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Mystères Joyeux —
Mystères Lumineux —
Mystères Douloureux
Mystères Glorieux
Mystères du Rosaire
Le Chemin de la Croix
La Croix, c’est la souffrance à son
paroxysme. La Croix, c’est l’horreur absolue. Mais la Croix de Jésus, c’est
aussi notre salut.
C’est grâce à la Croix que les
hommes, délivrés du péché et de la mort peuvent retrouver leur Créateur et vivre
de nouveau dans son Amour et dans son Coeur, le Cœur de Dieu.
C’est grâce à la Passion du Christ
et à sa Croix que Dieu, Dieu-Amour, pourra de nouveau trouver ses délices dans
la compagnie des hommes réconciliés avec Dieu, et des enfants des hommes.
Jésus-Christ, c’est Dieu fait
Homme. Jésus se présentera Lui-même comme le Fils de l’Homme, c’est-à-dire,
selon la foi juive, Fils d’Adam et Fils de Dieu. Et, au début de sa Passion,
devant les badauds qui voulaient voir et entendre, et peut-être assister à du
spectaculaire, la voix du grand-prêtre se fit entendre : “Tu es donc le Fils
de Dieu ?” Et Jésus répondit clairement, et enfin, révéla publiquement sa
divinité : “Tu l’as dit. Et Je vous le déclare, désormais vous verrez le Fils
de l’Homme assis sur les nuées du ciel, à la droite du Tout-Puissant.”
(Matthieu XXVI 63-64)
Les souffrances visibles du
Seigneur Jésus n’ont commencé qu’à partir de sa naissance, le jour de sa
Nativité. Mais la passion de ses proches, de ceux qui, choisis par le Père,
auront la charge de veiller sur Lui pendant toute sa vie cachée, la passion des
parents terrestres de Jésus a commencé dès l’instant de sa conception, dès
l’Annonciation. L’instant de l’Incarnation, c’est le début de la passion de
Marie et de Joseph, c’est donc aussi le début de la Passion du Christ.
Le Rosaire, c’est la prière des
pauvres, la prière de ceux qui aiment méditer la vie du Seigneur et vivre son
chemin avec Lui. Le chemin de Jésus fut un chemin d’amour mais aussi de
douleur. Et dès que l’on médite la vie de Jésus, on trouve la Croix.
On trouve la Croix dans les
mystères joyeux. On la trouvera aussi dans les mystères lumineux et glorieux ;
oui, même dans les mystères glorieux car, paradoxalement, chaque fois que les
disciples croiront avoir enfin retrouvé Jésus, c’est à cet instant précis qu’Il
disparaîtra...
G
Mystères Joyeux
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Marie est chez elle, à Nazareth; elle
est pleine de confiance envers Joseph, son époux, le saint époux qui a compris
son désir de virginité. D’ailleurs, lui-même a consacré sa vie à Dieu...
Alors pourquoi Joseph avait-il accepté
le mariage? C’est que, chez les juifs de cette époque, tous les jeunes hommes
devaient être mariés, et cela à partir de l’âge de dix-huit. Il était
inimaginable qu’un homme ayant dépassé les vingt et un ans soit encore
célibataire.
Marie est toute contente: elle chante
tout en travaillant. Marie chante la gloire de Dieu, Marie prie et supplie le
Seigneur d’envoyer rapidement son Messie, et de lui faire la grâce, à elle,
d’être la servante de celle qui sera la Mère du Sauveur.
Marie est seule, Marie prie et sa
prière est musique. Marie travaille, et Marie chante sa joie, sa foi en Dieu,
son Amour du Seigneur... Marie prie sa joie.
Soudain Marie lève les yeux: quelqu’un
est devant elle. Elle apprendra bientôt que c’est l’Archange Gabriel, le
messager de Dieu, qui vient lui demander d’être la Mère de Jésus, celui qu’on
appellera le Fils du Très-Haut.
Et Marie dit “Oui !”.
Marie a dit “Oui!” à l’ange. Le
bonheur de Marie dépasse tout ce qui se peut imaginer sur terre. Son bonheur est
presque céleste.
Mais soudain, comme malgré elle, Marie
frémit et pense : “Et Joseph ?” On ignore tout de ce que Marie a vraiment pensé
à ce moment-là. Mais on peut vraisemblablement imaginer son monologue
intérieur : ”Que pensera Joseph quand il s’apercevra que j’attends un enfant ?
Que lui dire ? Mais non, je dois attendre : car seul Dieu peut révéler la vérité
à mon époux. Comment le fera-t-il? Peut-être que Joseph ne comprendra pas ?
Alors, selon la Loi de mon peuple, il pourrait me dénoncer et me faire lapider.
Moi, je ne peux rien dire, je dois faire aveuglément confiance à mon Père des
cieux.”
Alors, malgré sa joie, Marie pleure.
Sa passion à elle est déjà commencée. Dès que Jésus entre dans une vie, la
passion commence dans cette vie. Car la Croix est toujours avec Jésus et elle le
sera jusqu’à la fin du monde. |
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La Visitation
L’Archange Gabriel poursuit
sa mission. Il donne un signe à Marie : “Voici qu’Élisabeth, ta
parente, est enceinte, elle aussi, d’un fils, malgré sa vieillesse. Elle
en est à son sixième mois, elle qu’on appelait la stérile, car rien n’et
impossible à Dieu.”
Alors Marie partit en
hâte... Pour aller rencontrer sa vieille cousine et lui rendre les
services indispensables. Joseph fut bien un peu étonné de voir son
épouse partir si vite. Qui était ce mystérieux messager ? Après tout,
Élisabeth et Zacharie avaient pu envoyer un messager : les voyageurs
réguliers étaient nombreux entre Jérusalem et Nazareth...
Pourtant Joseph était
vaguement inquiet: les routes sont peu sûres pour une aussi jeune femme.
Il faudra qu’il la fasse accompagner par quelqu’un de tout à fait sûr.
Joseph était aussi un peu contrarié : il commençait à s’habituer à la
présence, près de chez lui, de sa douce épouse. Il aimait la rencontrer
tous les soirs, après le dîner et parler un moment avec elle. Mais si le
Très-Haut, béni soit-Il! demandait ce sacrifice, c’est volontiers et
avec joie que Joseph se soumettrait à la Sainte volonté de Dieu.
Les mois ont passé...
Joseph n’était plus inquiet car il recevait régulièrement des nouvelles.
Tout le monde aimait et respectait sa douce Marie, si aimable, si
aimante, serviable et si dévouée... Joseph ne recevait que des
compliments de l’épouse que Dieu lui avait donnée. Aujourd’hui, Marie
rentre à Nazareth, et Joseph est plein de joie.
Joseph est heureux. Mais
son bonheur ne durera pas longtemps. Que s’est-il passé, là-bas, dans la
ville de Juda ? Marie paraît... oui, elle paraît enceinte. Pourtant elle
n’a pas quitté la maison de Zacharie. Elle est toujours restée auprès
d’Élisabeth... Joseph est torturé dans son esprit et dans son coeur.
Joseph ne sait plus: que doit-il faire? La passion de Joseph commence.
Quand Jésus s’approche de quelqu’un, Il apporte toujours sa Croix avec
Lui...
Joseph cherche dans les
écritures qu’il connaît bien. Comme tous les juifs d’alors, il attend le
Messie, le Messie qui doit naître d’une vierge. Marie est vierge, elle
est pure, elle est sainte: il le sait. Marie n’a pas pu pécher, donc
Marie serait peut-être la Mère du Messie attendu ? Dans ces conditions
Joseph ne peut pas rester avec elle: il n’en est pas digne. Il doit
partir. Il fera semblant de la renvoyer tout en la laissant chez elle.
Ainsi l’opprobre retombera sur lui, Joseph... La décision est prise,
Joseph partira cette nuit.
Mais cette nuit-là, l’Ange
du Seigneur apparut en songe à Joseph : “Joseph, fils de David, ne
crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, car l’enfant qui est
engendré en elle est l’oeuvre de l’Esprit-Saint. Elle mettra au
monde un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus, car il sauvera son
peuple de ses péchés.”
Joseph maintenant, exulte
de joie. Pas pendant très longtemps cependant. Car Joseph, le
Charpentier connaît les Écritures. Les textes du prophète Isaïe
reviennent brusquement à sa mémoire: le Messie sera aussi le Serviteur
souffrant. Les psaumes disent aussi la même chose... L’enfant qu’il aime
déjà de tout son coeur sera-t-il ce serviteur annoncé ? De quelles
souffrances s’agit-il ? Lui, Joseph, ne sera-t-il pas capable de
protéger celui que le Père lui confie ?
