

SOMMAIRE
Seigneur,
donnez-nous des saints! -
"Votre Père qui est aux cieux ne veut pas qu'un seul de ces petits soit perdu"
- Le très Saint-Sacrement de l’autel
-
Eucharistie, symbole d'union -
Tout faire remonter
à Dieu... - Comment
passer la journée saintement - Humilité et simplicité
     
Pour la page (ou plutôt les pages) du
“Lieu
de Prière”, nous pensons – et une collaboratrice nous l'a aussi suggéré – qu'il
serait bon et opportun d'y inclure également quelques pages de méditations.
Les textes que nous allons inclure ici,
seront les plus divers – peut-être même inattendus, pour certains – car ils
devront s'adapter à toutes les sensibilités et aux besoins de chacun en matière
de réflexion spirituelle.
La méditation ou réflexion spirituelle a pour
but d'amener l'âme près de Dieu, dans un cœur à cœur secret et amoureux, comme
celui de l'époux avec l'épouse.
Nous souhaitons de tout cœur, que les textes
choisis puissent contribuer à cet échange amoureux entre l'âme et Dieu !...

«Le cœur de chaque homme est comme une grande salle ; au
centre, il y a Dieu, il y a l’Amour. Mais l’Amour, qui est notre Vie, ne prendra
toute la place en nous que si, d’abord, nous fermons hermétiquement la porte qui
s’ouvre sur le mal, les ténèbres extérieures, les mauvaises tendances nées du
péché originel et de nos propres péchés. Puis il faut mettre un peu de lumière
et commencer à aérer : cela se réalise en retirant quelques-unes des tentures
qui camouflent la fenêtre centrale derrière laquelle se trouve la lumière.
Ensuite, pour que l’Amour puisse entrer dans nos cœurs et
y être à l’aise, il faut faire le ménage, car le désordre n’est pas digne de
Dieu, pas digne de l’Amour.
Quand le ménage sera bien fait, la grande salle de nos
cœurs sera presque prête à accueillir l’Amour. Il restera encore quelques
rideaux à retirer, mais déjà la lumière et la chaleur de l’Amour pénètreront à
flots. Mais la lumière de Dieu, la lumière de l’Amour, nous fera encore
découvrir quelques défauts cachés, quelques objets mal rangés et sur les
tapisseries des murs de la salle, des plis malencontreux. Il faudra arranger
tout cela... Alors la grande salle du cœur sera entièrement pleine de Dieu.
Est-ce cela la sainteté?
Jésus, faites de nous des saints : nous Vous le demandons,
car c’est votre désir que nous soyons parfaits comme le Père céleste est
parfait. Jésus, Vous nous appelez tous à la sainteté, tous, sans exception.
Jésus, nous sommes tous vos privilégiés quand nous sommes dans votre volonté, et
votre volonté est douce, comme votre fardeau et votre joug sont doux et légers.
Jésus faites de nous des saints, des saints avec qui Vous sauverez le monde.
Jésus, dans nos pays occidentaux, nos cœurs sont sales, ou
plutôt la grande salle de nos cœurs, cette salle qui doit Vous accueillir, est
sale. Nous vivons dans des salles obscures, des salles encombrées et sales.
Jésus, dans nos pays, nous vivons dans des salles sans air, empuanties, sans
fraîcheur et sans joie. Jésus, dans notre France nous vivons dans des salles
polluées, polluées par le péché, par le mal, par l’ignorance et par la peur.
Jésus, vos enfants vivent dans des salles infectées de maladies ignobles, de
microbes mortels. Où sont tes saints, Jésus, dans nos pays perdus?
Où sont tes saints, Jésus, dans nos pays perdus? Il y en
a, c’est sûr, mais nous ne les voyons plus. Où sont tes saints, Jésus, dans nos
pays perdus? Pourquoi les caches-Tu? Pourquoi, Jésus, ne nous montres-Tu pas tes
Thérèses, tes Dom Bosco, tes François, tous tes François. Je sais Jésus que Tu
as toujours des saints, mais pourquoi les caches-Tu? Il y en a, dit-on, mais où
les as-Tu mis? Tu en prépares, dit-on aussi... C’est bien, mais s’il Te plaît,
Jésus, hâte-Toi de les achever, de les fignoler! Hâte-Toi, Jésus, de nous donner
des saints, les saints dont nous avons besoin.
