LA VOIE MYSTIQUE

adveniat regnum tuum

Teresa Musco

La crucifiée de Caserte

Notes biographiques

Chapitre II

Préparation à la Crucifixion

« Tu monteras au Calvaire avec Jésus »

Comme prélude à cette nouvelle étape de sa vie, Teresa reçut un jour — ce fut le 1er mai 1950 — de la part de la Madone, cet avertissement prémonitoire :

« Ma fille, tu auras beaucoup à souffrir : tu iras dans des hôpitaux, tu rencontreras des médecins, mais personne ne comprendra, ni ne saura déceler la maladie que le Père à mise en ton cœur… »

Il faut remarquer ici la première phrase du message : « Ma fille, tu auras beaucoup à souffrir » : elle ressemble beaucoup à celle prononcée par la Vierge du Rosaire à Fatima, sauf que là elle était au pluriel : « Vous aurez beaucoup à souffrir ».

La source étant la même ; les demandes étant, elles aussi, les mêmes, il était normal de constater ici ce rapprochement de Caiazzo et de la Cova da Iria.

L’ange Gabriel devint le messager régulier auprès de Teresa. En effet, déjà plusieurs fois nous l’avons vu venir porter non seulement des messages de la part de Jésus et Marie, mais aussi des sommes d’argent destinées aux besoins immédiats de la famille Musco.

Ce fut lui encore qu’au matin du 11 octobre 1950 se présenta à l’enfant — alors en prière — pour lui dire que Jésus souffrait beaucoup en voyant que tant d’hommes déversant sur Lui tant et tant de blasphèmes. La petite avoua à l’Ange que même son père était du nombre de ceux-là et lui demanda ce qu’elle devait faire, comment devait-elle se comporter face à ces mots qui déplaisent tant à Jésus ; L’ange Gabriel lui répondit :

« Il faut prier et tout offrir avec beaucoup d’amour ». Puis, il ajouta encore : « Tu monteras au Calvaire avec Jésus. Tu as déjà commencé à cheminer sur des voies bien épineuses. Mais la Maman du ciel est auprès de toi. Tu n’as pas à craindre. Tu devras souffrir sans rien dire, comme tu le fais déjà. Je te salue. Nous nous reverrons bientôt » (Journal, p. 842).

« Je suis Padre Pio »

Un peu plus tard, le 1er novembre 1950, une nouvelle étape fut franchie.

Teresa était à l’église pour entendre la sainte Messe et communier. Avant que celle-ci ne commence, un Prêtre, sorti de l’autel vint vers elle et lui dit :

« Ma fille, je te le recommande, prie pour le salut des âmes qui se trouvent au Purgatoire : personne ne prie pour elles »

La fillette, un peu étonnée, demande : « Qui êtes vous ? », à quoi le Prêtre répondit avec un « doux sourire » : « Je suis Padre Pio, c'est-à-dire Francesco. Jésus m’a dit de te dire de ne plus parler à personne de ce qui t’arrive. Un jour tu seras comme moi. Regarde… », et il lui fit voir les blessures de ses mains. Puis, il lui dit encore : « Courage, ma fille, aie foi… » Après cela, il la bénit et disparut. Aussitôt après la Messe commença.

Ce fut là une première approche, plutôt concrète de la crucifixion prochaine ; et qui, mieux que saint Pio de Pietrelcina pour la lui annoncer ou la lui faire comprendre, lui qui, cinquante années durant porta, inscrites dans sa chair, les saintes plaies du Sauveur ?

La fillette semble l’avoir compris, car depuis elle n’avait de cesse que de demander à Jésus de la « crucifier ».

Quelque temps après la visite du saint Capucin, Teresa nota dans son Journal : « Ce mois-ci j’ai beaucoup prié pour les âmes du Purgatoire. J’ai offert toutes mes souffrances, sans en épargner aucune » (Journal, p. 1238).