Joseph, la passion de ton
cœur continuera pendant longtemps, car l’Amour apporte toujours la
souffrance avec lui. Et Jésus, c’est l’Amour. |
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La Nativité de Jésus
Jésus, doux et humble
n’avait pas choisi, pour venir sur la terre, une famille de misérables,
(on dirait aujourd’hui : prolétaires) et encore moins de mendiants. Non,
sa famille était bien considérée dans son milieu. Elle était pauvre,
mais d’une pauvreté pleine de dignité. C’était une famille d’artisans,
comme l’étaient, à cette époque, presque tous les juifs pieux qui
devaient, obligatoirement exercer un métier manuel pour subvenir aux
besoins de leur famille. Et ce métier manuel, ils devaient le
transmettre à leurs enfants : c’était la Loi.
Joseph était un
charpentier, métier particulièrement considéré dans les milieux hébreux.
Cela remontait à Salomon, quand on construisit le Temple : il fallait
pour cela des hommes très compétents, et les charpentiers faisaient
partie de cette classe dont ils détenaient les secrets.
Marie était de race
sacerdotale et Joseph de race royale. Ils avaient soigneusement préparé
la venue du Messie: tout était prêt pour recevoir l’Enfant attendu.
Providentiellement, ils avaient dû aller à Bethléem, pour que Jésus y
naisse, conformément aux Écritures. Mais le voyage ne devait durer que
quelques jours, et très vite, il était prévu de rentrer à Nazareth.
Jésus ne manquerait de rien... Marie avait pensé à tout.
Que s’est-il passé
exactement entre le départ de Nazareth, et la naissance de Jésus dans
une grotte ? Pourquoi, subitement une telle détresse, une presque misère
pour ces gens pleins de dignité ? C’est que Jésus devait, en arrivant
sur terre, remettre immédiatement beaucoup de choses à leur place :
– Lui, le Créateur
et le Maître du monde devait montrer que la vraie grandeur de l’Homme,
c’est son humilité.
– Lui, de condition
divine, donc riche de tous les biens de l’univers, devait montrer, dès
le premier instant de sa vie terrestre, que la vraie richesse n’est pas
dans les biens matériels mais dans l’amour. Et Jésus, dans sa sainte
Famille ne manqua jamais d’amour.
– Lui, qui ne
connaissait pas la souffrance, devait dès sa naissance, se charger de
toutes les souffrances et misères humaines, ces misères dues au Péché:
le péché des anges et les péchés des hommes.
En quelque sorte, Jésus
naît avec sa Croix, la Croix qui sauvera le monde. Jésus naît dépouillé
de tout, dans une crèche, et il sera déposé, lui le Roi du monde, dans
une mangeoire d’animaux. Il aura froid... mais des pauvres : les
bergers, apporteront une chaude peau d’agneau. Il aura faim, mais le
lait de Marie est délicieux et nourrissant. Il aura besoin d’amour, et
ses parents combleront son attente. Il y aura aussi tous les pauvres de
cœur, pauvres de coeur mais riches d’amour qui viendront vers Lui pour
réchauffer son Cœur.
Les parents de Jésus, en
arrivant à Bethléem, n’ont d’abord rencontré qu’indifférence, mais très
vite les cœurs du voisinage se sont ouverts. Les cœurs des pauvres se
sont ouverts, les voisins se sont émus et ont apporté leur aide, les
mages ont, humblement, déposé leurs présents... Mais il y avait aussi,
malheureusement, trop de cœurs riches et durs qui voulaient se
débarrasser de Jésus, car déjà, Il les gênait. Ils ressentaient comme
une peur panique à cause d’un bébé sans défense... Alors, ils ont fait
tuer tous les petits enfants qui avaient à peu près son âge... Ainsi, Il
n’échapperait pas...
Si, Jésus a échappé au
massacre des innocents; mais en tuant des innocents, c’était déjà son
Cœur que les bourreaux transperçaient. Cela Jésus le savait, et son Cœur
souffrait, le Cœur de Jésus souffrait tellement ! |
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C’est fête aujourd’hui pour
Marie et Joseph. Jésus a quarante jours, et il faut Le présenter au
Temple, Le racheter, comme on dit chez les juifs pieux, en souvenir de
la sortie d’Égypte, fin de l’esclavage du peuple hébreux. C’est fête
aussi pour toute le famille, et on peut supposer que Zacharie est
présent pour accueillir Jésus chez lui, dans le Temple de son Père.
C’est fête aujourd’hui pour
Marie et Joseph. Joseph a acheté deux ravissantes petites colombes,
blanches et pures, et douces comme un agneau. Joseph les caresse
doucement et s’attendrit : il est un peu triste de devoir les confier au
prêtre qui les sacrifiera, mais c’est la Loi, alors !...
Joseph a maintenant
accompli toutes les formalités réservées au père de famille. Maintenant
il peut rejoindre Marie qui l’attendait avec l’Enfant sur le parvis des
femmes. Tous les deux vont maintenant présenter Jésus au prêtre,
peut-être Zacharie, qui attend. Tout est terminé, maintenant il faut
partir avant que le bébé ne manifeste trop vigoureusement qu’il commence
à avoir faim...
Que se passe-t-il donc ? On
demande à Marie et à Joseph de revenir un peu en arrière : quelqu’un
voudrait les saluer. C’est Syméon, un saint, un juste selon le Cœur de
Dieu. C’est un sage, une sorte de prophète chargé d’ans, mais que l’on
aime écouter tant ce qu’il dit est plein de sagesse. Syméon veut voir
l’Enfant, il veut le prendre dans ses bras. Il ne sait pas pourquoi il
est venu : c’est comme une force irrésistible qui l’a conduit jusqu’ici.
Marie arrive et tend son
enfant au vieux Syméon. Le visage du vieux sage s’illumine : il vient de
reconnaître celui qu’il tient dans ses bras. C’est le Messie. Dieu lui
avait promis qu’il ne mourrait pas avant d’avoir vu le Saint de Dieu. Et
le Saint de Dieu, il le tient, aujourd’hui, dans ses bras, sur son
cœur : “Maintenant, ô Maître souverain, tu peux laisser ton serviteur
s’en aller en paix, selon ta parole, car mes yeux ont vu ton salut que
Tu as préparé à la face de tous les peuples, lumière pour éclairer
toutes les nations, et gloire d’Israël ton peuple.”
Marie et Joseph sont
illuminés de bonheur. Syméon les bénit, mais... soudain son ton change :
“Cet enfant sera un signe de contradiction pour beaucoup en Israël.
Et toi, la Mère, un glaive de douleur te transpercera l’âme, afin que
soient dévoilées les pensées cachées de beaucoup de coeurs.” Joseph
et Marie se regardent. L’Évangile ne dit pas ce qu’ils pensèrent, ni ce
qu’ils purent se dire. D’ailleurs la prophétesse Anne arrivait et louait
Dieu en parlant de l’enfant à tous ceux qui attendaient la délivrance
d’Israël.
La Sainte Famille retourna
à Nazareth. L’enfant dormait, insouciant. Mais Marie et Joseph ne
cessaient de penser aux paroles de Syméon qui rejoignaient
douloureusement la Sainte Écriture évoquant le Serviteur souffrant.
Joseph et Marie connaissaient trop bien la Parole de Dieu pour ne pas
faire les rapprochements déjà crucifiants. Car la passion de Joseph
continuait : que se passerait-il? N’aurait-il donc pas le courage ou la
possibilité de protéger Marie et l’enfant béni dont il a la garde ? Qui
sont ceux qui en voudront à la vie de Jésus ? Qu’est-ce que le Seigneur
attend de moi ? Que d’horribles et douloureuses questions pour Joseph !
Joseph avait trop
l’habitude d’obéir en silence pour se révolter ou avoir de
présomptueuses pensées. Mais le silence de Joseph était devenu lourd
comme une croix. Quant à Marie, elle gardait toutes ces choses dans son
coeur, attendant l’Heure du Seigneur, c’est-à-dire l’Heure de son Fils,
l’Heure de la Croix. |
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Une autre épreuve attendait
Joseph et Marie après les formalités de la majorité de Jésus. Sciemment,
Jésus va fuguer. Le mot nous paraît fort, mais c’est pourtant ce que
nous dirions aujourd’hui. Jésus, sans prévenir personne, sans même un
petit mot qui pourrait laisser entendre qu’Il a encore quelque chose à
faire, qu’Il retrouvera sa famille un peu plus tard, Jésus délibérément
semble délaisser sa famille. Jésus doit retrouver les docteurs du
Temple.
