme le dépôt de ses grâces de choix.

DECALOGUE DE LA CONFIANCE

J’ai un Dieu qui est tout mien.

Ce Dieu, tout mien, c’est mon Père.

Ce Dieu, tout mien, veut que je sois toute senne pour toujours.

Ce Dieu d’amour, pour me chercher, est descendu du ciel sur la terre.

Ce Dieu d’amour me demande mon cœur.

Ce Dieu d’amour veut être pour moi frère, ami, consolateur.

Ce Dieu d’amour pousse la tendresse jusqu’à vouloir être pour moi médecin, médecine, et, plus que tout, époux.

Ce Dieu d’amour veut être dépouillé comme un arbre dont on cueille tous les fruits, et qui, au lieu de se plaindre, en produit d’autres : l’arbre attend, pour cela, une autre année, mais moi, je fructifie aussitôt.

Ce Dieu d’amour ne cherche que misères à consumer, imperfections à détruire, volontés faibles à fortifier, bons propos à faire valoir.

Ce Dieu d’amour va à la recherche de ceux que le monde méprise, abhorre, abandonne, c’est-à-dire les pauvres pécheurs, et, après les avoir convertis avec les délicatesses de sa charité, avec les industries de sa miséricorde, s’il y trouve la correspondance qu’il cherche, il en fait des chefs-d’œuvre de sainteté.

DECALOGUE DE LA MISERICORDE

Vive le Sacré-Cœur de Jésus, fontaine de toute miséricorde !

Je suis le Dieu de toute miséricorde.

Il n’est rien que je ne cherche autant que d’user toujours de miséricorde.

Pour moi, user de la justice, c’est aller contre le courant ; il faut me faire violence.

La porte de ma miséricorde n’est pas fermée à clef ; elle est seulement entrebâillée. Pour peu qu’on la touche, elle s’ouvre Même un petit enfant peut l’ouvrir, même un vieillard qui a perdu ses forces.

Au contraire, la porte de ma justice est fermée à clef, et je l’ouvre seulement à celui qui m’y contraint ; mais spontanément, je ne l’ouvrirais jamais.

Une fois que l’âme a franchi le seuil de ma miséricorde, elle tombe au pouvoir de l’Amour qui ne songe plus qu’à l’empêcher de fuir et qui la charme par tous les moyens, pour lui faire aimer sa nouvelle demeure.

Lorsqu’elle est devenue l’heureuse prisonnière de l’Amour, celui-ci lui donne la liberté, mais seulement dans l’enceinte de l’Amour, parce que si elle sortait de cette enceinte, elle trouverait la mort. L’Amour ne l’empêche pas de sortir, parce qu’elle est libre ; mais il l’avertit, et c’est là le frein qu’il lui met.

Lorsque l’âme entre dans les domaines de l’Amour, plus elle est réduite en mauvais état par suite de maux que les désordres et les passions lui ont fait souffrir dans le passé, plus l’Amour jouit d’avoir tant à faire.

Les âmes les plus misérables, les plus débiles, les plus infirmes sont les meilleures clientes de l’Amour, celles que la miséricorde divine aime le plus.

Ces âmes, ainsi objets des prédilections divines, deviendront comme autant de monuments vivants pour magnifier la multitude des miséricordes de Dieu, Elles projetteront sur lui les reflet de la très vive lumière qu’elles en reçurent au cours de leur vie mortelle, dans la multitude des délicatesses dont il usa pour les conduire au salut éternel. Ces âmes resplendiront comme des pierres précieuses et seront la couronne de la divine miséricorde.

Défi pour le Carême [1]

Si ce défi, dit Jésus, est pratiqué avec amour et avec un vrai désir de me plaire et de me consoler, il fera faire aux âmes de mes épouses un grand progrès dans l’intimité de mon Sacré-Cœur.

Leur emploi, leur plus doux emploi pendant le Carême, sera de me tenir spéciale compagnie dans ma Passion, en méditant plus souvent sur mes souffrances, prix de la rédemption des hommes ; elles devront être comme autant de Véronique destinées par amour à essuyer ma Face divine.

Chacune maison religieuse, chacune de mes épouses sera comme un cabinet d’étude, où, dans la solitude du coeur, le plus qu’il sera possible, on se pénétrera de l’esprit et surtout le cœur de mes traits divins. Ce travail se fera dans le silence et le recueillement. L’âme sera le lin sur lequel, à proportion de son application, je fixerai ma divine empreinte. Mon intention est de faire de mes chères épouses comme autant de photographies vivantes, en sorte que chacune voit dans ses sœurs, même extérieurement, le travail de la grâce.