Mais, pourquoi ces souffrances ? Pourquoi Teresa qui est encore si jeune, souffre-t-elle ainsi ? Pourquoi lui promet-on d’autres souffrances dans un proche avenir ?

« Ces souffrances sont nécessaires — commente le père Stefano Manelli — parce que dans le monde beaucoup de péchés sont commis ».

La Vierge Marie confirmera Elle-même, le 31 juillet 1950, cet état de faits :

« Beaucoup d’hommes transpercent le Cœur blessé de mon Fils et s’ils ne prient pas, s’ils ne se repentent pas, Dieu enverra sur le monde un grand châtiment, une grande catastrophe ; Toi, prie et fait pénitence ».

Teresa écoutait, priait avec ferveur et acceptait humblement toutes ces consignes célestes ; se montrait toujours généreuse, restait sereine et toujours prête à tout.

Et, en effet, elle n’eut pas longtemps à attendre, car bientôt après les croix tombèrent nombreuses sur son corps menu et fragile. Ce furent des coliques très douloureuses, des accès de fièvre et spasmes lancinants, alors que ses genoux commencèrent à gonfler démesurément ce qui amena son médecin — il ne trouva aucun médicament capable de la guérir — décida de l’opérer.

Un an plus tard, la situation est encore bien plus critique encore : coliques, jambes gonflées, fièvre élevée, douleurs lancinantes, larmes, cris, plaintes … A ceci s’ajoutera encore une pleurite à l’épaule gauche…

Les choses allèrent ainsi, de mal en pire, avec plusieurs séjours à l’hôpital ; en tout 117 interventions qui ont « criblé » son jeune corps, laissant son corps couvert de blessures et de cicatrices.

Les stigmates

Le 1er août 1952 il arriva à Teresa de se sentir comme plongé dans un « profond sommeil » et de se trouver sur une route remplie d’épines où elle rencontra le Seigneur Crucifié qui lui dit : « Ma petite fille, veux-tu m’aider à sauver les âmes ? Veux-tu m’aider à porter cette Croix ? »

La réponse de la fillette fut courte mais ferme : « Oui ! »

Alors elle vit venir sur elle deux bourreaux qui la prirent, la couchèrent sur la croix et la clouèrent. A ce moment-là Teresa se réveilla épouvanté et constata étonnée que ses pieds, ses mains et sa poitrine étaient marqués de boursouflures qui lui faisaient très mal.

La fillette vécut cette expérience mystique non seulement avec une admirable simplicité, mais aussi avec stupeur. C’est qu’elle ne pense pas à elle-même, mais à son père et aux blasphèmes que cette situation pourrait déclancher chez lui. Alors quelques réflexions lui vinrent à l’esprit et elle se demanda pourquoi Jésus l’avait choisie, elle qui n’était autre chose qu’une nullité, une pauvre fille inculte. Mais, Jésus Lui-même vint dissiper cette réflexion et lui dit : « Ma fille, je me sers de la nullité ». Ce sont là les mêmes paroles que saint Paul adressa aux Corinthiens : « Ce qui dans le monde est sans naissance et ce que l'on méprise, voilà ce que Dieu a choisi » (1 Co 1, 28).

Les prêtres

Deux offrandes et réparations tiennent particulièrement à cœur à la Madone : les offrandes pour les prêtres et la réparation pour les péchés d’impureté qui conduisent tant d’âmes en enfer.

La Vierge Marie a un amour tout particulier pour les prêtres, ses « fils de prédilection »…

« Ma fille, dit-Elle un jour à Teresa, offre tout ce qui te plaît d’offrir pour les Prêtres, car… ils ne comprennent plus ce qu’est la volonté de Dieu ». Une autre fois Jésus Lui-même lui parle d’un « aliment écœurant » et d’un « aliment insipide » qui le dégoûte énormément. Qu’est-ce que cet aliment « écœurant » et « insipide » ? L’aliment « écœurant » ce sont les péchés d’impureté ; l’aliment « insipide » c’est tout ce qui se fait de mal.