Jésus savait qu’Il allait
faire souffrir ses parents. Il le savait d’autant mieux qu’Il
connaissait leur amour, leur dévouement, et que jusqu’à présent, Il
avait été un enfant modèle et soumis.
Le premier acte de Jésus
devenu majeur, donc personnellement responsable de ses actes devant la
Loi juive, fut de faire souffrir ceux qu’Il aimait le plus. Jésus fait
souffrir ceux qu’Il aime pour aller vers les docteurs de la Loi, aux
affaires de son Père. Avait-Il pris rendez-vous avec eux ? L’un des
docteurs de la Loi Lui avait-il demandé de revenir pour discuter avec
eux ? Pourquoi Jésus n’a-t-Il rien dit, ni à Marie, ni à Joseph ? On ne
le saura jamais. La sagesse de Dieu n’est pas celle des hommes...
Ce n’est donc que le soir
du premier jour, après une longue journée de marche, que Marie et Joseph
s’aperçoivent que Jésus n’est pas là. Émoi! Stupeur ! Où peut-Il être ?
Que Lui est-il arrivé ? A-t-il eu un accident ? Non ! il ne semble pas :
ses compagnons ne l’ont pas vu depuis ce matin... Alors ?
Marie et Joseph sont
épuisés: pourtant ils n’hésitent pas à retourner à Jérusalem. Pendant
deux jours ils vont Le chercher, partout, dans la famille, chez les amis
et connaissances : non vraiment, personne n’a vu Jésus.
— Mais si, dit une pauvre
femme, mais si, moi je L’ai vu. Il a même couché chez moi ces deux
nuits. Comment ! Vous ne saviez pas qu’Il était chez moi ? Allez donc
voir au Temple, Jésus m’a dit qu’Il allait prier...
Joseph et Marie, tout
retournés, retrouvèrent Jésus au milieu des docteurs : Il semblait les
instruire... Soulagement, mais une plainte s’échappe du cœur de Marie :
“Mon enfant, pourquoi as-tu agi ainsi avec nous ? Vois, ton père et
moi nous te cherchions, tout affligés !”
Jésus sourit. Il quitte les
docteurs de la Loi et rejoint ses parents, mais Il ne s’excuse pas.
Jésus, toujours si gentil, si délicat, si soumis, Jésus qui vient de
causer une peine terrible à ses parents, Jésus ne s’excuse pas. Au
contraire, Il semble s’étonner : “Ne saviez-vous pas que je me dois
aux affaires de mon Père ?”
De ton Père ? doivent
penser Marie et Joseph. Mais ton père, c’est Joseph !
Non Joseph ! toi, tu es le
père nourricier, le père adoptif, le gardien à qui le Père a confié son
Fils, son Unique. Le vrai Père de Jésus, c’est le Dieu vivant : ne t’en
souviens-tu pas Joseph ?
Jésus revint avec eux à
Nazareth, et il leur était soumis. Mais Marie et Joseph qui
n’avaient pas encore très bien compris conservaient toutes ces choses
dans leur coeur. Lentement, doucement, le plus souvent dans l’obscurité,
ils apprenaient que pour suivre Jésus, pour vivre avec Lui, il faut
prendre sa croix.
G |
Mystères Lumineux
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Jésus vient de recevoir le
baptême de Jean le Baptiste. Jean, malgré sa confusion est heureux : le
Messie que tout le peuple attend est venu, Il est chez les siens. Le
Père a fait entendre sa grande Voix : “Celui-ci est mon Fils
bien-Aimé.” Jean a bien entendu. Jean a vu, aussi, l’Esprit de Dieu
descendre comme une colombe et se poser sur Jésus : il a vu, et il
l’atteste...
Jean est heureux. Jésus est
parti: peut-être reviendra-t-Il un jour prochain? Jean serait si heureux
de Le revoir... Jean ne peut pas maîtriser sa joie, et à chacune des
personnes qui viennent encore à lui, avant que la nuit ne soit tombée,
il ne peut s’empêcher d’annoncer que le Messie était là tout-à-l’heure,
qu’il L’a vu, lui Jean, et que désormais c’est Lui, le Messie, qui devra
croître ; lui, Jean, devra diminuer... D’ailleurs il n’est même pas
digne de délier la courroie de ses chaussures !
Jean est heureux. Pourtant,
il est soudain inquiet : n’est-ce pas en pensant au Messie qu’Isaïe, le
prophète, évoquait un certain Serviteur souffrant ? Mais alors, Jésus,
l’Agneau de Dieu, devra beaucoup souffrir ? Et Il devrait même être
rejeté par ceux qu’Il était venu sauver. Pire ! c’est par un proche
qu’il sera trahi? Jean quitte le Jourdain ; il fait nuit maintenant et
les eaux ne sont plus très sûres.
Il fait nuit maintenant
dans le cœur du Baptiste. Il fait nuit, car sa passion, à lui, Jean,
vient de commencer.
Et Jésus ? Jésus reviendra
demain. Il choisira ses deux premiers disciples, puis Il partira
accomplir sa grande mission, celle pour laquelle Il est venu... Jésus
est heureux dans son Cœur plein d’amour. Il a reçu le Baptême de Jean,
ce Baptême qui scelle son entrée dans sa vie publique.
Mais Jésus tressaille
soudain et sur son visage une ombre de tristesse s’est comme rapidement
dessinée. Jésus soupire doucement, car Il sait. Il sait que sa Passion
est déjà commencée... Sa mission débute par un Baptême d’eau... Elle
doit se terminer par un autre Baptême, et quel Baptême : un Baptême de
sang ! |
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Jésus a déjà choisi
quelques disciples. L’Évangile ne nous dit pas ce qu’Il leur a dit, mais
ils l’ont suivi, comme çà, sans savoir où Il allait, comme subjugués par
les premiers enseignements de Celui qu’ils appellent déjà “Maître”. Les
premiers disciples ont suivi Jésus, s’attendant à recevoir de nouvelles
et merveilleuses paroles, des paroles pleines d’espoir... Or Jésus les a
conduits jusqu’à une noce, et ils sont un peu déçus...
Oui, les disciples sont
déçus, mais heureusement, ils ont pu assister à l’engagement des jeunes
époux, et ils ont été, de nouveau, séduits par le discours de Jésus sur
le mariage. Les disciples n’ont pas tout compris de l’enseignement
nouveau que leur Maître a délivré au cours de la cérémonie, car Il a
parlé de noces éternelles, Il a parlé d’épousailles célestes; et Il a
même dit qu’un jour, Lui, Jésus, épouserait la Croix...
Il a dit aussi que les âmes
très pures seraient les épouses de Dieu !!! Et puis, Jésus a tellement
insisté sur la fidélité que les époux se doivent: les deux époux, égaux
en droits et en devoirs !!!...
Les disciples de Jésus se
sont ensuite mêlés aux invités et ont participé aux repas nuptial. Et
puis, alors que la fête battait son plein, Jésus les appelés pour qu’ils
Le suivent jusque dans les cuisines... Et Jésus a changé l’eau en vin,
et les disciples ont vu, les disciples ont vu la Gloire de Jésus, et les
disciples ont cru en Lui...
Les disciples étaient tout
heureux : maintenant ils en étaient sûrs, Jésus était bien le Messie
attendu. Les disciples se préparaient à acclamer Jésus avec tous les
invités de la noce, mais Jésus leur avait donné l’ordre de Le suivre
immédiatement. Et les disciples n’avaient pas compris : s’en aller
maintenant ? alors que eux aussi allaient être félicités à cause de
Jésus, et, surtout, à cause de l’eau, de l’eau changée en vin. À contre
cœur ils avaient obéi, et maintenant Jésus les menait vers un lieu
ombragé et isolé :
— Venez, mes amis, venez
prier avec Moi et vous reposer un peu.
Les disciples se sont
groupés debout autour de Jésus. Ils ont loué le Père tout puissant, puis
ils ont prié avec Jésus l’étrange prière du Serviteur souffrant dont
parle le prophète Isaïe... Les disciples ont récité par cœur des paroles
dont le sens leur demeurait fermé. Qui était ce Serviteur méprisé? Alors
Jésus leur demanda de s’asseoir auprès de Lui :
— Vous M’avez suivi parce
que vous avez compris que je disais des paroles de vérité, mais vous
n’étiez pas sûrs de vous. Maintenant vous croyez en Moi car vous m’avez
vu accomplir un miracle. Mais vous ne comprenez pas les écritures. Le
Serviteur souffrant qu’Isaïe le prophète a évoqué pour vous, c’est
Moi...