Le défi consistera plutôt en pratiques intérieures, pace que c’est le cœur qui doit principalement travailler, mais on y joindra aussi les pratiques extérieures, surtout celles de charité, de douceur et d’humilité, qui unissent le plus les cœurs.

Mon désir est que les cœurs se laissent pénétrer de la pensée si salutaire de ma Passion, comme une étoffe se laisse, sans bruit, imbiber d‘huile et en reste toute pleine. Ceci n’est pas une obligation, mais une invitation de l’Amour. On me ferait plaisir si, au moins une fois par jour, on méditait sur ma Passion. La pensée de es souffrances doit être pour mes épouses comme un bouquet qu’elles portent toujours sur le cœur.

Je désirerais que chacune me tînt une particulière compagnie le long de la journée, s’habituant à me suivre par la pensée. Pour cela, il sera bon de choisir, à la fin de chaque méditation, deux ou trois pensées sur lesquelles on reviendra souvent, afin de se maintenir plus facilement unie à moi.

Et comme il ne suffit pas à l’amour de contempler, mais qu’il veut encore imiter, chaque religieuse se fixera, pour le Carême, une pratique _le silence, par exemple, _ qu’elle observera avec une spéciale fidélité, pour travailler à me reproduire plus fidèlement en elle.

Et maintenant, commençons à parler des pratiques extérieures :

Faire, chaque vendredi de Carême, e Chemin de la Croix ou réciter le petit chapelet de mes plaies sacrées. Si cela peut se faire en commun, au moins une fois, j’en aurai du plaisir.

Pour essuyer mon visage, comme Véronique, mes chères épouses feront leurs actions du mieux qu’elles pourront, non seulement avec la disposition intérieure, mais encore avec la perfection extérieure. La pureté d’intention sera la blancheur du lin ; la fidélité et l’amour dans l’expiation en seront la souplesse.

Elles m’enlèveront les épines en ayant soin d’épargner au prochain toutes celles des petites difficultés et incommodités, les prenant pour soi le plus qu’il se peut.

Celle qui voudra plus tendrement m’aimer, prendra à tâche au moyen de quelques bonnes paroles pleines du baume de la charité, de penser les blessures que le prochain pourrait recevoir en quelques rencontres. En pratiquant l’humilité et la douceur, il faut imiter Véronique dans son courage à passer au travers des soldats pour venir me rejoindre ; l’âme la plus généreuse à s’humilier, surtout en public, sera celle sur laquelle j’imprimerai mieux et plus vite ma divine image.

Ame religieuse, te plaît-il ce défi ? Il est un don de mon amour, non seulement aux communautés religieuses, ais encore aux autres âmes qui vivent dans le monde, parce que celles-ci pourront également l’observer en quelques points.

Défi pour le Mois de Mai

C’est Jésus qui le propose à ses épouses :

Vive la Mère de l’Agneau Immaculé !

Vive Marie, la Reine du Sacré-Cœur de Jésus !

Demeurez en ce beau mois de mai, le plus qu’il vous sera possible, unies en esprit à votre céleste Mère et donnez-lui tout ce que vous ferez afin qu’elle-même me le présente. Elle fera bien vos affaires, et avant de ‘offrir ce qu lui est donné, elle aura soin d’y mettre la dernière main. Cela doit vous exciter à avoir en elle une filiale confiance ; vus la lui prouverez par la récitation quotidienne de neuf Ave Maria en son honneur. Votre occupation consistera à faire de chaque journée de ce beau mois, comme une rose que vous lui présenterez le soir. Et vous aurez bien soin d’e enlever les épines, afin que votre bonne Mère n’ait qu’à jouir du parfum.

La rose sera formée du plus grand nombre possible d’actes de fidélité, et surtout de charité ; le retranchement des épines consistera dans la véritable mortificationdes sens, qui plait tant à mon Cœur.

Ensuite, vous élèverez dans votre cœur, un autel en l’honneur de la Madone, et vous en aurez soin comme petites sacristaines de Marie.

Vous étendrez sur l’autel de blanches nappes en faisant, autant que possible, toutes vos actions avec une grande pureté d’intention. Vous mettrez des cierges et des fleurs fraîches : les cierges seront les pratiques d’exacte observance par lesquelles vous honorerez particulièrement Notre-Dame pendant ce mois ; les fleurs seront les petites vertus cueillies sur votre passage.

