Les renseignements utilisés
ici par mon pauvre talent de narrateur sont empruntés
aux
relations fidèles des témoins dont j’ai donné plus haut les noms et la
biographie. J’ai trouvé leur témoignage dans des écrits, que j’ai encore
auprès de moi, ou je l’ai recueilli dans des entretiens de vive voix,
dont ma mémoire a jusqu’ici gardé le souvenir.
Notre bienheureuse vierge,
voyant et comprenant, peut-être à la suite d’une révélation particulière
que l’heure de sa mort approchait, fit appeler autour d’elle toute la
famille qui l’avait suivie, c’est-à-dire tous les enfants spirituels que
le Seigneur lui avait donnés, et leur adressa à tous, en général, un
long et remarquable discours, pour les exhorter à progresser dans la
vertu. Elle y développa en particulier certains points plus importants
que j’ai trouvés notés dans les écrits des témoins précités et qui
méritent que nous ne les passions pas sous silence.
Son enseignement premier et
fondamental fut que celui qui entre au service de Dieu doit
nécessairement s’il veut vraiment posséder Dieu, arracher de son coeur
toute affection sensible non seulement pour les personnes, mais pour
n’importe quelle créature, et tendre à son divin Créateur, dans la
simplicité d’un amour sans partage. Car, ainsi qu’elle le disait, le
coeur ne peut se donner totalement à Dieu, s’il n’est libre de tout
autre amour et s’il ne s’ouvre dans une franchise qui exclut toute
réserve. Elle affirmait que ce dépouillement avait été, depuis son
enfance, l’objet principal de ses efforts et de son application. Elle
dit aussi avoir reconnu qu’on ne pouvait sans l’oraison arriver à cet
état où l’âme donne tout son cœur à Dieu. Elle assurait qu’il est de
toute nécessité que l’oraison soit fondée sur l’humilité. Celui qui prie
doit bien se garder de se confier en sa propre vertu, mais reconnaître
au contraire que, de lui-même, il n’est rien. Elle ajoutait qu’elle
s’était toujours efforcée de s’appliquer avec grand soin à l’oraison,
afin d’acquérir l’habitude de prier continuellement car elle voyait bien
que les vertus puisent dans l’oraison leur augmentation et leur vigueur,
tandis que, sans ce secours, elles s’affaiblissent et disparaissent.
Elle pressait donc vivement ceux et celles à qui elle parlait de faire
tous leurs efforts pour persévérer dans la prière, qu’elle distinguait
en prière vocale et mentale. Elle leur enseignait qu’ils devaient avoir
certaines heures déterminées pour la prière vocale, mais que leur prière
mentale actuelle on habituelle devait être continuelle.
Elle dit aussi qu’à la
lumière d’une foi vive elle avait vu et compris dans son esprit que tout
ce qui lui arrivait ou arrivait aux .autres venait de Dieu, qui
n’agissait jamais par haine, mais toujours dans un grand amour de ses
créatures. C’est dans cette pensée qu’elle conçut et trouva cette
obéissance amoureuse et prompte aux volontés du Seigneur et aux ordres
de ses supérieurs, ordres qu’elle considérait toujours comme lui venant
de Dieu pour les besoins de son salut ou l’augmentation des vertus dans
son âme. Elle affirma encore que, pour acquérir la pureté de l’esprit,
l’homme doit se garder de tout jugement vis-à-vis du prochain et de tout
commentaire inutile sur les actes de ses frères. En toute créature, nous
ne .devons considérer que la volonté de Dieu. Aussi recommandait-elle
avec beaucoup d’instance de ne juger aucune créature et pour aucun
motif, c’est-à-dire de ne jamais mépriser ou condamner personne par
manière de jugement, même ceux qu’on voit pécher. En face d’un acte qui
est évidemment coupable, on doit compatir an pécheur, répandre des
prières pour lui devant le Seigneur, mais non pas avoir pour ce
malheureux du dédain ou un jugement de mépris.
Elle déclara qu’elle avait
toujours eu et mis dans la divine Providence sa plus ferme espérance et
sa plus entière confiance. Elle invitait tout le monde à cette même
confiance et racontait comment elle avait découvert et reconnu que la
puissance et l’efficacité de cette Providence dépassaient de beaucoup ce
que nous pouvions imaginer. Elle disait alors à ses enfants spirituels
qu’eux-mêmes l’avaient expérimenté avec elle, quand le Seigneur avait si
merveilleusement pourvu à leurs besoins. Elle ajoutait que jamais la
divine Providence n’abandonne ceux qui se confient à ses soins, mais
qu’elle a pour eux des attentions particulières.