Stupeur chez les disciples,
regards pleins d’interrogations, de doutes... Mais Jésus continue :
— Oui, le Jour viendra où
les hommes Me rejetteront. Ils porteront de faux témoignages contre Moi,
ils Me condamneront injustement, Me feront cruellement souffrir, et Me
crucifieront. Le vin que J’ai donné, tout-à-l’heure, aux gens de la
noce, c’est déjà l’image de mon sang qui sera versé pour vous et pour le
salut de tous les hommes.
Les disciples se récrient :
— Maître, ce n’est pas
possible. Qui pourrait T’en vouloir ?...
Jésus se lève :
— Mes amis, l’Heure n’est
pas encore venue. Je dois d’abord aller évangéliser, porter la Bonne
Nouvelle à toutes les tribus d’Israël. Vous, vous serez mes témoins.
Le petit groupe a repris sa
marche, mais en silence : les disciples essaient de comprendre les
paroles de Jésus. Ce que le Maître vient de dire, ce ne peut être qu’une
image: les juifs ne crucifient pas. Et les Romains, nous devons bien
reconnaître même si nous les aimons pas, qu’ils sont justes, et ne
crucifient que les grands criminels. Et notre Messie n’est pas un
criminel, Lui qui ne nous parle que d’amour et même d’amour de notre
prochain.
Jésus, Lui, savait. Et dans
son Cœur, Il commençait déjà à vivre sa Passion. |
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Jésus a parlé longuement
devant la foule nombreuse venue L’écouter. Comme toujours ses
enseignements sont pleins d’une sagesse qui n’est pas de ce monde, et
les disciples sont éblouis. Le Maître a longuement parlé du bonheur, et
le cœur des disciples était brûlant d’amour. C’est vrai, bienheureux
sont ceux qui ont le cœur pur, bienheureux ceux qui savent pardonner!...
Les apôtres, pressés contre Jésus, sont bien d’accord, car ils
constatent de plus en plus que la haine ne mène à rien. Simon le Zélote
en a fait la cruelle expérience, lui qui a participé à plusieurs
reprises à des embuscades sanglantes contre les Romains. La haine ne
mène à rien, sinon à plus de malheurs...
Les apôtres sont
parfaitement d‘accord avec le Maître, même quand ses enseignements les
déconcertent un peu : mais le soir, Jésus leur explique tout en
particulier, et l’obscur devient clair... Pourtant, aujourd’hui, après
avoir parlé du bonheur de suivre sa Loi d’amour, le Maître a fait une
curieuse remarque. Après avoir intensément fixé ses disciples de son
regard pénétrant mais tellement aimant, Il a soupiré en disant :
— Heureux serez-vous
lorsqu’on vous persécutera et qu’on dira faussement du mal de vous à
cause de Moi!... Réjouissez-vous alors, et exultez de joie !...
Les disciples se sont
regardés, interrogativement: qu’est-ce que le Maître peut bien vouloir
dire ? Le visage de Jésus se fait lointain comme s’Il voyait
l’invisible, comme s’Il voyait dans le temps, et bientôt Il ajoute :
— Comme ils M’ont
persécuté, ils vous persécuteront...
Les disciples pensent
immédiatement aux pharisiens qui posent constamment au Seigneur des
questions embarrassantes, des questions-pièges. Mais Jésus a toujours la
réponse inattendue qui ferme les bouches les plus agressives. Bien sûr,
c’est désagréable, mais ce n’est pas vraiment une persécution. Et puis,
tant que le Maître est là, eux, les apôtres, ils n’ont rien à craindre.
Et quand son Royaume sera établi, quand ils seront des ministres
respectés, qui oserait les persécuter ?
Jésus continue à regarder
l’invisible. Il se tait toujours. Enfin Il se lève :
— Venez, mes bien-aimés.
Vous ne pouvez pas encore comprendre, mais cependant, sachez-le : celui
qui veut venir avec Moi, qu’il prenne sa croix, et qu’il me suive.
Les apôtres se lèvent, et
ramassent leurs bâtons pour la route. Ils n’ont pas compris
l’enseignement de Jésus, mais encore une fois ils Le suivent, car ils
savent qu’Il a les paroles de la vie éternelle. |
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Jésus avait pris avec Lui
Pierre, Jacques et Jean, et ils étaient allés sur la montagne pour
prier. Comme ils en avaient pris l’habitude, les trois apôtres
contemplaient Jésus qui priait. Quand Jésus priait, c’était comme s’Il
n’était plus de la terre, et ceux qui Le regardaient avaient
l’impression de vivre des instants d’indicible bonheur, des instants de
paradis. Ils savaient que la prière de Jésus était pour eux un
enseignement très précieux, et ils n’osaient pas déranger leur Maître.
Mais aujourd’hui, tout était différent...
Jésus priait, mais voici
que bientôt son visage changea ; même ses vêtements devinrent d’une
blancheur éblouissante, d’une blancheur qui n’était plus de la terre...
Émerveillés, tout en étant cependant comme apeurés, les apôtres
n’osaient même plus bouger. Que se passait-il ?
Et voici que dans
l’éblouissante lumière, qui pourtant ne blessait pas les yeux, deux
hommes étaient là. Instantanément, les disciples reconnurent Moïse et
Élie. Plus tard, ils raconteront que c’était une voix très douce, très
insistante, qui les leur avait présentés dans leur gloire. Mais pour le
moment, les trois apôtres contemplaient, stupéfaits. Et ils écoutaient
aussi, de toutes leurs forces, et de toutes leurs oreilles. Et Moïse et
Élie parlaient du départ de Jésus, du jour, si proche, maintenant, où Il
viendrait les délivrer et les conduire dans le Ciel, auprès du Père...
Les trois apôtres étaient
incroyablement heureux: plus rien ne les troublait. Plus rien ne les
effrayait, même quand les deux visiteurs se mirent à parler de choses
surprenantes : de la Passion que Jésus devait subir prochainement à
Jérusalem, de la Croix sur laquelle Il serait cloué, de son Corps
bientôt livré, de son Sang qui serait versé... Les apôtres étaient comme
écrasés de bonheur; seul Pierre s’agitait un peu... C’était son
habitude...
Bientôt la vision cessa.
Les deux hommes étaient partis, et Jésus était seul devant ses apôtres.
C’est alors que, de la nuée, la voix du Père se fit entendre :
“Celui-ci est mon Fils Bien-Aimé, écoutez-Le !”
Jésus et ses disciples
redescendirent de la montagne pour retourner dans la plaine. Jésus fit
quelques recommandations, puis se tut. Il pensait à sa Passion et à sa
Croix, Il savait que bientôt son Heure serait là, l’Heure de la
Rédemption de tous les hommes tant aimés de Dieu. |
|
Cette fête de la Pâque,
avec Jésus, ne fut, décidément pas comme les autres. Jésus s’était
montré, avec les douze, encore plus aimant que d’ordinaire. À plusieurs
reprises Il les avait appelés : “Mes amis.” Il avait même insisté, en
précisant : “Je ne vous appelle pas serviteurs, mais amis...”
Pourquoi, ce soir, le terme que Jésus avait pourtant l’habitude
d’utiliser, prenait-il un sens nouveau, une intensité nouvelle, presque
une affection, une tendresse maternelle ?
Il est vrai que Jésus les
avait profondément bouleversés quand Il leur avait lavé les pieds...
Mais les façons de faire de Jésus n’étaient pas toujours celles de tout
le monde, et généralement, quand Jésus leur avait expliqué la raison de
ses gestes, ils se sentaient rassurés, plus aimants, plus proches de
leurs contemporains. Et ils commençaient même à aimer les pauvres que
jusqu’alors ils méprisaient un peu...
Maintenant, les apôtres
écoutaient leur Maître en silence : ils comprenaient que quelque chose
de grand se préparait. Et Jésus, leur redisait la parole qu’Il avait
déjà plusieurs fois prononcée : “Si le grain tombé à terre ne meurt
pas, il reste seul; mais s’il meurt, il porte du fruit en abondance.”