Jésus, donne-nous des saints, des saints pour aujourd’hui,
l’aujourd’hui de notre temps à nous. Hâte-Toi, Jésus, Tu vois, nous périssons !»
Paulette Leblanc "Dieu est Quelqu'un".

«Viens, Seigneur Jésus, cherche ton serviteur ; cherche ta
brebis fatiguée ; viens, berger... Pendant que tu t'attardes sur les montagnes,
voilà que ta brebis erre : laisse donc les quatre-vingt-dix-neuf autres qui sont
tiennes et viens chercher l'unique qui s'est égarée. Viens, sans te faire aider,
sans te faire annoncer ; c'est toi maintenant que j'attends. Ne prends pas de
fouet, prends ton amour ; viens avec la douceur de ton Esprit. N'hésite pas à
laisser sur les montagnes ces quatre-vingt-dix-neuf brebis qui sont tiennes ;
sur les sommets où tu les a mises, les loups n'ont point d'accès... Viens à moi,
qui me suis égaré loin des troupeaux d'en-haut, car tu m'avais mis là moi aussi,
mais les loups de la nuit m'ont fait quitter tes bergeries.
Cherche-moi, Seigneur, puisque ma prière te cherche.
Cherche-moi, trouve-moi, relève-moi, porte-moi ! Celui que tu cherches tu peux
le trouver, celui que tu trouves, daigne le relever, et celui que tu relèves,
pose-le sur tes épaules. Ce fardeau de ton amour, il ne t'est jamais à charge,
et tu te fais sans lassitude le péager de la justice. Viens donc, Seigneur, car
s'il est vrai que j'erre, « je n'ai pas oublié ta parole » (cf Ps 119/118), et
je garde l'espoir du remède. Viens, Seigneur, tu es seul à pouvoir encore
appeler ta brebis perdue, et aux autres que tu vas laisser, tu ne feras aucune
peine ; elles aussi seront contentes de voir revenir le pécheur. Viens, il y
aura salut sur la terre et il y aura joie dans le ciel (Lc 15,7).
N'envoie pas tes petits serviteurs, n'envoie pas de
mercenaires, viens chercher ta brebis toi-même. Relève-moi dans cette chair qui
avec Adam est tombée. Reconnais en moi par ce geste, non l'enfant d’Ève mais le
fils de Marie, vierge pure, vierge par grâce, sans aucun soupçon de péché ; puis
porte-moi jusque sur ta croix, elle est le salut des errants, le seul repos des
fatigués, l'unique vie de tous ceux qui meurent».
Saint Ambroise de Milan, "Commentaire
du Ps 118, 22, 27-30 ; CSEL 62, 502-504"

«Parlons un moment du sacrement de l'amour, parlons de
l'Eucharistie.
C'est lui qui provoque dans l'âme la prière ardente ;
c'est lui qui réveille la vertu d'impétration, et la puissance d'arracher à
Dieu, c'est lui qui creuse l'abîme de l'humilité ; c'est lui qui allume les
flammes de l'amour. J'ai, non la pensée vague, mais la certitude absolue, que si
une âme voyait et contemplait quelqu'une des splendeurs intimes du sacrement de
l'autel, elle prendrait feu, car elle verrait l'amour divin. Il me semble que
ceux qui offrent le sacrifice, ou qui y prennent part, devraient méditer
profondément sur la vérité profonde du mystère trois fois saint, qu'il ne faut
pas marcher au pas de course dans cette contemplation, mais demeurer immobile,
fixe, enfoncé, absorbé, abîmé. Quoique les mystères du sacrement soient
absolument ineffables, je vais tâcher de présenter sept considérations qui
doivent être méditées en détail et une à une.