Le 1er novembre 1952, alors qu’elle priait à l’église, Teresa vit une colonne en haut laquelle se trouvait le Père, soutenu par une chaîne en or. La colonne — symbole de l’Église — penche de temps en temps et la fillette entends que quelqu’un lui dit : « Veux-tu devenir la victime qui apportera un peu de soutien à cette colonne en ces temps si difficiles ? Écoutant une telle demande, Teresa ressentit des « frissons lui parcourir tout son corps », mais elle répondit sans hésiter : « Que ta volonté soit faite ! »

« Le 13 septembre 1951 — raconte le père Gabrielle Roschini — après avoir été traitée par son père non plus comme fille, mais somme « chienne », Teresina voit Jésus qui se présente à elle pour la consoler. Elle a une vision. « Ne pouvant pas le révéler — dit-elle — ce que je vois, je recommande seulement aux Prêtres d’être attentifs au moment de la consécration lors de la Messe, parce que Jésus est là en personne et prête ses mains, sa bouche, sa langue au Prêtre. Il est tout prêt d’eux et observe sa table et son ministère. Ceci est tout ce que je peux dire » (Journal p. 877). Peu de paroles, comme on peu le constater, mais ô combien effrayantes ! Que dire alors des Prêtres qui, au moment solennel de la Messe, récitent les paroles terribles de la consécration avec tant d’indifférence et tant de désinvolture, comme s’ils récitaient une quelconque faribole ?

Quelques semaines plus tard, le 30 septembre 1951, la Madone vint à son tour et lui dit :

« Teresa, ma fille, es-tu contente d’aider ton Père à porter la Croix ? »

La fillette, comme à son habitue donna à Marie une réponse affirmative, un “oui” du cœur, qui ne laissa à sa céleste Interlocutrice le moindre doute sur sa sincérité. Alors, la Madone lui fit cette suggestion :

« Tu devras toujours offrir tes souffrances jusque au terme de ta vie. J’ai mis sur tes épaules une grande et bien pesante croix. Je te bénis afin que tu ne t’impatientes plus. Et, quand tu la remettras à ton Père, tu la lui apporteras remplie de perles et de brillants et mon Fils te donnera de grandes récompenses. Il ne te refusera rien. De grandes menaces pèsent sur l’Italie, et vous seuls, les “paratonnerres”, par vos prières et vos sacrifices, parvenez à attendrir le Cœur de mon Fils et celui du Père ».

Aussitôt après, la Vierge Marie avertit les prêtres, les mettant devant leurs graves responsabilités vis-à-vis de ces “paratonnerres” si souvent décriés, dédaignées, méprisés et souvent persécutés :

« Vous, prêtres, ne poussez pas à la tentation du désespoir les âmes que Je choisis, car sinon pour vous ce sera le feu éternel. Beaucoup d’âmes se perdent à cause de vous. Pensez à votre devoir, sinon un jour vous pleurerez ; pensez à les encourager, et non point à les décourager » (Journal, pp. 360-362).

Le jour viendra…

Après la généreuse acceptation dont nous venons de parler, la croix de Teresa commença dès lors à peser, à faire sentir sur ses frêles épaules d’enfant, un poids que ne cessera plus d’augmenter, les années durant, mais ce poids ne sera jamais un frein, car la foi et l’ardeur de la fillette augmenteront eux aussi au four et à mesure que les épreuves augmentent.

De nouveau les « douleurs lancinantes », les « maux de tête accompagnés de grosses fièvre » firent leur apparition ; ses genoux gonflèrent au point que quelques fois elle ne parvenait même pas à rester debout. Et, malgré tout cela, Teresa souffrait en silence et offrait sans cesse tous ces « gros bobos » pour le salut des âmes.

Bien entendu, elle consulta les médecins, mais les médicaments n’eurent aucune emprise sur ces maladies « chroniques ». On lui prescrit des « calmants », mais ces calmants ne calmaient rien du tout… Et la fillette était bien loin de s’en soucier, car elle savait le “pourquoi” de ces maladies.