Jésus chanta avec eux le psaume 68 et les chants du Serviteur
souffrant d’Isaïe, puis Il se leva et rendit grâce au Père en Le
remerciant de l’avoir glorifié. Les apôtres faisant mine de se lever,
eux aussi, mais Jésus les fit asseoir. Il prit ensuite du pain qu’Il
rompit en disant : “Prenez, mangez-en tous. Mangez ce pain qui est
mon Corps livré pour vous.”
Les apôtres mangèrent le
pain que Jésus venait de bénir et de partager. Curieusement, ce pain,
pourtant bien ordinaire, leur brûlait le cœur d’un amour inconnu, d’un
amour presque douloureux tant il était intense. Jésus prit aussi la
coupe de vin qui était en face de Lui. Jésus se tourna de nouveau vers
le Père ; ses yeux étaient comme emplis de larmes. Il leva la coupe, la
présenta à ses disciples, et dit : “Buvez ce vin, ce vin de la
Nouvelle Alliance. Buvez ce vin qui est mon sang déjà versé pour vous et
pour la multitude des peuples. Dorénavant je ne boirai plus du fruit de
la vigne jusqu’à l’avènement du Royaume de Dieu. Mais vous, vous en
boirez, car vous ferez ce que je viens de faire, en mémoire de Moi.”
Les apôtres burent, sans
comprendre, mais ils étaient tellement subjugués, fascinés par les actes
de Jésus, qu’ils n’osaient même plus parler. L’Heure qu’ils vivaient
était celle de Jésus, ils le savaient. L’Heure était intense, mais ils
ne comprenaient pas encore ce qu’elle était vraiment, cette Heure que
Jésus avait désiré d’un si grand désir.
Jésus, Lui, savait. Il
savait que dans très peu de temps, son sang, tout son sang serait versé
pour le salut de tous les hommes. Jésus savait que la Croix, qu’Il
désirait tout en la redoutant, L’attendait maintenant, dans le Jardin
des Oliviers. Il fallait partir...
G |
Mystères douloureux
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L’Agonie de Jésus, c’est le
début de la Passion, c’est le prélude de la Croix. Jésus vient de
célébrer la Pâque avec ses apôtres. Il a même célébré deux Pâques:
l’ancienne, que les disciples connaissent bien, et la Nouvelle, à
laquelle ils n’ont pas compris grand’chose, sinon que la chair de Jésus
qu’ils devaient manger, c’est en réalité du pain... Du simple pain,
d’abord offert au Père en action de grâce, puis béni d’une manière
spéciale... Les apôtres ne savent pas encore très bien comment:
d’ailleurs tout a été si étrange durant cette soirée au cours de
laquelle Jésus s’était montré si tendre, si attentif, si humble, d’une
humilité qui avait même secoué ces hommes rudes.
Puis Jésus leur a
longuement parlé. Il leur a rappelé qu’Il devait les quitter, qu’Il
allait mourir. Pourtant tout est si calme ce soir, à Jérusalem. Rien
n’est à redouter, du moins pour l’immédiat. Voilà maintenant qu’Il les
emmène à Gethsémani. Quoi de plus normal ? Il faisait ça tous les soirs.
Tous les soirs Jésus leur apprenait à prier. Aujourd’hui, Il paraît
insister davantage ; mais eux, ils sont si fatigués après cette journée
éprouvante, que leurs yeux se ferment, comme malgré eux. Ce soir, à
Gethsémani, Jésus restera seul pour prier... Ce soir, Jésus n’aura pas
de compagnon, pas de consolateur... C’était écrit, car demain, c’est la
Croix.
Demain, veille du Grand
Sabbat, pour Jésus, ce sera la Croix, la croix de bois, la croix des
supplices infâmes. Mais ce soir, c’est une autre Croix qui attend Jésus,
c’est la Croix, de l’âme ; la crucifixion de son Coeur, le supplice de
son Esprit et la désolation de tout son être abandonné de tous, même du
Père. Car Jésus doit mourir seul: cela Il le sait, mais Il a peur.
Ce soir, c’est l’Heure de
Jésus, mais c’est aussi l’Heure des ténèbres, l’Heure de la suprême
tentation. C’est l’Heure de la Rédemption de tous les hommes, l’Heure
pour laquelle Jésus est venu sur terre. C’est l’Heure de la
Rédemption... Pour cela, pour la réaliser, Jésus a déjà tout donné, tout
accepté, toutes les souffrances et même la Croix: c’est le prix que
demande le Père pour le salut de tous les hommes... Tous ? Vraiment
tous ? Mais alors, que sont ces cohortes de damnés qui se présentent
devant les yeux de Jésus avant d’être précipitées en Enfer ?
Que sont ces foules de
damnés qui refusent son sacrifice ? Pourtant Jésus les aime, et Il a
tout fait pour les sauver. Pourquoi ce refus? Jésus a fait tout ce que
le Père voulait. Il voulait nous sauver tous... Et tous ceux-la qui ne
veulent pas. Son sacrifice aurait-il été vain ?
— Non, Père, pas ça ! crie
Jésus qui s’effondre dans sa sueur de sang. Non Père ! pas ça !...
Éloigne de moi ce calice... Mais si ce n’est pas possible, que Ta
Volonté soit faite.
Nous avons tous vécu dans
notre coeur de douloureuses heures d’agonie, de ces heures pires que le
plus terrible des supplices. Et nos heures d’agonie à nous, ne sont rien
auprès de l’Agonie de Jésus. Nos agonies ne sont qu’une goutte d’eau
dans un océan de détresse.
Jésus, nous contemplons ton
Agonie, ta sueur de sang, ta solitude, ton abandon, ta détresse. Toutes
nos souffrances, Tu les as prises, même les agonies de nos coeurs.
Jésus, en silence et pleins de reconnaissance, nous T’adorons. |
|
La Flagellation
La flagellation ! Supplice
horrible dont beaucoup de condamnés mouraient. La flagellation! Supplice
effroyable qu’il fallait arrêter à temps quand le supplicié devait
ensuite être crucifié, car on ne doit crucifier qu’un homme vivant. La
flagellation ! Punition dont on ne se remet pas, même si elle est
contrôlée. Et elle l’était contrôlée, ou du moins le nombre de coups
qu’il ne fallait pas dépasser.
Et Jésus dans tout çà ?
Jésus n’est pas encore condamné à mort. Il l’est pour les chefs de son
peuple, mais Pilate sait qu’Il est innocent, et la Loi romaine ne
condamne pas les innocents. Pilate veut sauver Jésus. Mais comment
faire ? Comment calmer cette meute hurlante de gens assoiffés de sang,
du sang de Jésus ?
Comment éviter l’émeute,
car l’empereur ne veut pas de révolte dans ses états ? Et Pilate est
dévoué à son Empereur...
Comment Pilate peut-il
faire ? Il y avait bien Hérode, mais Hérode s’est défilé! Pilate a une
idée : je vais Le faire flageller. Quand ce sera fini, l’homme sera dans
un si triste état qu’ils auront pitié de Lui ; et moi, je ne mettrai pas
à mort un innocent. Et personne ne pourra m’accuser...
On sait maintenant
parfaitement comment étaient constitués les fouets : des lanières à
l’extrémité desquelles étaient fixés des pointes de métal. Les lanières
s’enroulaient autour du corps et les pointes de métal accrochaient la
chair qui s’en allait par petits lambeaux. À chaque coup, une plaie, un
peu de chair arrachée. Combien de coups Jésus a-t-il reçus ? On ne le
sait pas exactement. Certains ont parlé de cinquante : c’était le
maximum autorisé, et on comprend pourquoi s’il fallait laisser l’homme
en vie. Après, c’était la mort.
Jésus n’est plus qu’une
plaie quand on lui ordonne de remettre ses vêtements. Jésus tient à
peine debout, Jésus n’est qu’une plaie, et Jésus doit ramasser sa
tunique, son manteau, et se rhabiller... Jésus sait que tout cela va
coller sur ses plaies, que ces vêtements ne vont plus faire qu’un avec
sa chair : ce qui lui reste de chair... Jésus sait aussi que dans deux
ou trois heures au plus, on devra les lui arracher, ces vêtements qui
sont devenus sa peau.
Jésus sait, et Jésus, tout
en titubant, obéit. Jésus, outre ses souffrances atroces doit, en plus,
affronter les moqueries des bourreaux sans pitié, sadiques et heureux de
faire souffrir l’Homme que les siens ont condamné ! l’Homme sans défense
qui ne dit pas un mot !