Ce mystère est absolument nouveau, absolument admirable,
absolument supérieur à la raison. Il fut annoncé d'avance, comme nous le voyons
dans l'Écriture ; mais s'il est ancien quant à la figure, il est nouveau quant à
l'accomplissement, quant à la réalité. Il est certain que par la vertu des
paroles consécratrices, l'Homme-Dieu changea le pain et le vin en son corps et
en son sang ; il est certain que le prêtre, son ministre, accomplit à l'autel,
en vertu du pouvoir qu'il a reçu, le même acte de puissance.
Quand il prononce sur le pain et le vin les paroles de la
consécration, ces matières sont transsubstantiées dans le vrai corps et le vrai
sang de l'Homme-Dieu. Il reste la couleur du pain et du vin, leur saveur, leur
apparence, leurs accidents ; mais ces accidents ne portent pas sur le corps de
Jésus-Christ, ils portent sur eux-mêmes, la puissance divine leur ayant donné
des ordres supérieurs à leur nature. La couleur est donc ici en elle-même, la
saveur en elle-même, la blancheur en elle-même: chaque qualité détachée de toute
substance porte sur elle-même. Voilà en vérité la grande innovation qu'a faite
le bras de la sagesse, armé de puissance et de bonté : le corps et le sang du
christ poursuit dans ses élus, après la communion, la grande nouveauté, et
accomplit l'inconnu. Or, en face du sacrement, que nul ne s'étonne : avez-vous
mesuré la toute-puissance ? Sur tant d'autels à la fois, en deçà et au delà de
la mer, ici et là, ailleurs encore ! Oh ! que personne, mes enfants, n'ait
l'audace de s'étonner, car il a dit lui-même :
"Je vous suis incompréhensible ; je suis Dieu, j'agis
sans vous, et le mot impossible n'a pas de sens pour moi. J'aurais pu vous faire
capables de comprendre ; j'ai mieux aimé vous laisser le mérite de la foi :
croyez et ne doutez pas" ».
Bse Angèle de Foligno "Visions", chap. 66.

«Parce qu'il a souffert pour nous, il a recommandé à notre
vénération son corps et son sang dans ce sacrement. D'ailleurs nous sommes
nous-mêmes devenus son corps, et par sa miséricorde nous. recevons dé lui ce que
nous sommes. Rappelez vos souvenirs, car vous n’avez pas toujours été. Vous avez
donc reçu an être nouveau ; on vous a apportés sur l'aire sacrée, vous y avez
été foulés par les boeufs, en d'autres termes, par ceux qui annoncent
l'Évangile ; pendant qu'on prolongeait votre catéchuménat, on vous conservait au
grenier ; après vous avoir fait inscrire, vous avez commencé en quelque sorte à
être moulus sous le poids des jeûnes et des exorcismes ; puis vous vous êtes
approchés de l'eau sainte, vous en avez été pénétrés et vous êtes devenus comme
une pâte qu'a fait cuire ensuite la chaleur du Saint-Esprit, et c'est ainsi que
vous êtes devenus un pain sacré. Voilà ce que vous avez reçu.
De même que vous voyez l'unité dans ce qui s'est accompli
pour vous, ainsi soyez vin, en vous aimant, en conservant une même foi, une même
espérance, une indivisible charité. Les hérétiques, en recevant ce mystère,
reçoivent ce qui les condamne, puisqu'ils recherchent la division, au lieu que
ce pain est un symbole d'unité. Ainsi en est-il du vin;. malgré la multiplicité
des raisins qui ont servi à le former, il est un aussi, il est un avec ses
parfums dans le calice, après avoir été foulé sous le pressoir. Vous également,
après avoir passé par tant de jeûnes, par tant de travaux, par l'humiliation et
le brisement du coeur, vous êtes comme entrés au nom du Christ dans le divin
calice; et vous êtes là, placés sur la table, contenus dans la coupe sainte;
Vous y êtes avec nous, puisque nous mangeons et buvons ensemble, puisque
ensemble nous vivons».
Saint Augustin d'Hippone, "Sermons", n° 229.

«La source des fontaines et des fleuves, c'est la mer
; et la source des vertus et des sciences, est notre Seigneur Jésus-Christ.