Après ces salutaires
exhortations et d’autres encore, notre vierge conclut son discours par
le précepte du Sauveur. Elle supplia humblement et instamment ses
enfants de s’aimer les uns les autres. Elle leur disait avec une douce
ferveur, et leur répéta plusieurs fois: " Aimez-vous les uns les autres,
mes très chers enfants, aimez-vous. " Ils devaient montrer qu’ils
avaient été et voulaient être ses fils spirituels par la charité qu’ils
auraient les uns pour les autres. C’était à cette condition qu’elle se
considérait comme leur mère, et les accepterait pour enfants. Elle
disait en outre, qu’en s’aimant ainsi mutuellement, ils seraient sa
gloire et sa couronne; elle les traiterait alors toujours comme ses
fils, et prierait la divine Bonté de répandre dans leurs âmes une
abondance de grâce pareille à celle que son âme à elle avait reçue de
cette même Bonté.
Usant en quelque sorte de
l’autorité que lui donnait sa charité, elle leur commanda d’offrir
continuellement au Seigneur, dans une humble et dévote prière, d’ardents
désirs pour la réforme et le bon état de la sainte Église de Dieu et
pour le Vicaire du Christ. Elle affirmait qu’elle-même avait porté ce
même désir en son cœur pendant toute sa vie, mais plus particulièrement
depuis ces sept dernières années, pendant lesquelles elle n’avait pas
cessé un instant de présenter cette demande à la Majesté et à la Bonté
divines. Elle avoua sans détour que, pour obtenir ce qu’elle demandait
ainsi, elle avait supporté dans son corps beaucoup de peines et
d’infirmités, et qu’au moment même où elle parlait ainsi elle souffrait
pour cette même cause de très cruels tourments. Elle ajouta que Satan,
ayant autrefois reçu de Dieu la permission d’accabler le corps de Job
d’infirmités et de souffrances, semblait avoir de même reçu du Seigneur
la liberté de tourmenter et d’affliger son corps à elle par des tortures
si nombreuses et si variées que de la plante des pieds à la tête, on ne
voyait plus sur ce corps aucune partie saine. Chaque membre avait son
supplice spécial et parfois même souffrait de plusieurs douleurs en même
temps. Toutes les personnes présentes s’en fussent parfaitement rendu
compte, alors même que la sainte n’en eût pas parlé. Elle dit enfin "Il
me semble évident, mes très chers, que mon Époux bien-aimé a tout
disposé et voulu pour qu’après les peines reçues de sa bonté mon âme,
emportée dans l’élan et l’ardeur de son désir, soit arrachée à sa
ténébreuse prison et retourne à son principe. "
Les témoins que j’ai cités
plus haut racontent ici, dans leurs écrits, que les souffrances de
Catherine leur paraissent à ce moment effrayantes et insupportables pour
quiconque n’eût pas eu le secours d’une grande grâce de Dieu. Ils
admiraient comment la sainte les endurait avec calme, sans aucun signe
de tristesse. Pendant qu’ils s’étonnaient ainsi et versaient des larmes
de douleur, la sainte continua: " Mes enfants bien-aimés, ne vous
affligez pas de mon trépas, mais réjouissez-vous plutôt avec moi, et
félicitez-moi de ce que j’abandonne ce lieu de douleurs pour aller me
reposer dans cet océan de paix qu’est le Dieu éternel. Je vous affirme
et vous promets que je vous serai plus utile après ma mort que je ne
l’ai jamais été ou pu l’être en cette vie ténébreuse et pleine de
misères. Cependant je remets nia vie, ma mort, je m’abandonne tout
entière aux mains de mon éternel Époux; s’il voit que cela puisse être
utile à quelque créature et qu’il veuille me laisser encore peiner et
souffrir, je suis prête à souffrir, cent fois le jour si c’était
possible, la mort et la torture, pour l’honneur de son Nom et le salut
du prochain. Mais, s’il lui plaît que je m’en aille maintenant, sachez,
mes très chers fils, que j’ai donné ma vie pour la sainte Église, ce que
j’attribue à une grâce toute particulière du Seigneur.
Après cela, elle appela ses
disciples les uns après les autres et leur indiqua le genre de vie
qu’ils devaient particulièrement embrasser après sa mort. Elle voulut
que tout me fût soumis et qu’on eût recours à moi, comme à elle. Elle
recommanda à certains de ses enfants la vie religieuse, à d’autres la
vie érémitique, à quelques-uns l’entrée dans la cléricature. Elle mit
Alexia à la tête des femmes, de celles en particulier qui étaient Soeurs
de la Pénitence du bienheureux Dominique. C’est l’Esprit-Saint qui lui
inspira toutes ces dispositions particulières, car la suite montra
qu’elles furent toutes salutaires aux âmes. Elle demanda ensuite pardon
à tous en disant : " Mes bien-aimés, j’ai toujours eu le désir et une
vraie soif de votre salut, je n’ose pas le nier, et cependant je. sais
néanmoins que j’ai bien souvent manqué à mes devoirs envers vous. Je
n’ai pas été pour vous, par mes exemples, cette lumière spirituelle, ce
modèle de vertu et de bonnes œuvres que j’aurais dû et pu être, si
j’avais été la vraie servante et parfaite épouse de Jésus-Christ. Je
n’ai pas eu non plus autant de soin et de souci que j’aurais dû en avoir
pour vos nécessités corporelles. C’est pourquoi je vous demande à tous
en général et à chacun en particulier pardon et indulgence. Je vous en
prie humblement et instamment, et j’y exhorte encore une fois chacun de
vous, suivez jusqu’à la fin la voie et les sentiers de la vertu. En
agissant ainsi, vous serez, comme je vous l’ai dit tout à l’heure, ma
joie et ma couronne. "C’est sur ces paroles qu’elle finit son discours".