Vous vous ferez une étude spéciale d’imiter la très sainte Vierge dans son recueillement et dans son union avec Dieu.

Que doit faire une âme quand elle se trouve en état d’aridité ?

S’humilier ;

Se confier dans l’immense bonté de Jésus ;

Le réveiller par une plus fidèle fidélité ;

L’appeler des noms les plus doux ;

Lui préparer de belles surprises pour son retour ;

Quand de nouveau, il se fait entendre, l’enlacer étroitement afin de ne plus jamais le laisser repartir

Dans les consolations spirituelles ?

S’humilier ;

En être reconnaissant et prendre ne Dieu son seul plaisir ;

Faire bonne provision de vertu pour le temps de l’aridité ;

Se tenir toujours prête à la privation des faveurs sensibles, pour continuer à servir Dieu fidèlement, au milieu des aridités et des dégoûts.

Cinq conseils de perfection

La très sainte Vierge Marie vous donne les conseils suivants :

Si l’âme religieuse veut être la benjamine du Père éternel et de l’Esprit-Saint, et encore ma petite benjamine, il faut qu’elle aime beaucoup le mépris, et l’oubli d’elle-même et l’abandon à Dieu.

Si elle veut être portée avec tendresse entre les bras de Jésus, son doux Epoux, il faut qu’en toutes les occasions de difficultés, de peines, de contre-temps et semblables, elle dise aussitôt : " J’ai un Jésus ! " et puis qu’elle se repose en Lui.

Si elle veut toujours avancer et pénétrer dans les plus intimes retraites du Cœur de Jésus, il faut qu’elle s’adonne à une rigoureuse et constante mortification des sens et à l’observation d’un silence exact.

Si elle veut croître dans la vie intérieure et découvrir de nouveaux horizons, elle doit _ puisque Dieu se communique à l’âme prompte à le recevoir _ se livrer au pouvoir de l’Amour, parlant peu aux créatures, beaucoup à Dieu, mais avec le langage du cœur et surtout se servir des créatures comme de moyens pour monter à Lui.

Enfin, pour arriver bientôt à la perfection, il faut qu’elle se propose en tout, Dieu seul, sa gloire, son bon plaisir : avec cela, elle aura toujours la aix. Et puis, qu’elle se souvienne de considérer Jésus comme époux, et par conséquent avec un cœur dilaté.

Pour honorer les Mystères du Saint Rosaire

A) MYSTERES JOYEUX

     I° L’Incarnation

Aspire, ô mon épouse, à imiter mon amour pour l’anéantissement, et cache-toi toujours plus. Pour cela descends dans une connaissance intime, mais amoureuse et confiante, de ton néant.

     II° La Visitation

Tâche de te donner aux âmes le plus que tu peux, non seulement autour de toi d’une manière directe, mais encore aux âmes éloignes, qui sont les plus nombreuses ; les fils de l’amour te mettront en communication avec ces âmes.

     III° La Nativité

Dans beaucoup de cœurs, cherche-moi un lieu où je puisse naître avec ma grâce. Je ne dédaigne ni la pauvreté, ni la misère, pourvu que la bonne volonté s’y trouve ; tâche, par tes sacrifices, et surtout par une grande pureté de conscience, d’obtenir de mon amour ce bienfait pour les âmes.

     IV° La Présentation de Jésus au Temple

Je suis en beaucoup de cœurs comme un trésor infructueux ; ils e possèdent parce qu’ils ont la grâce, mais ils ne me font pas valoir. Pour suppléer à cela, offre-moi souvent à mon Père, au nom et de la part des âmes qui ne le font jamais.

     V° Mon Recouvrement au Temple

Cherche-Moi avec amour et reconduis-moi avec les saintes industries dune vraie charité dans beaucoup d’âmes d’où le démon m’a fait fuir. Je suis prompt à revenir si chacune d’elles cherche mes traces, me ramène et me tient compagnie.

B) MYSTERES DOULOUREUX

     I° L’Agonie

Efforce-toi, autant que tu le peux, principalement s’il t’est donné de présider la communauté, de consoler les âmes affligées, surtout celles qui ont des épreuves intérieures. Verse dans es âmes le baume que je te ferais prendre dans Mon Cœur ; tu le répandras sans parcimonie. Ne crains pas qu’il vienne à manquer ; s tu le donnes sans cette appréhension, tu en auras toujours ; si tu te défies, il cessera. Ainsi, pratiquant la charité et la confiance, tu consoleras Mon Cœur.