Car, qui est le Seigneur des vertus, sinon le roi de gloire ? Il est encore
le Seigneur des sciences, selon le cantique d'Anne la prophétesse (Reg. II,
3). La continence de la chair, la pureté de cœur, la rectitude de la
volonté, procèdent de celte source divine. C'est peu, mais la vivacité de
l'esprit, la grâce de la parole, la sainteté des moeurs ont la même source.
C'est de là que les discours de la science et de la sagesse tirent leur
origine. Car tous les trésors de la sagesse et de la science y sont
renfermés (Col. 11, 3). Que dirai-je des conseils purs, des jugements
équitables, et des saints désirs, ne sont-ce pas encore des ruisseaux de
cette source ? Si toutes les eaux retournent sans cesse à la mer par des
conduits cachés et souterrains, afin d'en sortir ensuite par un cours
perpétuel et infatigable pour servir à l'usage des hommes, pourquoi ces
ruisseaux spirituels ne retourneront-ils pas aussi à leur propre source,
sans intermittence et sans diminution, pour ne cesser point d'arroser le
champ de nos âmes ? Que les fleuves des grâces retournent au lieu d'où ils
partent, pour couler de nouveau. Que cet écoulement céleste remonte à son
principe, peur se répandre ensuite sur la terre avec plus d'abondance.
Comment l'entendez-vous, me dira-t-on ? Je l'entends selon ces paroles de
l'Apôtre : "Rendant des actions de grâces à Dieu en toutes choses" (I. Thess.
V, 18). Tout ce que vous croyez avoir de sagesse et de vertu, attribuez-le à
la vertu et à la sagesse de Dieu, qui est Jésus-Christ.
Et qui serait assez fou, dites-vous, pour présumer les
tenir d'ailleurs ? Personne assurément, et le Pharisien même rend grâces à
Dieu (Luc. XVIII, 1). Néanmoins Dieu ne le loue pas de sa justice ; et cette
action de grâces, si vous vous souvenez bien de l'Évangile, ne le lui rend
pas agréable. Pourquoi ? C'est que quelque dévotion qui paraisse au dehors
cela ne suffit pas pour excuser l'enflure du cœur devant celui qui voit de
loin ceux qui s'élèvent par l'orgueil (Ps. CXXXVII, 6). On ne se moque pas
de Dieu, ô Pharisien. Croyez-vous avoir quelque chose que vous n'ayez point
reçu ? Rien, dites-vous, et c'est pour cela que je rends grâces à celui qui
m'a donné ce que j'ai. Si vous n'avez rien du tout, vous n'avez eu aucun
mérite précédent, pour recevoir les choses dont vous vous glorifiez. Si vous
en demeurez aussi d'accord, c'est donc en vain d'abord, que vous vous élevez
avec présomption au dessus du Publicain ; car s'il n'a pas ce, que vous
avez, c'est parce qu'il ne l'a pas reçu comme vous. De plus, prenez garde
que vous ne rapportiez pas pleinement à Dieu tous ses dons, et que,
détournant pour vous, quelque chose de sa gloire et de son honneur, vous ne
soyez justement accusé de fraude, et de fraude envers Dieu. Car si vous vous
attribuiez quelque chose des vertus dont vous vous vantez, comme venant de
vous, je croirais que c'est parce que vous vous trompez vous-même, non pas
que vous vouliez tromper ; et je corrigerais cette erreur. Mais comme en
rendant des actions de grâces, vous montrez que vous ne vous attribuez rien
à vous-même, et que vous reconnaissez prudemment que vos mérites sont des
dons de Dieu; et de plus, comme en méprisant les autres, vous vous trahissez
vous-même, et faites voir que vous parlez avec un coeur double; d'un côté
vous faites servir votre langue au mensonge, et de l'autre vous usurpez la
gloire de dire la vérité. En effet, vous ne jugeriez pas le Publicain
méprisable. au prix de vous, si vous n'estimiez pas que vous êtes plus que
lui. Mais que répondez-vous à l'Apôtre qui nous prescrit cette règle, et
vous dit : "A Dieu seul soit honneur et gloire ?" (I. Tim. I, 9) Que
répondez-vous de même à l'ange qui distingue et apprend ce qu'il plaît à
Dieu de se réserver, et ce qu'il daigne départir aux hommes quand il
s'écrie : "Gloire à Dieu dans le ciel et paix sur la terre aux hommes de
bonne volonté ?" (Luc. II, 14) Voyez-vous maintenant que le Pharisien, en
rendant grâces, honore Dieu des lèvres, et que dans son coeur ce n'est que
lui-même qu'il honore. Ainsi nous en voyons plusieurs, dans la bouche
desquels retentissent des actions de grâces ; mais plutôt par habitude que
par un sentiment véritable ; c'est au point même que des scélérats à chacun
de leurs crimes rendent souvent grâces à Dieu de ce qu'ils ont réussi, du
moins ils le pensent ainsi, dans l'accomplissement de leurs désirs déréglés.