Ayant ensuite appelé son
confesseur, elle fit sa confession générale, comme elle la faisait
d’ailleurs tous les jours, j’en suis certain, et demanda humblement
qu’on lui apportât à l’heure et avec la solennité qui convenaient le
très doux sacrement de la sainte Eucharistie et les autres sacrements
des malades. Elle obtint tout ce qu’elle désirait et demanda qu’on lui
accordât l’indulgence plénière, en la forme où elle lui avait été
gracieusement concédée par tes deux papes Grégoire XI et Urbain VI.
C’est alors que l’agonie commença, et que la sainte engagea avec
l’antique ennemi une dernière lutte que les assistants purent suivre aux
mouvements et aux paroles de la mourante. Tantôt elle se taisait, tantôt
elle répondait, puis elle souriait comme si elle se fût moquée de ce
qu’elle entendait ou bien encore elle s’enflammait de colère. Voici en
particulier un détail qui, par une permission de Dieu, les a tout
spécialement frappés et qu’ils m’ont signalé. Après avoir un instant
gardé le silence comme si elle eût écouté quelque accusation portée
contre elle, Catherine répondit d’un air joyeux: " La vaine gloire?
jamais. La vraie gloire et la louange du Seigneur? assurément. " La
divine Providence avait bien ses raisons pour nous faire entendre ces
paroles. Beaucoup d’hommes entendus en matière de spiritualité, et même
des femmes, en voyant l’affable charité de la sainte et les grâces
extraordinaires que Dieu lui accordait, pensaient qu’elle du moins y
prenait plaisir et que, pour ce motif, elle trouvait un certain charme à
vivre au milieu du monde. Plusieurs, en me parlant d’elle, m’ont dit
quelquefois à moi-même : " Pourquoi cette vagabonde court-elle ainsi?
Elle est femme. Pourquoi ne reste-t-elle pas dans sa cellule si elle
veut servir Dieu? " Cette accusation trouve une réponse suffisante dans
les dernières paroles de notre sainte, si on veut bien les considérer
attentivement. " La vaine gloire? jamais; la louange et la vraie gloire
de Dieu? assurément. " C’était dire ouvertement : " Ce n’est pas à cause
de la vaine gloire que je courais les chemins on faisais n’importe
laquelle de mes oeuvres, mais tout était à la louange et à l’honneur du
Nom du Sauveur. " Et j’en puis fournir un sûr témoignage, moi qui ai
entendu Si souvent ses confessions générales ou particulières et qui ai
examiné avec soin tous ses actes.
Elle agissait toujours sur
l’ordre exprès et sous l’inspiration de Dieu. Non seulement elle n’avait
pas souci des louanges humaines, mais elle ne pensait pas même aux
hommes, si ce n’est quand elle priait pour leur salut ou y travaillait.
Tous ceux qui n’ont pas vu de près cette âme ne peuvent croire à quel
degré elle était exempte de toute passion humaine, même de celles qu’on
trouve habituellement chez les personnes de vertu commune. On voyait se
réaliser en elle cette parole de l’Apôtre: " Notre conversation est dans
les cieux (Phil 3,20) " Rien ne pouvait l’arracher un seul instant à ses
aspirations où affaiblir l’ardeur de sa charité. Le vent de la vaine
gloire, pas plus qu’aucun autre mouvement déraisonnable, ne pouvait
trouver place en cette âme.
