1 Quand bien même vous ne verriez d’autre avantage que
la confusion qu’éprouvera la sœur qui est en défaut en constatant que vous vous
laissez condamner injustement, ce serait énorme. Une chose de ce genre élève
parfois l’âme plus que dix sermons. Vous devez donc toutes vous efforcer de
prêcher par les oeuvres, puisque l’Apôtre et notre inhabileté nous empêchent de
le faire par la parole.
2 Ne vous imaginez jamais, bien que vous soyez
cloîtrées, que le mal ou le bien que vous ferez demeurera secret — je crois vous
l’avoir déjà dit une fois et je voudrais vous le redire maintes fois encore.
Croyez-vous donc, mes filles, que si vous ne vous disculpez pas, il n’y aura
personne pour prendre votre défense ? Voyez comment le Christ a pris la défense
de Madeleine quand sainte Marthe l’accusait. Quand ce sera nécessaire Sa Majesté
inspirera à quelqu’un l’idée d’élever la voix en votre faveur. J’ai une grande
expérience de ceci, mais je préférerais que vous n’y songiez pas, et que vous
vous réjouissiez plutôt de vous voir accusées. Je prends le temps à témoin du
profit que vous verrez dans votre âme, car il est grand. En premier lieu,
celle-ci commence à acquérir la liberté, et vous ne vous souciez pas plus qu’on
dise du mal de vous que du bien ; il vous semble même que vous n’êtes pas en
cause ; c’est comme si des personnes parlaient devant vous sans s’adresser à
vous ; vous ne vous préoccuperiez pas de leur répondre. Ainsi en est-il ici :
une fois que vous aurez pris l’habitude de ne pas répondre, il vous semblera que
ce n’est pas à vous que l’on parle. Ceci paraîtra impossible parce que nous
sommes susceptibles et peu mortifiées — et au début, c’est difficile- mais je
sais que peu à peu on peut arriver à cette liberté d’esprit, à cette abnégation
et à ce détachement de soi-même, avec la grâce de Dieu.
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