Vous entendrez par exemple un voleur, après avoir exécuté son mauvais
dessein, et dévalisé quelqu'un, se réjouir secrètement en lui-même, et
dire : Dieu soit loué, je n'ai pas veillé en vain, et je n'ai pas perdu ma
peine. De même celui qui a tué un homme, ne s'en glorifie-t-il pas, et ne
rend-il pas grâces à Dieu de ce qu'il a été plus fort que son adversaire, ou
s'est vengé de son ennemi ? Un adultère de même saute de joie, et loue Dieu
de ce qu'il a joui enfin d'un plaisir qu'il avait longtemps désiré.
Toute
sorte d'actions de grâces n'est donc pas agréable à Dieu, il n'y a que celle
qui part d'un cœur pur et simple».
Saint Bernard de Clairvaux, "Sur la Cantique des
Santiques", Sermon XIII.

Lettre du bienheureux Nicolas Roland (Directeur spirituel
de saint Jean-Baptiste de La Salle), à l'une de ses dirigées:
«Ma chère Fille, que votre principale maxime soit de
servir Dieu avec ferveur, vous souvenant dès le moment de votre réveil, soit
le matin ou de nuit, que tout ce que nous pouvons faire pour la gloire et le
service de Dieu est bien au-dessous de ce que nous Lui devons, à ce titre
même de simple créature, sans compter ce à quoi nous Lui sommes obligés en
qualité de ses épouses, du nombre desquelles vous avez le bonheur d’être,
par un choix particulier de son amour, et non point par hasard, ni
inclination de votre jeunesse, ni poursuites de vos parents.
"Que tous les jours de votre vie soient donc de
nouveaux jours de ferveur. Dès le point de votre réveil, souvenez-vous des
paroles de l’Époux: “Venez, ma colombe, au trou de la pierre”,
c’est-à-dire de son côté, puiser de l’amour de son cœur pour en remplir le
vôtre, afin de conserver son souvenir le reste du jour.
Allez à l’Office divin, entendez la sainte Messe,
vaquez et conversez dans l’esprit de victime destinée à être égorgée sans
cesse, par la mort à vous-même, à tous vos sens et passions, ce que vous
obtiendrez par la fidélité à la sainte oraison, si vous y êtes fidèle: 1° à
n’y jamais manquer; 2° à ne rien épargner pour vous la rendre fructueuse;
ainsi que je vous l’ai déjà marqué ailleurs.
Dans le reste du temps de vos exercices, et parmi les
emplois et offices, n’épargnez pas les points de lecture spirituelle, courts
et succincts: le livre de l’Imitation, ou d’autres livres de sentences sont
tout propres pour cela. Que les oraisons jaculatoires soient votre entretien
fréquent; mais je souhaiterais que vous les fassiez sur les principes qui
doivent animer nos actions et entretiens, c’est-à-dire selon les occasions
que vous en avez journellement, comme par exemple quand vous voyez ou
entendez quelque misère, souffrance, pauvreté corporelle ou spirituelle dans
les autres, que vous disiez en vous-même: O mon Dieu, pourquoi
gratifiez-vous ainsi votre chétif créature, que vous la préserviez de telle
peine ou indigence? Quelle reconnaissance vous dois-je, ô mon Dieu! ou autre
semblable.