Mais revenons-en à ce que
nous disions. Catherine, après une longue lutte, obtint enfin la
victoire, revint à elle et fit à nouveau cette confession générale,
qu’on fait ordinairement publiquement ( En récitant la prière du
Confiteor) Elle demanda, pour plus d’assurance, une nouvelle
absolution et le renouvellement de l’indulgence plénière, suivant en
cela, je pense, l’enseignement et l’exemple des Martin, des Jérôme et
des Augustin. Tous ces saints ont montré aux fidèles, par leurs paroles
et par leurs actes, que nul chrétien, si haute que soit sa vertu, ne
doit quitter cette vie sans les larmes de la pénitence et sans une
profonde contrition des fautes qu’il a commises. C’est ainsi que nous
voyons Augustin, dans sa dernière maladie, faisant écrire sur le mur, en
face de son lit, les sept psaumes de la Pénitence, qu’il lisait
continuellement, en versant d’abondantes larmes. Jérôme, à ses derniers
moments, confessait publiquement ses défauts et ses péchés. Martin,
agonisant, enseigna à ses disciples, par sa parole et sa conduite, qu’un
chrétien doit mourir avec le cilice et sur la cendre, pour témoigner de
ses sentiments d’humble pénitence. Désireuse de les imiter, notre sainte
donna tous les signes d’une grande pénitence intérieure, et demanda
humblement et à plusieurs reprises l’absolution de ses péchés et la
remise des peines qu’ils avaient méritées.
Puis les forces de son corps
commencèrent à l’abandonner, ainsi que me l’ont rapporté les personnes
présentes. Mais Catherine ne pouvait s’empêcher de continuer à donner de
saints avertissements à ses fils en Notre-Seigneur, non seulement à ceux
qui étaient là, mais aussi aux absents. Car à ce dernier moment,
m’ont-ils raconté, elle se souvint de moi et leur dit : "Ayez recours à
Frère Raymond dans vos doutes et vos nécessités; dites-lui qu’il n’aie
ni découragement, ni crainte, quels que soient les événements dont il
soit le témoin. Je serai avec lui, je le délivrerai toujours de tout
péril. Et quand il ne fera pas ce qu’il doit, je saurai le reprendre,
pour qu’il se corrige et s’amende." On m’a assuré, qu’elle a très
souvent répété ces paroles et qu’elle les a redites, tant qu’elle a eu
la force d’articuler un son. Quand elle vit que l’heure était venue de
sortir de ce monde, elle dit encore : " Seigneur, je remets mon âme
entre vos mains a, puis cette sainte âme, délivrée de sa chair ainsi
qu’elle le désirait depuis si longtemps, alla enfin rejoindre, dans une
inséparable, et éternelle union, l’Éoonx qu’elle avait aimé d’amour si
ineffable. C’était en l’an du Seigneur 1380, le 29 avril, un dimanche,
vers l’heure de Tierce. A cette heure j’étais à Gênes. Il me sembla que
l’esprit de notre sainte me disait toutes les paroles que je viens de
rapporter, et qu’elle avait ordonné de me redire j’en prends à témoin la
Vérité première, qui ne trompe pas et n’est pas trompée. Mais mon esprit
aveuglé ne comprit pas alors d’où venaient ces paroles, que j’entendis
cependant distinctement et dont je saisis parfaitement le sens.
J’étais donc à Gênes, où
j’exerçais la charge de Provincial conformément aux lois de mon Ordre.
Le temps approchait où devait se tenir, à Bologne, le Chapitre pour
l’élection d’un nouveau Maître Général. Je me préparais à quitter Gênes,
avec quelques autres religieux et Maîtres en théologie. Nous avions
l’intention d’aller par mer jusqu’à Pise, et de nous rendre de là à
Bologne, à la garde de Dieu. C’est d’ailleurs ce que nous avons fait.
Nous avions loué pour ce voyage une barque, et nous attendions, pour
mettre à la voile, un temps favorable, car celui qu’il faisait à ce
moment n’était pas ce que nous désirions. Le matin même de la mort de
Catherine, je descendais à l’église où les Frères célébraient ce jour-là
la fête du bienheureux Pierre martyr. Malgré mon indignité, je dis une
messe basse, puis je remontai au dormitorium (corridor sur
lequel donnent les portes des cellules des religieux) y préparer mon
petit paquet de voyage. En passant devant l’image de la glorieuse Vierge
( Il doit y avoir une image de la Vierge dans chaque dormitorium),
je dis à voix basse la Salutation Angélique, comme le font
habituellement les religieux, et je m’arrêtai par hasard un instant.
C’est alors que j’entendis une voix, qui ne résonnait pas dans l’air, et
prononçait, non pas à l’oreille de mon corps, mais à celle de mon âme,
des mots dont je comprenais mieux le sens que s’ils m’eussent été
apportés par quelque son extérieur. Je ne saurais autrement décrire
cette voix, si toutefois on peut l’appeler voix puisqu’elle n’avait pas
de résonance au dehors. Quoi qu’il en soit, cette voix faisait entendre
distinctement à mon âme les paroles suivantes : "Sois sans crainte; je
suis ici pour toi; je suis au ciel pour toi. Je te protégerai, je te
défendrai; sois tranquille, ne crains rien; je me tiens ici pour toi".