Jésus, cette souffrance est
trop intolérable. Jésus, le péché des hommes, de tous les hommes, y
compris le nôtre, Jésus, le péché est-il si grave aux yeux de Dieu que,
pour nous sauver, pour nous racheter, il ait fallu que Tu endures tout
cela ? Le péché est-il si grave qu’il blesse Dieu, qu’il blesse l’Amour
aussi mortellement ?
Jésus, nous Te demandons
pardon ! |
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Jésus, Tu viens à peine de
remettre ta tunique, Tu chancelles et Tu vas tomber. Alors, vite, on Te
fait asseoir sur le banc de pierre qui est là. Pas de dossier pour
T’appuyer : d’ailleurs, avec tes plaies Tu ne pourrais pas supporter le
contact d’un objet dur...
Les bourreaux Te
regardent : Tu n’es décidément pas un homme ordinaire. Tu n’as pas crié
pendant la flagellation, ne Te plains pas maintenant, qui es-Tu donc ?
Pendant un instant les bourreaux se taisent, mais rapidement ils ne
peuvent plus supporter ton regard si plein de compassion pour eux, comme
si les victimes, c’était eux. Comme si les malheureux, les condamnés,
c’était eux. Ton regard leur crie : “Pourquoi ? Quel mal vous ai-je
fait ? Ne savez-vous pas que Je vous aime ?”
Alors les bourreaux
détournent les yeux, puis ils s’éloignent un peu. Une autre équipe
arrive, une équipe fraîche comme l’on dit. Ils n’ont rien d’autre à
faire que de dire des sottises ou des insanités. Ils s’ennuient. Alors
l’un d’eux a une idée: “Il a dit qu’Il était Roi et qu’Il était
prophète : on va Le couronner ! Ces épines conviendront quand elles
seront tressées.”
L’homme enfile ses gants
d’uniforme, les gants de cuir des bourreaux pour ne pas se piquer :
dame, çà fait mal ces épines ! On couronne Jésus, sans ménagement : il
faut que ça tienne... Le sang coule: qu’importe. Puis on s’incline
devant le Condamné, cet étrange condamné qui ne se plaint pas, qui
continue à se taire : “Salut, Roi des juifs !” On Lui met un
bandeau sur yeux : “Allons! Fais le prophète ! Devine qui T’a
frappé !”
Car ces pauvres hommes,
bourreaux de leur métier, ont osé frapper Jésus, sur ses plaies. Douleur
atroce ; Jésus se tait. C’est le chemin de sa Passion, c’est son calice,
celui qu’Il devait boire... Jésus le connaissait ce calice, Jésus
l’avait désiré, d’un grand désir, car c’était le calice de notre
Rédemption.
Jésus n’a plus l’aspect
d’un homme, c’est “un ver”, une plaie. Nous l’avions pris pour un
malfaiteur, un banni de Dieu, mais c’était nos péchés qu’Il portait !
Jésus avait pris nos péchés, tous nos péchés. Il s’était fait péché pour
nous sauver et nous Le méprisions. Pourtant, Il était devenu “nous”, les
hommes pécheurs. “Voici l’Homme !” dira Pilate en Le présentant à
la foule des juifs...
Et c’est “l’Homme”
l’Homme-Roi de la Création que les hommes vont envoyer à la mort, et la
mort sur une croix. |
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C’est “l’Homme” que
les hommes vont envoyer à la mort, et la mort sur une croix. Il faut que
Jésus soit crucifié... Pilate libérera Barrabas, car Jésus doit mourir,
et mourir sur la Croix. Dans l’état où Il est, Jésus serait mort quand
même, mais c’est sur la Croix qu’Il doit mourir, pour l’exemple :
“Crucifie-Le !”
— Crucifierais-je votre
Roi !
— Nous n’avons d’autre Roi
que César !
— Mais cet homme n’a rien
fait !
— Crucifie-Le ! Crucifie-Le !
Jésus est chargé de sa
Croix : les procès étaient vite terminés, à cette époque, et les
condamnations à mort exécutées immédiatement. Le Roi des juifs, le Roi
du monde est condamné à mort. Le Verbe de Dieu avait trop parlé. Il
avait trop parlé de Dieu, de l’Amour de Dieu, de l’Amour du prochain. Il
avait osé rappeler le grand Commandement qu’on avait un peu oublié, au
fil du temps: “Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de
tout ton esprit... et tu aimeras ton prochain comme toi-même.”
Vraiment est Homme est
dangereux : il a assez parlé, maintenant Il doit se taire. Il faut Le
crucifier. Les chefs du peuple juif l’exigent. Si Pilate ne crucifie pas
l’Homme, il sera dénoncé auprès de l’Empereur comme traître...
Pilate cède. Après tout, le
sang de l’Homme ne retombera pas sur lui...
Et Pilate s’en lave les
mains... ce n’est plus son affaire.
Jésus va continuer le long
Chemin de sa Passion, le Chemin de la Croix. Jésus est condamné, mais Il
est innocent. Pilate le sait et il va le rappeler au monde entier : sur
l’écriteau qui porte le motif de la condamnation il fera écrire :
“Jésus de Nazareth, Roi des juifs”. Ainsi toutes les nations, et
tous les siècles, verront le salut de Dieu.
Jésus de Nazareth, Jésus le
Roi des juifs est chargé de sa Croix. Jésus de Nazareth avance sur la
voix douloureuse. Jésus rencontre sa Mère et pleure. Jésus rencontre
Véronique et imprime l’image de son visage sur le linge qui avait essuyé
sa face souillée de sang, de larmes et de crachats. Jésus tombe
plusieurs fois, car Il veut nous montrer que le chemin de la sainteté
est un chemin de croix, un long chemin toujours semé d’embûches.
Jésus, le Créateur du
Monde, le Verbe de Dieu, Jésus le Tout-Puissant Roi du monde, Jésus qui
n’en peut plus, Jésus qui va mourir, Jésus se laisse aider par un pauvre
homme, émigré de Cyrène... Un pauvre qui aurait bien voulu ne pas se
trouver sur le chemin de Dieu en cet instant terrible. Cet instant qui
deviendra son salut et sa gloire, à lui aussi, pauvre Simon de Cyrène...
Jésus a parcouru le long
chemin. Jésus est arrivé enfin sur le Calvaire. On va Le crucifier.
Notre Rédemption est proche. |
|
Jésus a parcouru le long
Chemin de Croix. Jésus a atteint le Calvaire. On prépare la croix, on
dépouille Jésus de ses vêtements... Jésus aura connu toutes les
souffrances et toutes les humiliations. La couronne d’épines a été
arrachée quand on a retiré la tunique, la tunique sans couture.
Qu’importe, on la remet. Jésus s’allonge sur la croix. Quel repos pour
ce corps fatigué! Mais les épines de la couronne, ô mon Dieu, comme
elles s’enfoncent sur le front de Jésus et sur toute sa tête : Marie
étouffe un cri de douleur. Jésus se tait toujours.
C’est l’instant de la
crucifixion. On éloigne Marie et Jean de quelques pas. On étire les
membres de Jésus... Tiens! les bras de la croix sont un peu trop longs.
Pourtant il faut atteindre les trous préparés pour les clous, ces gros
clous mal dégrossis, mal polis, et qu’on ne pourrait pas faire pénétrer
dans le bois si une alvéole n’avait pas été creusée à l’avance. Alors,
on tire sur les bras de Jésus, les muscles se déchirent et les tendons
s’arrachent, les os se déboîtent. Il faut tirer encore, et encore
déchirer... Sont-ils donc sans pitié ces bourreaux de métier ? Jésus
pleure et Marie gémit... Notre Rédemption coûte cher à Celui et à celle
qui doivent l’assumer.
Maintenant on peut clouer.
On a placé la pointe du clou sur les osselets du poignet, là où la
résistance à l’enfoncement du clou est la moindre. Mais le nerf médian
sera touché, voire sectionné, et la douleur est atroce, horrible,
intolérable. Jésus réprime un cri mais ses larmes jaillissent, à flots.
Quand un bras est fixé sur
le bois, on passe à l’autre, on tire encore, et le scénario recommence.
Le corps de Jésus se tord, mais ce n’est pas fini : maintenant, les
pieds.
On a cloué les pieds, non
sans mal, — non sans mal pour les bourreaux —, car la souffrance du
crucifié, çà n’a pas d’importance, çà fait partie du spectacle. Au
moins, pour cette fois, les spectateurs et les badauds en ont pour leur
argent !