Un jour, pendant qu’elle faisait le ménage, la Vierge se présenta à elle et lui dit :

« Je sais que maintenant tout te paraît comme un rêve. Mais, quand le jour viendra, tu sauras que tout ce que je t’ai dit est la vérité. Ne pleure pas, ma fille, je serai toujours à tes côtés. Je veux que pendant tout ce temps [de préparation], tu souffres sans rien dire à personne. Tu dois souffrir en silence, sans parler » (Journal, pp. 363-364).

Le troisième « secret de Fatima »

Il n’y a pas que les souffrances physiques qui font mal ; les souffrances morales sont, quelquefois, bien plus douloureuses encore, même et peut-être surtout quand on est un enfant.

Être mis dans la confidence de certaines choses — ou secrets délicats — peut devenir une sorte de « calvaire intellectuel » très pesant et cause d’une souffrance morale très forte et très stressante. C’est ce qui arriva à Teresa, à qui la sainte Vierge confia une partie du fameux — et actuellement très controversé — troisième « secret de Fatima ».

C’était le 3 janvier 1952. La Madone apparut à Teresa et lui dit :

« Je veux te dire que le monde est perverti. Je suis apparue au Portugal où j’ai donné des messages, mais personne ne m’a écoutée ; Je suis apparue à Lourdes, à La Salette, mais bien peu de cœurs durs se sont adoucis. A toi-même je veux dire tant de choses qui affligent mon Cœur. Je veux te parler du troisième secret de Fatima. Je te recommande de ne pas avec les garçons comme toutes les autres ; Je veux que tu restes à la maison. Maintenant Je vais te parler du troisième secret que j’ai confié à Lucie, à Fatima. Je peux te dire qu’il a déjà été lu, mais personne n’en a parlé ».

« Alors la Madone — raconte le père Gabrielle Roschini — prédit à Teresa le voyage de Paul VI à Fatima, où il invitera tout le monde à la prière et à la pénitence et Elle confie encore que le Pape n’osera point parler du secret, parce que celui-ci est “épouvantable” ».

« Le monde — explique la Vierge Marie — courre vers une grande ruine… Le peuple se fourvoie de plus en plus… »

Et, comme pour bien marquer l’esprit de ses enfants, Marie nous mets en garde contre les châtiments qui peuvent tomber sur nous, si nous ne rebroussons pas chemin :

« Feu et fumée envelopperont le monde. L’eau des océans deviendra feu et vapeur. L’écume s’élèvera, couvrira l’Europe, et transformera tout en une lave de feu, et des millions d’hommes et d’enfants périront dans ce feu, et les rares qui en échapperont envieront ceux qui sont morts. Parce que, de quelque côté qu’ils regarderont, ils ne verront que sang, morts et ruines, dans le monde entier ».

Teresa n’avait alors que huit ans, quand elle reçut cette terrible confidence de la Madone. Comment a-t-elle réagi alors ?

Nous aimerions bien le savoir, mais de son Journal spirituel nous n’avons que des bribes, malheureusement, qui ne nous permettent pas de nous en faire une idée précise. Mais il est légitime de penser qu’une telle confidence laissa des traces sur son cœur d’enfant. Toutefois, il est aussi légitime également de penser que la Vierge Marie sait très bien ce qu’Elle fait et, si Elle a jugé bon de révéler à une enfant des choses aussi terribles, c’est que cette dernière était capable de les recevoir, même si, nous le pensons, vu son âge, elle n’en avait pas la même approche qu’un adulte.

Sainte et heureuse simplicité des enfants !

Autres messages eschatologiques

Bien que ce ne soit pas notre propos ici, nous allons transcrire quelques autres messages reçus par Teresa et qui ont, bien entendu, un caractère eschatologique évident.