Ces paroles intérieures me troublèrent profondément, et je me demandai
ce que voulaient dire ces consolations et cette promesse de sécurité. Je
ne pouvais à ce moment les attribuer qu’à Marie la Mère de Dieu, que je
saluais, mais en considérant mon indignité, je n’osais m’arrêter à cette
supposition. Je pensais être menacé de quelque grand malheur, et je
priais en conséquence la Mère de miséricorde, qui console habituellement
toujours les affligés, de faire en sorte q ne cette rassurante promesse
me rendît plus prudent et mieux disposé à souffrir avec calme tout ce
qui m’arriverait. Comme j’avais prêché en ville la croisade contre les
schismatiques, je soupçonnais la possibilité d’une rencontre en mer avec
leurs partisans, qui nous maltraiteraient peut-être, moi et les miens.
Toutes ces imaginations m’empêchèrent de pénétrer le mystère de cette
intervention du Seigneur très miséricordieux, envoyant l’esprit de son
épouse secourir la faiblesse de ma pusillanimité, faiblesse bien connue
de la sainte, mais bien mieux connue encore du Seigneur, son Époux.
Aussi ce récit me semble-t-il être pour moi, sujet de honte plutôt que
de vanité, voilà pourquoi je l’écris en pleine sécurité, craignant
seulement que, pour m’éviter un peu de confusion, je ne taise la gloire
de l’Époux et de l’épouse, dont les bienfaits m’ont si bénignement
réconforté.
D’ailleurs, pour ne pas vous
laisser croire que je suis le seul absent, qui ait appris par révélation
la mort de la sainte, je dois vous raconter une vision, qu’eut une dame
romaine, à l’heure même où Catherine mourait. C’est cette même dame qui
me l’a rapportée, avec grande dévotion et en m’en certifiant l’absolue
vérité. Et ce n’est pas à la légère et sans informations, que j’ai
accepté son témoignage. Je connaissais déjà depuis près de vingt ans sa
conscience et sa vie, quand ces faits sont arrivés, car elle s’adressait
ordinairement à moi pour la confession et me consultait dans tous ses
doutes. Aussi suis-je absolument sûr du récit que j’écris.
Il y avait donc à Rome, au
temps où notre vierge y mourut, une dame qui avait
cinq
fils et s’appelait Semia. Elle appartenait à une famille, qui n’était ni
du vulgaire, ni de la noblesse, mais avait une nombreuse parenté dans la
bourgeoisie de la ville. Dès avant la, mort de son mari, et plus
parfaitement encore depuis, Semia s’était consacrée au service du
Très-Haut. Elle faisait des pèlerinages et des visites aux églises de
Rome. Elle s’était pour ainsi dire donnée tout entière à la prière, et
persévéra longtemps dans ce genre de vie. Elle avait l’habitude de se
lever en tout temps la nuit pour prier, puis elle sommeillait un
instant, la .tête appuyée sur son lit, afin de trouver dans ce repos,
les forces suffisantes, pour les fatigues de ses pieuses pérégrinations.
Quand notre sainte vint à Home, cette dame, informée déjà par moi-même
et par d’autres encore, de l’excellence des vertus de Catherine, lui
rendit aussitôt visite, et goûta si fort le charme de sa compagnie,
qu’elle nous avouait ensuite que la vierge était deux fois plus parfaite
que nous ne le lui avions dit. Elle entra dans la familiarité de
Catherine, et la revit souvent depuis. Mais ses pèlerinages quotidiens
et le soin de ses cinq fils l’obligeaient à passer quelquefois plusieurs
jours, sans voir sa sainte amie, et c est ainsi qu’elle ignora la
gravité de la maladie de notre vierge.
Dans la nuit qui précéda le
matin, où notre bienheureuse quitta son corps, dame Semia s’était donc
levée comme d’habitude, pour prier. Son oraison finie, aux premières
lueurs de l’aurore, elle pensa que ce jour-là, qui était un dimanche, il
lui fallait se lever plus tôt qu’à l’ordinaire pour assister à la
grand’messe, et pouvoir cependant préparer elle-même le repas de ses
enfants, car elle n’avait f as d’aide à ce moment à la maison. Elle ne
fit donc qu’appuyer sa tête sur l’oreiller, avec l’intention de ne
sommeiller qu’un instant et de se lever de bonne heure ; aussi, comme
cela arrive toujours quand on a l’esprit soucieux, pensait-elle tout en
dormant, à sa résolution de secouer promptement le sommeil. Pendant
qu’elle se disait en cet état de somnolence : "Il faut te lever de bonne
heure pour préparer le repas et arriver à temps à l’églîse ", elle vit
un bel enfant, qui paraissait avoir de huit à dix ans, et qui lui dit :
" Je ne veux pas que tu t’éveilles et que tu te lèves sitôt, avant
d’avoir vu ce que je veux te montrer. " Semia prenait grand plaisir à
contempler cet enfant; mais, toujours en souci de la messe, elle
répondait : " Laissez-moi me lever, mon bon enfant, car je ne puis
manquer aujourd’hui la grand’messe. " . " Je ne veux pas absolument que
tu te lèves ", répartit l’enfant avant que tu n’aies vu les merveilles
que je veux te montrer de la part de Dieu, et il parut la tirer par ses
habits et la conduire en un lieu large et spacieux, où elle vit une
forme d’oratoire ou d’église et, dans le choeur de cet oratoire, un
tabernacle d’argent très beau, mais fermé. L’enfant lui dit alors:
"Attends un peu et tu verras ce qu’il y a dans ce tabernacle. "
Elle vit apparaître aussitôt
un autre enfant, semblable au premier; il appliqua une échelle contre le
tabernacle d’argent qui était situé à une certaine hauteur, et, montant
à cette échelle, ouvrit avec une clef d’or la porte du tabernacle. Quand
cette porte fut ouverte, Semia vit une jeune fille, parée avec une
magnificence et un éclat incomparables. Son vêtement était
resplendissant de blancheur et orné de bijoux.