     II° La Flagellation

Si tu as charge de supérieure, prends à cœur d’inculquer un grand amour à l’observance. Toutes les petites infractions aux règles, aux recommandations de l’obéissance, à la charité, sont comme autant de coups de fouet, qui frappent ma personne divine. Cherche le moyen de détourner ces coups, même si tu dois en demeurer un peu endolorie.

     III° Le Couronnement d’épines

Si tu es supérieure, inspire beaucoup de fidélité à la pensée de ma divine présence, surtout en enseignant aux âmes à enlever les épines de ma tête et à panser ses plaies avec soin et amour. Cela pourra se faire en retranchant à l’esprit toute pensée mauvaise pour en substituer de bonnes ; par exemple, si ce sont des pensées contre la charité, chercher à se rappeler quelque vertu de la personne, et même si c’est un prochain que l’on connaît peu, me donner encore la consolation de le juger favorablement ; puis désirer que les autres se comportent de même que les autres se comportent de même. Cela me plaît beaucoup.

     IV° Le Portement de Croix

Porte avec amour le poids de la charge, de l’office que l’obéissance t’a assigné, même quand ce poids t’écrase le plus. Et, lorsqu’il te semble être au moment de fléchir sous ta croix, souviens-toi que l’amour, après mes chutes, m’a porté à e relever afin de poursuivre le chemin. Je ne suis pas mort sous une chute ; je ne suis pas mort à mis-chemin, mais sur la cime du Calvaire. Cheminer toujours, cheminer à quelque prix que ce soi ; se relever et cheminer nonobstant les chutes de la fragilité, voilà ce qui console mon Cœur.

     V° Le Crucifiement

Tu m’imiteras si l’amour te tiens lieu des clous, de la lance, des épines et des fouets ; s’il opère en toi ce que ces instruments de supplice ont fait su mon corps. Il faut qu ce soit l’amour qui supplée aux tyrans et qui fasse passer l’âme par un martyre non moins douloureux.

C) MYSTERES GLORIEUX

     I° La Résurrection

Ressuscite avec moi après l’absolution sacramentelle et, d’une façon spéciale, après ta retraite annuelle. Dédie-toi à une vie nouvelle, c’est-à-dire à une vie ressuscitée quant à l’esprit. Cela te deviendra beaucoup plus facile, si tu tends avec joie à une continuelle présence de Dieu, à une présence amoureuse, confiante, intéressée parce que nécessiteuse, te faisant recourir à moi qui te suis toujours présent.

     II° L’Ascension

Tu t’élèveras vers le ciel toutes les fois que, dans le recueillement, tu penseras avec joie à la belle place que mon amour t’y a préparée et que tu embellis tous les jours. Quant à l’ascension mystique de l’âme par la contemplation, c’est une faveur toute gratuite qui n’est pas accordée à tous, mais seulement " Quibus datum est : à ceux à qui il a été donné… " Pour toi, sois attentive à monter vers un autre ciel dont tu peux jouir, même en communauté, le ciel de la vie intérieure.

     III° La descente du Saint-Esprit

Tu te disposes à recevoir le Saint-Esprit toutes les fois que tu t’abaisses humilies, parce que le Saint-Esprit se précipite vers l’âme humble. Quand se présentera l’occasion d’enseigner aux autres cette pratique, tu les disposeras à recevoir le Saint-Esprit.

     IV° L’Assomption de Notre-Dame

Multiplie les souhaits enflammés du paradis ; plus tu le désireras avec ardeur, et plus vite je me rendrais à tes vœux.

     V° Le Couronnement de ma Mère au Paradis

Récite avec ferveur le Saint-Rosaire. Si tu n’as pas l’attrait de prier beaucoup vocalement, ne te trouble pas, dis alors un simple Ave Maria. La très sainte Vierge aime les âmes qui choisissent à mes pieds la part de Marie, plus que celles qui se font la part de Marthe. Bien qu’elle les aime toutes, elle préfère cependant les premières parce qu’elles l’imitent davantage en me tenant compagnie.


[1] On appelle défi dans les monastères de la Visitation un petit travail spirituel donné à la communauté et que les religieuses sont comme provoquées à réaliser dans une sainte émulation. Note de la traduction.

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