C’est le moment de dresser
la croix : rude travail pour les bourreaux. Enfin le pied de la croix
tombe dans son réceptacle. C’est bien, tout est en place : la croix est
verticale, solidement arrimée, et le crucifié est toujours en vie. Tout
est dans l’ordre: les bourreaux et les soldats auront leur prime de
bonne fin. Ils peuvent s’en aller : ils ont bien travaillé !
Ne resteront au pied de la
Croix que la famille et quelques soldats pour monter la garde : on ne
sait jamais...
Pendant trois heures Jésus
agonisera. Pendant ses trois dernières heures, Jésus achèvera son Œuvre,
celle pour laquelle Il était venu chez les hommes...
Jésus va mourir. La nature
le sait et se met en deuil. Les ténèbres commencent à s’étendre sur la
terre. Jésus va mourir, dans un grand cri : son Œuvre est achevée, la
volonté du Père est enfin accomplie.
Jésus meurt, Jésus est
mort. Il fait nuit...
Non ! Jésus n’est pas mort.
Dans trois jours, Il ressuscitera !
G |
Mystères glorieux
|
La Résurrection de Jésus
Jésus est mort, la veille
du grand Sabbat. Joseph d’Arimatie et Nicodème ont procédé à une
toilette sommaire du Corps qu’ils ont ensuite enseveli et abandonné dans
le tombeau.
C’est l’aurore du troisième
jour. Les femmes pétrissent les aromates afin de procéder à
l’embaumement du Corps de Jésus : c’était impossible avant. Le jour de
la mort de Jésus, le Sabbat allait commencer ; Joseph et Nicodème
avaient paré au plus pressé.
Ce matin du troisième jour,
les femmes sont prêtes : elles sortent, seules, car les hommes, les
apôtres qui sont revenus humbles et confus auprès de Marie sont
totalement anéantis, brisés dans leur douleur et leur humiliation,
l’humiliation d’avoir fui, le seul jour où Jésus avait eu besoin
d’eux...
Les femmes sont seules
quand elles arrivent dans le jardin du tombeau. elles s’inquiètent : qui
leur roulera la pierre qui ferme l’entrée ? Les gardes accepteront-ils
de leur rendre ce service ? Mais que se passe-t-il ? La terre tremble :
un brusque et violent tremblement de terre. Les gardes crient et
s’enfuient. Le soleil est soudain resplendissant, et les arbres du
jardin sont tous en fleurs: la nature rit et chante. Les femmes ont de
plus en plus peur, d’autant plus que la pierre est déplacée. Et le
tombeau est vide ! Marie-Madeleine quitte le groupe et part annoncer aux
disciples que le tombeau est vide, puis elle revient. Pendant ce temps
les autres femmes, désemparées, pleurent... Mais voici deux hommes, en
vêtements blancs, devant elles :
— Vous cherchez Jésus de
Nazareth. Il n’est pas ici, Il est ressuscité comme Il l’avait dit.
Venez voir l’endroit où on l’avait déposé. Vite, allez le dire à ses
disciples.
Les femmes remplies de
crainte et de joie, quittent le tombeau vide. Et voici que Jésus est là,
venant à leur rencontre...
— Ne craignez pas, leur dit
Jésus. Allez annoncer à mes frères qu’ils se rendent en Galilée : c’est
là qu’ils me verront.
Marie de Magdala est
repartie en courant. Les apôtres sont bien sceptiques: radotages de
femmes... Pourtant Pierre et Jean se décident et vont, eux aussi,
jusqu’au tombeau qu’ils trouveront bien vide. Mais ils ne virent pas
Jésus. Pendant ce temps, Marie de Magdala se tenait près du tombeau en
pleurant. On connaît la scène qui suit lorsque Jésus lui apparaît.
Marie-Madeleine se précipite pour lui baiser ses pieds, Mais Jésus
l’éloigne :
— Ne me touche pas, car je
ne suis pas encore monté vers le Père.
Jésus se montra à de
nombreux autres disciples, mais une constante demeure lors de ces
premières apparitions : chaque fois que les disciples reconnaissent
Jésus ressuscité, ce dernier disparaît presque instantanément. Jésus
laisse les coeurs brûlant d’amour ; Jésus est là, présent, tout près,
mais les yeux humains ne Le voient plus. La Croix reste présente même
après la Résurrection. La Croix sera toujours là, avec nous, car la
Croix, c’est le signe visible de la victoire du Christ, de la victoire
de Jésus. La Croix, c’est notre victoire. |
|
Les apôtres exultent. Les
apôtres ont repris goût à la vie. Jésus est souvent là, avec eux. Certes
pas comme avant. Jésus est devenu imprévisible : au moment où on ne
L’attend pas, il est là, soudain, au milieu d’eux. Jésus les enseigne,
Il mange avec eux, Il se laisse toucher, puis soudain Il disparaît.
Finalement les apôtres se sont habitués à cette nouvelle vie. Les
apôtres sont heureux...
Aujourd’hui Jésus est là,
avec eux. Jésus parle avec tant d’amour. Jésus est si tendre, et
curieusement, aujourd’hui Il ne part pas. Il tient bien quelques propos
étranges : “Il vous est bon que Je m’en aille... mais je ne vous
laisserai pas orphelins. Si je ne m’en vais pas, le Paraclet,
l’Esprit-Saint ne viendra pas à vous. Quand Il sera là, avec vous, Il
vous enseignera toutes choses.”
Comme d’habitude, les
apôtres ne comprennent pas grand’chose : “Est-ce maintenant que Tu
vas rétablir le Royaume d’Israël ?” Intérieurement Jésus soupire,
puis, comme Il le faisait autrefois, Il sort. Les apôtres suivent, comme
avant, avant les heures si douloureuses de la Croix. L’ancienne vie
va-t-elle reprendre ?
Comme autrefois Jésus prend
la direction de la montagne qu’Il gravit. Il attend ses apôtres un peu
essoufflés : Jésus a marché bien vite aujourd’hui... Jésus adresse à ses
disciples des paroles pleines de tendresse, comme s’il s’agissait d’un
adieu. Pourtant, Jésus est bien ressuscité, et vivant. Et les disciples
ont tellement besoin de Lui, de sa présence, de son amour, de sa parole.
Jésus semble quitter le
sol. Il s’élève dans le ciel, comme s’Il n’avait plus de poids... Un
nuée le dérobe aux yeux écarquillés des disciples présents. Deux hommes
vêtus de blanc se présentent :
— Que faites-vous là à
regarder le ciel ?
Quelle question !!!... ils
attendent que Jésus reviennent.
— Retournez à Jérusalem.
Jésus qui vient d’être enlevé reviendra de la même manière que vous
L’avez vu s’en aller vers le ciel.
Les apôtres se
souviennent : Jésus avait dit qu’ils devaient attendre l’Esprit qu’Il
leur enverrait. Mais quand, mais comment? Et Jésus, quand
reviendra-t-Il ?
Les apôtres sont de nouveau
seuls et tristes. Ils passent le plus de temps possible avec Marie qui
les console en leur racontant la vie de Jésus, celle qui fut la sienne
pendant trente ans, avant sa vie publique : sa naissance, l’exil en
Égypte, la vie à Nazareth, sa majorité et sa fugue au Temple... Et son
travail de charpentier à Nazareth. Quel excellent professionnel ! Et
puis, Jésus était si bon, si attentif, si serviable, et si doux, et si
humble.
Marie pleure parfois en
évoquant ces souvenirs. Les apôtres boivent ses paroles. Mais ils sont
toujours tristes. L’ombre de la Croix semble de nouveau planer au-dessus
d’eux. Depuis que Jésus est parti, la Croix est comme revenue... De
plus, les apôtres s’ennuient, et se demandent ce qu’ils vont devenir.
Ils s’inquiètent de l’avenir, ils s’inquiètent pour eux-mêmes. Ils ne
savent pas, ils ne savent plus... Marie aussi attend : elle est si
heureuse de recevoir bientôt l’Esprit, l’Époux divin qui donna la vie à
son enfant béni. Mais elle a parfois le cœur un peu gros, surtout quand
elle repense à la Passion de son Fils, passion qui fut aussi la sienne.
Mais elle attend avec toute sa foi, une foi à déplacer les montagnes.
Car elle est sûre Marie, son Fils ne ment jamais. |
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La Pentecôte
Voici maintenant dix jours
que Jésus est parti, qu’Il s’est élevé au Ciel. Les apôtres, “les
douze”, car Pierre a pris l’initiative de faire remplacer Judas le
traître par Mathias, les apôtres sont regroupés autour de Marie : là,
avec elle, ils redoutent moins les juifs, ils sont plus rassurés. Ils
parlent, ils évoquent encore la Croix, et leurs péchés... Pierre pleure
toujours en évoquant son reniement. Thomas aussi, qui mit si longtemps à
croire en la Résurrection de Jésus. Pauvre Thomas qui n’arrive pas à
expliquer son incrédulité !