Sur sa tête étaient trois
couronnes, si bien agencées ensemble qu’on les voyait les trois tout
entières. Celle de dessous était d’argent et blanche comme neige; la
seconde était d’argent mêlé d’or, et rouge par endroits comme les
étoffes rouges à brocarts d’or. La troisième était d’or pur, mais tout
incrustée et ornée de perles et de pierres précieuses. A ce spectacle,
la pieuse dame se demanda quelle était cette jeune fille si brillamment
parée; après l’avoir bien regardé, elle reconnut parfaitement dans ce
visage les traits de la Vierge Catherine de Sienne ; mais, comme elle
savait Catherine beaucoup plus âgée que la vision ne l’indiquait, elle
crut qu’il s’agissait d’une autre personne. L’enfant, qui lui était
apparu le premier, lui demanda alors si elle reconnaissait cette jeune
fille. Cette figure est bien la figure de Catherine de Sienne, répondit
la voyante, mais ce n’est pas son âge ", et elle continua longtemps
encore de regarder, toujours hésitante. L’apparition sourit alors et dit
aux enfants: " Vous voyez bien qu’elle ne me reconnaît pas. " A ce
moment, apparurent quatre autres enfants semblables aux premiers, avec
une chaise à porteurs, disposée en forme de lit nuptial et drapée
d’étoffes précieuses, couleur de pourpre. Ils la déposèrent près du
tabernacle, montèrent avec agilité jusqu’en haut et voulurent prendre
dans leurs bras la jeune fille couronnée pour la placer sur le lit.
Celle-ci leur dit alors " Laissez-moi tout d’abord aller à celle qui me
voit maintenant, sans me reconnaître. " Et, sur cette parole, elle
s’approcha, comme en volant, de Semia et lui dit: " Semia, tu ne me
reconnais pas? Je suis Catherine de Sienne comme te l’indique mon
visage. ". " Etes-vous donc Catherine, ma Mère spirituelle, répondit
Semia. — Oui, je le suis, rappelle-toi bien ce que tu as vu et ce que tu
vas voir. " Après avoir prononcé ces dernières paroles, la jeune fille
fut ramenée parles six enfants, placée sur le lit, et emportée aussitôt
vers les cieux. Pendant que Semia la regardait monter, un trône apparut
dans le ciel, et sur ce trône était assis un roi, portant une couronne
de pierreries et tenant à la main droite un livre ouvert. Les enfants
élevèrent la vierge et son lit de parade jusqu’aux marches du trône et
aux pieds de Celui qui y était assis. C’est là qu’ils déposèrent leur
précieux fardeau. La jeune vierge se prosterna aux pieds du roi, pour
l’adorer, puis le roi lui dit: " Sois la bienvenue, mon épouse
bien-aimée et ma fille Catherine. " Ensuite, sur l’ordre du roi, la
vierge releva la tête et lut dans le livre ouvert, pendant le temps
qu’on met à réciter pieusement une fois l’Oraison Dominicale. Enfin elle
se leva, toujours sur l’ordre du roi, et se tint debout près du trône
pour attendre la reine, qui paraissait venir vers le roi, en amenant
avec elle une grande troupe de vierges. Quand la reine se fut approchée,
la nouvelle bienheureuse se hâta de descendre du degré où elle se
trouvait, fléchit les genoux et adora la Souveraine des cieux, qui
l’accueillit en lui tendant les bras et lui dit: " Sois la bienvenue,
Catherine, ma fille bien-aimée. Puis, la relevant, elle l’admit au
baiser de paix. Après quoi, Catherine, ayant adoré une seconde fois
l’impératrice du ciel, en reçut l’ordre de se joindre aux autres
vierges, qui la reçurent avec grande joie, et lui donnèrent aussi le
baiser de paix.