Il n’est pas dans notre propos de les commenter, car toute argumentation apparaîtrait, nous le pensons vraiment, aux yeux de nos lecteurs, comme une spéculation vaniteuse, car ce serait essayer de scruter la pensée de Dieu qui seul connaît l’avenir ; un avenir que nos prières peuvent changer du tout au tout, tellement infinie est la miséricorde divine.

20 mai 1951

« Teresa, fille de mon cœur, je suis ici pour te confier des choses que tu devras garder pour toi seule, jusqu'à ce que je le souhaite. Tu verras beaucoup de changements dans l'église. Les chrétiens qui prient seront peu nombreux. Beaucoup d'âmes marchent vers l'enfer. Les femmes perdront la pudeur et la honte. Satanas prendra leur forme pour en faire tomber beaucoup. Dans le monde il y aura des crises communes. Le gouvernement tombera. Le pape passera des heures d'agonie ; à la fin je serai là pour les conduire au paradis. Une grande guerre aura lieu. Le nombre de morts et blessés sera incalculable. Satanas chantera victoire mais sera alors le moment où tous verront apparaître mon Fils sur les nuages et Il jugera tous ceux qui ont dédaigné son sang innocent et divin. Alors mon coeur immaculé triomphera ».

13 août 1951

« Ma fille, je suis ici pour te dire que le Père enverra une grande punition au genre humain dans la seconde moitié du XXe siècle. Sache ma fille que Satan règne chez ceux qui occupent les plus hauts postes. Quand Satan arrivera en haut de l'Église, il pensera qu’à ce moment-là il sera parvenu à séduire les esprits des grands scientifiques et c’est à ce moment-là qu’ils interviendront avec des armes très puissantes avec lesquelles il est possible de détruire une grande partie de l'humanité ».

7 octobre 1951

« Ma fille, les tribulations que le père a destinées à l'Italie sont préparées et seules les âmes qui se sont offertes comme victimes peuvent toucher pleinement le cœur de mon fils et du père. À partir de 1972 on entamera le temps de Satanas, les cardinaux s'opposeront aux cardinaux et les évêques aux évêques. Tu te trouves au milieu d'une génération très difficile, dans laquelle on prétend tout expliquer par scientifiquement et personne ne pense donner un peu de chaleur, un peu d'amour, compris aux plus pauvres ».

Le « calvaire » continue…

Le « calvaire » de Teresa continua. Reportons-nous à son « Journal » du 29 février 1952 :

« Les coliques — explique-t-elle — ne m’abandonne plus ; elles sont continuelles. Je ne trouve pas de paix. Bien souvent je reste sans souffle. Je n’ai même plus la force pour me lamenter, mais j’offre tout à Jésus, par amour pour Lui. Je ne trouve que Lui dans mon cœur. J’offre ainsi toutes mes souffrances pour les pécheurs, pour les Prêtres et pour les âmes du Purgatoire… » (Journal, p. 370).

Un peu plus tard, au mois de mars de la même année, la fillette écrivit encore dans son Journal :

« J’ai de nouveau ma jambe gonflée et une grosse fièvre qui m’obligent à garder le lit. Les journées passent agrémentées de larmes, de cris et de gémissements. Tout le voisinage m’en veut à cause de mes lamentations. La Maman du ciel vient auprès de moi pour m’aider à réciter le saint Rosaire, toutefois je dois noter qu’Elle ne répondait qu’au Notre Père, se taisant ensuite ».

Et, quand ce n’était pas la maladie qui la faisait souffrir, son père, toujours aussi acariâtre, toujours aussi râleur et méchant, s’en occupait lui-même, soit par des mots méchants — et il en connaissait une vraie litanie — soit par des actes brutaux   gifles, coups de poing, coups de ceinture et nous en passons — que nous voyons de moins en moins pratiqués de nos jours, heureusement, mais qui étaient, il faut le dire, le « pain quotidien » de la plupart des enfants dans la première moitié du vingtième siècle.