Jean évoque l’Amour de
Jésus et essuie une larme en pensant à la dernière Cène et à
l’Eucharistie. Mais Matthieu, plus réaliste, lance soudain :
— L’Esprit-Saint, le
Consolateur que Jésus nous a demandé d’attendre, quand va-t-Il venir ?
— Quand ? Mais maintenant
Matthieu.
L’Esprit, feu de l’Amour de
Dieu, de l’Amour du Père et du Fils, l’Esprit est là... Il rassure et
enflamme les coeurs et les esprits défaillants. L’Esprit est là, les
apôtres le savent... Maintenant il faut sortir, il faut aller enseigner
toutes les nations. Il faut aller les baptiser toutes au nom du Père, et
du Fils, et du Saint-Esprit...
Et les apôtres vont, ils
n’ont plus peur ; ils parlent, ils expliquent, et tout le monde les
comprend: la barrière des langues est tombée...
Les apôtres n’ont plus
peur. Les apôtres ont compris l’enseignement de Jésus. Les béatitudes
qui les avaient tellement troublés sont devenues lumineuses, même celles
qui disent : ”Heureux ceux qui souffrent persécution pour la
justice : le Royaume des Cieux est à eux. Heureux serez-vous lorsqu’on
vous insultera, qu’on vous persécutera et qu’on dira faussement toute
sorte de mal à cause de Moi. Réjouissez-vous alors et tressaillez
d’allégresse, car votre récompense sera grande dans les Cieux.”
Les apôtres n’ont plus
peur. Pourtant ils ont compris que de nombreuses persécutions les
attendent, et qu’ils seront probablement mis à mort. Ils auront même à
boire le calice que Jésus a bu, “car les serviteurs ne sont pas
au-dessus du Maître.”
L’Esprit pousse les
disciples à suivre Jésus. L’Église, autour de Marie, peu à peu se
construit. L’Esprit ouvre les cœurs timorés et frileux et en fait des
héros. Les persécutions ne vont pas tarder à décimer l’Église naissante,
car le Chemin de Jésus, c’est le Chemin de la Croix : “Celui qui veut
venir après Moi, qu’il prenne sa Croix, et qu’il me suive !” Ces
paroles n’ont plus rien d’obscur et les chrétiens de tous les temps et
de toutes les races, emplis de l’Esprit-Saint, sauront donner leur vie
pour témoigner de la Résurrection du Christ. |
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Les
années ont passé. Malgré les difficultés, les contradictions ou les
persécutions, l’Église naissante se fortifie sous la douce mais ferme
protection de Marie que les apôtres consultent souvent.
Marie
habite avec Jean qui l’aime comme sa propre mère. Marie accueille tous
ceux qui viennent la trouver pour parler de Jésus ou susciter une
précision dans les paroles que Jésus prononça autrefois. Marie est
toujours disponible, toujours prête à soutenir des énergies parfois
défaillantes. Marie reçoit aussi l’Eucharistie des mains de Saint Jean.
Alors Marie retrouve son Jésus, et, pendant de longs moments, revit un
amoureux Cœur à cœur avec son Fils Bien-Aimé. De temps en temps Marie
sort de leur coffre quelques souvenirs de son Jésus, et soupire
longuement. Puis elle range le tout, et sa vie continue...
Marie
a toujours obéi à Dieu. Marie continue à obéir et à faire la volonté de
son Seigneur. Marie poursuit la tâche qui lui est proposée par le
Seigneur. Elle la fait, cette tâche, sans jamais se plaindre, et même
avec joie. Mais Marie se meurt d’amour, pour le Père, pour son Fils,
pour l’Esprit d’Amour du Père et du Fils. Toujours soumise à son
Seigneur, elle a d’abord donné au Christ son Corps d’homme. Maintenant
elle enfante l’Église, le Corps mystique du Christ... Lentement,
patiemment, en union avec l’Esprit-Saint et sous sa mouvance, elle
construit le Pont qui relie les hommes à Dieu leur créateur.
Mais
Marie se meurt d’amour. Aujourd’hui, elle se sent encore plus proche de
son Fils que d’habitude. Son cœur semble éclater sous la puissance de
l’Amour. Le corps de Marie est comme incapable de supporter la puissance
de la divinité qui l’envahit. Alors Marie s’assoit sur le bord de son
lit. Instinctivement elle s’allonge et elle s’endort. Et son esprit, sa
pensée et son cœur rejoignent son Fils...
Quand
Saint Jean reviendra, un peu plus tard, il trouvera la maison vide.
Personne ne vit Marie sortir, même les plus proches voisins qui
l’avaient aperçue quelques instants auparavant. Pourtant Marie n’est
plus là !
Marie
est montée au Ciel, avec son corps, avec son âme. L’Église l’affirme et
c’est un dogme de foi... Marie est au Ciel, avec Dieu, avec son divin
Fils. Marie est infiniment heureuse, mais elle continuera discrètement
sa tâche de Mère de l’Église, Marie n’abandonnera jamais les enfants que
Jésus lui a confiés.
Marie
n’abandonnera jamais les enfants que Jésus lui a confiés, et
heureusement ! Heureusement car les apôtres sont tristes. Tous les
disciples se sentent un peu désemparés... Mais comme ils ont pleinement
compris la parole de Jésus : “Celui qui veut venir après Moi, qu’il
prenne sa croix, et qu’il me suive,” dans la foi ils continueront.
Malgré toutes les difficultés et les incompréhensions, ils annonceront
la Bonne Nouvelle. À temps, et à contre temps.
Les
disciples sont un peu tristes. Ils savent que, pour eux, la voie
douloureuse commence ; mais ils sont prêts, prêts à prendre leur
croix... et à prêcher l’Évangile, la Bonne Nouvelle, à toutes les
nations. |
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Marie est montée au Ciel.
Marie a rencontré le Père et retrouvé le Fils. Le Fils étreint sa Mère
d’une étreinte d’Amour infini, et l’Esprit-Saint, l’Esprit jailli de
l’Amour du Père et du Fils, enveloppe la Fille Bien-Aimée, la Mère
bienheureuse, l’Épouse toujours fidèle. Marie, la créature de Dieu la
plus parfaite, la plus sainte qui soit, Marie est comme au sein de la
Trinité.
Marie découvre la Trinité
Sainte, le Dieu Unique et Trine. Marie est éblouie, émerveillée,
submergée de l’Amour. Mais au Ciel, on ne meurt pas d’Amour, on en vit,
et Marie vit de l’Amour. De l’Amour de Dieu trois fois saint.
Marie est comme perdue dans
l’Amour de la Trinité... Dieu est satisfait, mais son Œuvre n’est pas
achevée. Sur la terre, il y a encore des milliards d’hommes qui ont
besoin d’une Mère pour les ramener à Dieu, pour les ramener à son Fils,
pour les délivrer des griffes du Dragon et les sauver...
Une Femme doit écraser la
tête du Serpent : c’est écrit, et l’Écriture, c’est la Parole de Dieu,
c’est aussi sa volonté. Or la Femme de l’Apocalypse, c’est elle, Marie,
Mère de Dieu, c’est-à-dire Mère du Corps humain de Jésus, et Mère de
l’Église.
Alors Dieu confie à Marie
une autre mission : “Veut-elle quitter le Ciel, de temps en temps, pour
revenir sur terre et aider les enfants de Dieu à abandonner leur vie de
péchés et accepter Dieu et son Amour ? Et Marie renouvelle son “FIAT”.
Marie reviendra sur terre, parmi nous. Certains la verront, comme à
Lourdes, ou à Fatima, et ailleurs...
Le Ciel est ébloui,
émerveillé par la sainteté de Marie, émerveillé de son Amour. Les anges
s’émerveillent et mêlent dans leurs chants les louanges dues à Dieu et
les louanges dues à Marie, créature comme eux, mais de la race d’Adam
donc plus sainte car plus fragile qu’eux. Les anges louent la créature
immensément sainte et fille du Père. Le Ciel s’est de nouveau ému, le
Ciel est en joie. Jamais le Ciel n’avait connu un tel bonheur...
Alors, comme pour la
remercier, le Ciel émerveillé couronna Marie : Reine des anges, Reine
des hommes, Reine du Ciel et de la Terre...
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