En contemplant toute cette
vision, Semia s’écriait à haute voix: " O Notre-Dame ! O Mère de
Notre-Seigneur Jésus-Christ! intercédez pour nous! " et encore: "
O bienheureuse Marie-Madeleine, ô bienheureuse Catherine! ô bienheureuse
Agnès ! ô bienheureuse Marguerite, priez pour nous! " Elle m’a en effet
affirmé que cette scène lui paraissait bien se passer au ciel. Elle on
suivait tous les détails, comme si elle se fût trouvée au pied de
quelques degrés, qui seuls l’eussent séparée du lieu élevé où se tenait
l’apparition. Elle ajoutait avoir très bien reconnu et distingué non
seulement la bienheureuse Mère de Dieu, mais toutes les autres saintes
et chacune d’elles en particulier. Elle les appelait toutes par leurs
noms, car toutes portaient le signe de leur martyre. Catherine avait une
roue, Marguerite un dragon à ses pieds, Agathe montrait son sein
déchiré, et ainsi des autres. Finalement, Catherine fut placée au milieu
de ces vierges qui, toutes, la félicitaient, et couronnée dans la
gloire, comme nous l’avons dit.
A ce moment dame Semia
s’éveilla, et, secouant le sommeil, elle ouvrit les yeux et s’aperçut
que le soleil était déjà bien haut. On était à peu près à l’heure de
Tierce. Fort affligée de ce retard, tant à cause de la messe qu’à cause
du repas qu’elle avait à préparer pour ses fils, elle se mit à chercher
en son esprit la signification de cette vision extraordinaire. Elle ne
savait pas et ne croyait pas que notre sainte fût morte, bien qu’elle la
sût malade, car, occupée depuis plusieurs jours à d’autres affaires,
elle n’avait pu rendre visite à Catherine, qui, d’ailleurs, se
guérissait habituellement des plus graves maladies. Semia crut donc
plutôt qu’au moment de cette vision la sainte avait eu, de son côté,
quelques-uns de ces ravissements qui lui étaient habituels et reçu du
Seigneur de grandes révélations. Mais en même temps le retard qui lui
faisait craindre de ne plus pouvoir trouver de messe ce Jour-là lui
donnait à soupçonner quelque ruse de l’ennemi qui l’aurait fait ainsi
manquer à la messe du dimanche et désobéir à la loi de l’Église. Elle se
hâta donc de mettre le pot-au-feu et de courir à l’église paroissiale,
se disant en son cœur : Si je suis privée de la messe, ce me sera un
signe que cette vision m’est venue de l’antique ennemi; mais si j’arrive
assez tôt, je dirai qu’il faut bien attribuer l’apparition aux mérites
de ma Mère Catherine. " Quand elle entra à l’église, l’évangile était
fini et on chantait déjà l’offertoire. Tout attristée, elle se dit
alors: "Malheureuse, j’ai été trompée par l’ennemi." Elle revint
aussitôt à la maison pour soigner un peu sa cuisine et chercher ensuite
dans d’autres églises si elle pourrait avoir une messe entière.
Pendant qu’elle était
occupée à la maison, elle entendit une cloche sonner la messe dans un
monastère de religieuses tout voisin. Elle en fut si joyeuse et se
pressa tellement de se rendre à cette église qu’elle oublia de mettre
dans la marmite les choux qu’elle avait préparés et lavés pour les faire
cuire. Elle ferma soigneusement sa porte à clef, et partit sans laisser
personne chez elle. Elle arriva à l’église du monastère au commencement
de la messe et se dit joyeusement à elle-même: " Satan ne m’a donc pas
trompée comme je le croyais. " Elle craignait bien encore un peu la
mauvaise humeur de ses fils, qui étaient déjà d’âge avancé, car elle
savait bien qu’il lui était cette fois impossible de préparer leur repas
pour l’heure voulue, Mais elle abandonna le tout au Seigneur, afin
d’avoir au moins la consolation d’assister à la messe. Elle pria
néanmoins le Sauveur de faire en sorte, s’il était l’auteur de la
vision, que ce retard ne mécontentât pas trop ses enfants dont elle
redoutait fort la sévérité, et elle entendit complètement la
grand’messe.
Comme elle revenait à la
maison après l’office, elle trouva sur le chemin ses fils qui, venant
au-devant d’elle, lui dirent : " Mère, l’heure est déjà avancée, faites
que nous puissions dîner. — Attendez un peu, mes fils bien-aimés, leur
dit-elle, tout sera prêt dans un instant. " Elle courut à la maison, la
trouva close comme elle l’avait laissée, et ouvrit la porte. Elle
pensait se hâter d’achever ce qui restait à faire, mais tout était fini.