A l’école communale

Jusqu’au 20 février 1952, malgré son âge, Teresa n’était jamais allée à l’école, ce qui était pour elle un gros handicap : elle qui devait écrire ce que lui dicterait la sainte Vierge…

Mais, le Ciel veuille à tout et y apporte toujours la bonne solution. Écoutons le père Roschini :

« Le 20 février 1952, une dame — la surveillante de l’école — se présenta chez les Musco et demanda à parler au chef de famille et lui dit qu’elle venait de la part du Directeur de l’école et du Syndicat pour lui notifier qu’il avait deux enfants lesquels, selon la loi, étaient tenus de fréquenter les cours. Elle l’avertit que s’il continue à les tenir éloignés de l’école, elle sera forcée de revenir chez lui accompagnée des gendarmes, pour les y mener. Le cœur de Teresa, en écoutant cette menace, se remplit de joie. Le père, récalcitrant à envoyer la fille à l’école, se trouvait de la sorte obligé de capituler. Le matin suivant, Pour Teresa, pointait “le premier jour d’école”. Elle avait alors neuf ans ! “J’ai ressenti — écrivit-elle — comme si tous les maux étaient disparus : je me sentais heureuse, remplie d’une joie jamais ressentie”. Pendant que la maîtresse donnait ses explications, l’élève, en son fort intérieur disait : “O divin Cœur de Jésus, par l’œuvre du Saint Esprit, que ma vie soit comme la tienne : un holocauste permanent qui Te plaise, consommé dans le Cœur Immaculé de Marie, dans le détachement de toutes les créatures, dans le silence et l’oubli, dans le mépris et l’anéantissement de moi-même, pour le renouveau de mes frères et sœurs, à la louange et gloire du Père”. De temps en temps, toutefois, la maîtresse la rappelait à l’ordre, lorsque celle-ci se rendait compte que la pensée de Teresa était ailleurs. “La pensée de Musco — disait-elle — cherche des poussières dans les nuages”. Et tout le monde rigolait aux dépens de la pauvre élève ».

Mais Teresa ne faisait pas que « chercher des poussières dans les nuages », elle faisait de rapides progrès, ce qui impliquait, bien entendu, les félicitations de la maîtresse, chose que la fillette détestait, car depuis longtemps, elle ne cherchait pas à se mettre en avant, mais à faire tout simplement et humblement, ce qu’elle avait à faire.

Elle se levait tôt — vers quatre heures du matin —, aussitôt après que ses parents soient partis travailler. Elle faisait le ménage, allait assister à la Messe et ensuite se rendait à l’école. Ses devoirs scolaires elle les faisait dans l’après-midi, car elle n’avait pas de cours. Elle profitait aussi pour prier le saint Rosaire et ensuite préparait le dîner.

A neuf ans, Teresa était devenue « une petite femme » d’intérieur.

Salvatore, le père récalcitrant, chercha par tous les moyens à l’empêcher d’aller à l’école, mais la fillette avait en Jésus et Marie des défenseurs autrement coriaces que son père.

Chaque fois que Salvatore essayait de la retenir, Teresa priait : « Jésus, aide-moi, si tu veux que j’apprenne à lire ». Et, comme la plupart des enfants — qui n’ont peur de rien — la fillette ajoutait : « Comment puis-je couper l’herbe pour les ânes ? » Car son père voulait absolument qu’avant d’aller à l’école, elle coupe et ramasse de l’herbe pour les bêtes. En réponse à sa question, elle entendit cette voix amie qu’elle connaissait déjà si bien, lui dire :

« Va à l’école et ne crains pas ! »

Teresa est heureuse : « Combien je me sens heureuse de me trouver au milieu des autres, d’entendre tant de belles choses que la maître nous apprend ! »

L’herbe coupée…

Salvatore, toujours égal à lui-même, appela un jour sa fille — vers la fin mars 1952 — et lui dit :

« Teresa, à compter de demain tu devras aller cueillir de l’herbe… Tu ne dois pas faire la « bourgeoise » à la maison ; tu devras travailler » « Oui ! — répondit Teresa — mais avec mon petit frère qui est encore au biberon, comment pourrai-je faire… » « Mais bien sûr que tu le pourras », rétorqua Salvatore.