Si vous voyez ou entendez dire que les riches manquent
de compassion pour les pauvres, que les ignorants sont sans instruction, que
les bons sont opprimés, calomniés, comme cela se répand souvent dans les
conversations, tâchez, de même, de former des conceptions humbles et
charitables qui vous fassent réparer, autant qu’il est en vous, la gloire
que Dieu perd par les outrages qu’Il reçoit des pécheurs. Cette occupation
est salutaire, et de grande utilité pour empêcher de meubler l’esprit des
dissipations qu’apportent les conversations avec les gens du siècle; ce que
je vous conseille de faire autant que vous pourrez, car ce n’est qu’un air
empesté.
Voilà ce que j’ai cru vous devoir marquer pour
répondre à vos désirs. Pour ce qui est de votre autre article sur la peine
que vous pouvez avoir de ce que l’on ne vous accorde pas pour le bien du
prochain, je remercie Notre-Seigneur des sentiments qu’Il vous donne
là-dessus; mais je vous dis, ma chère Fille, qu’il faut gémir de voir une
moisson si grande et si peu d’ouvriers. je veux dire que tant de personnes
passent, ou, pour mieux dire, perdent le temps et l’argent à se parer,
nourrir, vêtir, divertir. Cependant, « le juste périt », dit le Prophète.
Personne n’y prend garde et ne veut aider à sauver une âme, ni par ses soins
charitables, ni par dépense, bien qu’il ne faudrait pour cela qu’une partie
du superflu.
Bénissez Dieu de ce qu’Il vous à retirée des
engagements du siècle et des convoitises, où vous vous seriez peut-être
laissée engager comme les personnes pour lesquelles je vous exhorte de gémir
et de répandre des larmes devant Celui qui a donné son sang pour vous.
C’est en son amour que je suis tout à vous».
Bienheureux Nicolas Roland, "Lettres
spirituelles",
Lettre 17 (Archives du Saint Enfant-Jésus de Reims)

Humilité et simplicité
Voilà bientôt un an que j'ai commencé à écrire dans ce
cahier – il contient je crois ce qu'il y a de plus profond en mon âme –
toute âme a besoin de s'exprimer – et la mienne, je l'écris, lorsqu'elle a
un trop grand désir de s'extérioriser – car je n'ai pas suffisamment de
capacité en d'autre art pour m'en servir dans ce but.
Dieu m'a comblé de bien grandes grâces
— et je garde ce
cahier qui en est un témoignage — malgré mes péchés innombrables, ma
tiédeur, mon orgueil, et ma nature si pauvre en toutes qualités.
Chaque fois que j'écris, ce n'est pas raisonné, mais
c'est un besoin qui naît subitement lorsque mon âme est trop concentrée.
Est-ce que je ne puis pas mourir, moi aussi pour les
hommes — est-ce que je ne puis pas mourir, moi aussi avec vous — tous les
jours — mourir pour eux — avec Vous ? Cela est grand, cela est beau, cela
est sublime — vous seul pouvez le faire — mais vous pouvez par votre grâce
merveilleuse le faire par d'autres aussi — vous pouvez mourir dans votre
corps mystique, vous pouvez vous servir de vos membres — mon Jésus-Christ,
je suis une partie de vous, de votre corps, et je puis mourir moi aussi avec
la tête, sur la Croix, moi aussi avec la tête — pour le salut du monde je
suis à vous — je suis vous si je le veux et je pourrai dire quand je
serai votre prêtre — je pourrai dire : ceci est mon corps, ceci est
mon sang car je serai bien vous-même, si je le veux je serai bien
vous-même et je pourrai mourir sur la croix car vous mourez sur la Croix —
et puisque vous y mourez je puis y mourir aussi car je suis vous.
O est-ce bien vrai mon Dieu ? cela est immense et
incompréhensible et je demeure confondu, anéanti — comment puis-je encore
vous offenser ?
Chanoine Paul WARNIER,
"Pressentir la lumière
(Journal spirituel)
Éditions du Cerf, Paris
NOTA: Le Chanoine
Warnier, issu d'une
famille rémoise très connue, était, lors de son décès accidentel, curé
de la paroisse de Saint-André de Reims. On venait de toute la ville (et
même de plus loin!) écouter ses homélies du dimanche. Ces homélies
étaient très courtes, mais d'une grande densité spirituelle. (Note du
Webmaster).




|