Les choux étaient dans la marmite avec la viande, et le tout était cuit
à point, si bien qu’on pouvait se mettre à table immédiatement. Toute
surprise, elle reconnut de suite que le Seigneur l’avait
merveilleusement exaucée et se proposa d’aller aussitôt après-dîner en
parler à Catherine, qu’elle croyait encore en vie. Ses fils n’étaient
pas loin; elle les invita joyeusement à se mettre à table, et, pendant
qu’ils mangeaient, elle pensait toujours à cette admirable vision, que
deux grâces miraculeuses venaient de confirmer. Ses fils, qui ne
savaient rien , trouvaient le repas bien meilleur qu’à l’ordinaire; et
Semia, repassant en son cœur tout ce qu’elle voyait et avait vu, se
disait en elle-même, ainsi qu’elle me l’a tout particulièrement affirmé
: " O ma Mère bien-aimée, vous êtes entrée dans nia maison, les portes
fermées pour me faire nia cuisine. Je sais maintenant que vous êtes une
sainte une vraie servante du Christ. "
Cependant rien de tout cela
ne lui faisait encore soupçonner la mort de la sainte, et quand ses fils
se furent retirés après le repas, elle se rendit à la maison de la
vierge et frappa comme d’habitude à la porte. Personne ne lui répondit,
et les voisines lui dirent que Catherine était allée visiter les
sanctuaires et qu’il n’y avait personne à la maison. Elle le crut et
s’en alla. En réalité tous ceux qui étaient à l’intérieur se lamentaient
et pleuraient la Mère spirituelle, qui venait de les laisser orphelins
au milieu de ce siècle mauvais. Mais ils cachaient cette mort aux
autres, tant pour éviter le tumulte d’un rassemblement populaire que
pour prendre d’abord le conseil d’hommes discrets, au sujet de
l’organisation des funérailles. Quelques-uns seulement, et en petit
nombre, avaient été envoyés au dehors et, de l’extérieur, ils avaient
fermé la porte, comme s’il n’était resté personne à la maison. De cette
manière ils pouvaient, sans gêne aucune, soulager leur douleur en
pleurant, et délibérer plus tranquillement sur ce qu’il y avait à faire.
En dernier avis, ils décidèrent qu’on porterait le corps de la vierge à
l’église des Prêcheurs, vulgairement appelée Sainte-Marie-dela-Minerve
et qu’on y célébrerait les funérailles, autant que le Seigneur le
permettrait. Que dire encore? Ils usèrent de tous les moyens possibles
pour cacher la mort de Catherine, et firent secrètement toutes leurs
démarches; niais ils ne purent garder un tel secret que l’Époux de la
sainte ne trouvât moyen de les signaler davantage à l’attention du
public. Dès que le corps eut été porté à l’église, tout le peuple de la
ville le sut. Il y eut aussitôt affluence d’une immense multitude, qui
se pressait pour toucher les habits et les pieds de la sainte. Les
enfants spirituels de Catherine et les religieux du couvent craignirent
même que les vêtements et le corps de la bienheureuse ne fussent
déchirés et mis en morceaux par la foule, qui se pressait tout autour;
et ils placèrent le corps à l’intérieur des grilles de fer d’une
chapelle latérale dédiée au bienheureux Dominique. Nous dirons au
chapitre suivant ce qui en arriva.
Sur ces entrefaites, dame
Semia passa par hasard devant l’église et, voyant cette foule
tumultueuse, demanda la cause d’un tel rassemblement. On lui dit
aussitôt que Catherine de Sienne était morte, que son corps se trouvait
dans l’église, et que c’était là ce qui avait attiré une telle affluence
de peuple. Sur cette réponse, elle s’approcha aussitôt, tout en larmes,
du lieu où était déposé le saint corps, et dit aux filles spirituelles
de la sainte qui entouraient le cercueil
O femmes cruelles ! pourquoi
m’avez-vous caché la mort de ma très douce Mère ? pourquoi ne
m’avez-vous pas appelée à l’heure de son trépas? " Et comme elles
s’excusaient, Semia leur demanda : " Dites-moi à quel moment Catherine a
quitté son corps. " Elles répondirent : " C’est hier, vers l’heure de la
Tierce, qu’elle a rendu son âme à son Créateur." Semia, se déchirant le
visage avec ses ongles, s’écria: "Je l’ai vue, j’ai vu ma Mère
bien-aimée quitter son corps, je l’ai vue emportée au ciel par les
anges, couronnée de trois couronnes très précieuses, parée d’habits
blancs et resplendissants. Je sais maintenant que le Seigneur m’a envoyé
un ange et m’a montré l’heureuse fin de ma Mère, tout en me réservant
une messe jusqu’à une heure tardive. Bien plus, il m’a miraculeusement
aidé au service de la cuisine. O Mère! O Mère! Pourquoi n’ai-je pas
compris, à cette vision, que vous aviez quitté ce monde? Et elle raconta
tout ce qui lui était arrivé aux enfants spirituels de Catherine qui
entouraient et gardaient le saint corps. Mais terminons ici le présent
chapitre.