Cette décision — qui semble bien arbitraire — peina beaucoup la fillette, car elle se voyait déjà privée de la Messe matinale et de la réception, par la même occasion, de son bien-aimé Jésus. Elle pleura presque toute la nuit, puis s’endormit et fit un rêve très particulier : elle vit, dans les prés du Cimetière, deux angelots qui coupait l’herbe et attendait ensuite que quelqu’un vienne la ramasser.

Teresa se réveilla vers les quatre heures du matin et entendit partir ses parents. Elle se leva alors rapidement pour faire le ménage. A cinq heures trente elle prit le sac et partit vers le Cimetière, laissant seul son petit frère endormi. Elle avait posé à côté de sa bouche le biberon rempli de lait, au cas où il se réveillerait avant qu’elle ne revienne.

Arrivé à l’endroit dont elle avait rêve la nuit, elle trouva l’herbe déjà coupée. Elle remplit son sac et revint à la maison, remerciant Dieu de lui avoir permis de pouvoir aller assister au saint sacrifice de la Messe, après avoir accompagné son petit frère à l’asile (Journal, pp. 1096-1097).

La cuisine céleste…

Le fait que nous allons rapporter, peut laisser à penser que nous nous acharnons sur le pauvre Salvatore, le père de Teresa. Il n’en n’est rien, car il ne nous appartient pas de porter un jugement sur les agissements du pauvre homme qui fut, sans le savoir et sans le vouloir vraiment, un instrument dans les mains de Dieu, pour la sanctification de sa fille, la petite Teresa.

Début septembre 1952, Teresa fit la connaissance d’une famille nombreuse — sept enfants — vivant dans la misère, sans rien avoir pour calmer leur estomac dévoré par la faim. La fillette en est très peine et vint chez elle chercher un demi kilo de haricots, afin de leur permettre de manger un peu et de calmer leur faim. Mais, une voisine qui avait regardé le va-et-vient de Teresa, alla tout raconter à son père. L’homme, comme nous le savons déjà, facilement colérique, appela sa fille et lui demanda : « Est-il vrai que tu as donner des haricots ? » La fillette n’est aucunement adonné au mensonge et, sa réponse est immédiate : « Oui, c’est vrai. Mais, nous en avons en abondance… »

Le sévère Salvatore, très en colère, se leva, prit sa fille et lui administra une très sévère correction : il la frappa jusqu’à épuisement, puis pour combler le tout, l’envoya au lit sans manger.

Teresa, en pleurs, prit son crucifix et offrit à Jésus toutes ses souffrances.

Vers minuit elle entendit frapper à la vitre de la fenêtre de sa chambre ; elle regarda et vit un Ange qui lui dit :

« Regard, je t’ai apporté à manger. Ne pleure plus ! C’est la Maman du ciel que m’a envoyé vers toi, pour te consoler ».

Et il lui présenta une tourte au miel et un morceau d’agneau grille.

« Je n’ai jamais mangé quelque chose d’aussi bon ! » — nota la fillette dans son Journal.

La sainte Vierge venait ainsi récompenser la générosité de sa fille de prédilection, et nous faire comprendre, par la même occasion, qu’Elle n’abandonne jamais ceux qui, sincèrement, ont recours à Elle.

Le monde au bord du gouffre

Le 31 août 1953 — Teresa avait alors dix ans — alors qu’elle raccommodait les pantalons de ses frères, la Maman du ciel lui apparut et lui dit :

« Ma fille, tu dois écrire ! Prends une feuille et une plume !... »

Teresa, comme toujours, obéissante, alla prendre une feuille et la plume et se mit à l’écoute de la divine Maîtresse. Voici ce qu’elle écrivit sous la dictée de Marie :

« Ma file, combien de péchés dans le monde ! Mille fois et, à chaque instant [les hommes] crucifient, clouent mon Fils à la croix. Le Père en a assez et sa colère est grande de voir son Fils autant piétiné et maltraité par tant d’hommes cruels. Ma fille, prie et fait pénitence car le peuple courre véloce ver un horrible précipice. Parle aux petits comme toi afin qu’ils prient, car la prière des innocents vaut bien plus que celle des adultes. Seule la prière pourra calmer la colère de Dieu. Et toi, par tes peines et tes prières, tu peux changer tellement de cœurs. Prie beaucoup, spécialement pour mes fils de prédilection, les Prêtres, les fils de prédilection de mon Fils. Je veux une vraie ferveur, vive et vraie dans la prière, et non pas une prière apprise par cœur et récitée par habitude, spécialement la prière faite devant Jésus au très Saint-Sacrement. Ainsi tu obliges tant et tant de Prêtres à revenir à moi » (Journal, pp. 387-388).

Comme on peut le voir, la Vierge Marie, Mère de tous les hommes, a un amour de prédilection pour les Prêtres et, ne se fatigue jamais de faire prier pour eux, car, il est vrai, ils sont les représentants de son divin Fils auprès de leurs frères. Ce sont eux également de dire les paroles extraordinaires que Jésus lui-même a dites lors de son dernier repas avec ses apôtres : « Ceci est mon Corps… Ceci est mon sang… » Paroles qui font trembler et dont la puissance est inouïe : elles transforment le pain et le vin en Corps et Sang de Jésus.

En est-on toujours conscient de ce divin mystère, de ce miracle quotidien réalisé par Jésus par l’intermédiaire de ses « fils de prédilection » ?

Rien n’est moins sûr, hélas, à entendre les plaintes réitérées de Marie aux quatre coins du monde, là où elle se présente à nous pour solliciter prière et sacrifices.

Depuis des années, à La Salette, à Lourdes, à Pontmain, à Fatima ou à Balasar, au Portugal ; qu’il s’agisse de petits enfants ou d’adultes, Marie a toujours demandé des prières particulières et ferventes pour les Prêtres, afin qu’ils deviennent tous saints et de bons bergers, car les bons bergers ont soin de leurs brebis et ne veulent en perdre aucune…

« Ta souffrance sera longue… »

Les « maladies » — car il faut les mettre au pluriel — et les incompréhensions au sein même de la famille de Teresa ne semblaient pas s’amoindrir, bien au contraire.

La Madone qui les connaissait et en connaissait la cause préféra avertir la fillette et, toute maternelle, elle vint un jour — le 30 octobre 1953 — lui en faire part. Écoutons-la :

« Ma fille, je te le recommande : ce cahier — celui où Teresa notait tout ce que la Maman du ciel lui dictait — tu ne dois pas le montrer à quiconque, avant que Je ne te le dise. N’attend aucun soulagement ou compréhension de la part de ceux qui te sont chers, car tu n’en auras aucune. Ta souffrance sera longue et pénible. Longtemps après, une nouvelle souffrance t’atteindra : [une souffrance] qui te crucifiera l’âme et le corps ».

Mais la Vierge n’abandonne jamais ses enfants dans la détresse. Marie ajoute encore à l’adresse de la fillette :

« Je serai toujours à côté de toi, non pas pour t’alléger, mais pour te replacer sur la croix ».

La victime est prête et la croix aussi… Le moment venu, les deux vont se joindre, se coller l’une à l’autre, pour ne plus jamais se séparer.

* * *

Il resterait encore de nombreuses pages à remplir, pour mieux faire comprendre à chacun, le cheminement de Teresa Musco, vers la crucifixion qui l’attend. Mais, ces “Notes biographiques” se doivent d’être courtes et de renvoyer vers d’autres ouvrages bien plus complets et autrement plus documentés que notre humble travail.

   

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