CHEMIN DE SAINTETÉ

adveniat regnum tuum

 

Annexe 1

Mechtilde de Magdebourg

Sainte Mechtilde de Hackeborn ne fut pas la seule, à son époque à connaître, louer et aimer le Cœur de Jésus. Outre sainte Gertrude d’Helfa, auteur du Livre de la Grâce spéciale, une autre moniale d’Helfta, Mechtilde de Magdebourg [1], connut des faveurs de ce Cœur adorable. Voici un extrait des confidences qu’elle reçut de Jésus:

Mechtilde de Magdebourg raconte :

Dans mes grandes souffrances Dieu se révéla à mon âme, il me montra la plaie de son Cœur et dit:

 Vois comme on m'a fait souffrir.

Mon âme lui dit :

 Hélas! Seigneur, pourquoi souffrez-vous à ce point, pourquoi votre sang est-il répandu en si grande abondance? Votre prière ne suffisait-elle pas à racheter le monde?

– Non, répondit-il, cela ne suffit pas à mon Père. Car tout ce dénuement, toutes ces peines, ces souffrances et ces opprobres, tout cela n'était qu'un faible coup frappé à la porte du ciel; et les cieux ne s'ouvrirent qu'au moment où le sang de mon Cœur s'écoula jusqu'à terre... 

Si, sincèrement, tu veux changer de vie
Regarde ton époux, le Roi de l'Univers
Regarde: il a voulu être cloué en croix
Tout ruisselant de sang, devant toute la Terre,
Brisé; ses yeux sont plein de larmes;
Mais Son Cœur très doux déborde d'amour.

Songe à la blessure de la lance cruelle
Qui s'est enfoncée jusqu'au tréfonds du Cœur;
Et déplore tes crimes.

Réponse de Mechtilde de Magdebourg :

Ô mépris déplorables! ô douleurs lamentables! que celles qui s'abattent sur votre auguste corps et sur votre doux Cœur! Aidez-moi, Seigneur bien-aimé, à supporter dans votre amour tous mes mépris et toutes mes souffrances… Ô corps auguste qui est mort pour moi, bien-aimé Jésus! je vous prie d'accorder à tous mes sens de pouvoir sans cesse se réjouir de cette lance ensanglantée, de la plaie de votre doux Cœur, et à mon âme misérable de s'y réjouir éternellement, ainsi qu'à tous ceux pour qui je dois et je veux chrétiennement prier. Amen. (Mechtilde de Magdebourg, La lumière de la Divinité.)

Annexe 2

Saint Albert le Grand
et saint Bonaventure

Saint Albert le Grand déclara et écrivit:

Il y a trois témoins qui rendent témoignage sur la terre: l'esprit, l'eau et le sang (1 Jean 8); l'esprit, que Jésus rendit à son Père au milieu des douleurs; l'eau, qui coule de son côté; et le sang, qu'il a versé de son cœur, sont les témoins de son amour le plus ardent... Par le sang de son Cœur et de son côté, le Seigneur a arrosé le jardin de son Eglise, car il a fait jaillir en même temps les sacrements de son Cœur... Son Cœur débordait d'amour de pouvoir s'unir à nous, et remplir notre cœur de joie et d'allégresse. (Saint Albert le Grand, Sermon 27-28 De Eucharistia.)

Il a voulu être blessé au Cœur, pour que nous ne nous lassions jamais de contempler son Cœur.  (Saint Albert le Grand, In Joannem.)

Saint Bonaventure contemple le Cœur de Jésus :

Ton Cœur, ô parfait Jésus, est le bon trésor, la perle précieuse que nous avons trouvée dans le champ labouré de ton corps. Qui donc rejetterait cette perle? Je donnerai plutôt mes bijoux, j'échangerai contre elle toutes mes pensées et mes affections et je me l'achèterai, jetant tout souci dans le Cœur du bon Jésus qui, sans tromperie, me nourrira. J'ai trouvé le Cœur du Roi, mon Seigneur, mon frère et mon ami, le très doux Jésus. Car son Cœur est à moi. Ayant trouvé ce Cœur, ô très doux Jésus, qui est le tien et le mien, je te prierai, ô mon Dieu. Accueille mes prières avec condescendance, ou plutôt prends-moi tout entier dans ton Cœur...

Ton côté a été percé: c'est pour que, à l'abri de tous les orages du dehors, nous puissions demeurer en cette vigne. Pourquoi encore blessé? Pour que, par cette blessure visible, nous voyions la blessure invisible de ton amour. Qui aime ardemment est blessé d'amour: comment mieux montrer cette ardeur qu'en laissant la lance blesser, non seulement le corps, mais aussi le Cœur lui-même? La blessure charnelle rappelle la blessure spirituelle… Qui n'aimerait ce Cœur déchiré d'une telle blessure? Qui n'aimerait ce Cœur si aimant? Qui n'embrasserait ce Cœur si pur? Nous donc, qui vivons encore dans la chair, répondons autant que nous le pouvons à l'amour de celui qui nous a aimés, embrassons-le, lui qui fut blessé pour nous, lui dont les mains et les pieds, le côté et le Cœur furent percés pour nous. Et prions-le d'enchaîner d'un lien d'amour notre cœur jusqu'ici dur et impénitent, et de le blesser d'un trait de son amour. (Saint Bonaventure, La Vigne mystique “écrit qui lui est attribué”)

Annexe 3

Sainte Mechtilde, sainte Gertrude
et le Cœur de Jésus

Nous savons que sainte Mechtilde et sainte Gertrude d’Helfta, de dix ans sa cadette, furent très liées; c’est Gertrude qui rapporta l’essentiel des confidences de Mechtilde. Mais Gertrude fut également une grande mystique, et dans son œuvre essentielle [2] : Le Héraut de l’Amour Divin, seul le livre 2 a été écrit par elle-même. Comme cela fut le cas pour sainte Mechtilde, les autres livres ont été rédigés par des moniales, ses compagnes, souvent sous la dictée de Gertrude; seule la vie de sainte Gertrude d’Helfta a été rédigée après sa mort, probablement par une moniale d’Helfta.

Quand on connaît bien les œuvres de sainte Mechtilde et de sainte Gertrude, on remarque une symbiose étonnante entre certains textes, surtout ceux qui concernent le Cœur de Jésus et saint Jean l’Évangéliste. Viennent-ils de Mechtilde ou de Gertrude? Ou bien Gertrude a-t-elle parfois mélangé quelques textes? Impossible de le dire. C’est pourquoi, pour intéresser le lecteur, nous ajoutons ici quelques extraits du Héraut de l’Amour divin, œuvre de Gertrude.

Tout d’abord le récit de la conversion de Gertrude, dans lequel elle ne manque pas de remercier pour la connaissance que Jésus lui fit de son Sacré-Cœur:

La conversion de Gertrude

J'étais depuis peu entrée dans ma vingt-sixième année, lorsque le lundi qui précède la Purification, après l'office des Complies, profitant de l'heure si douce du crépuscule, vous avez daigné, ô véritable Lumière qui brillez au milieu des ténèbres, mettre un terme à ce jour de ma vanité puérile, tout obscurci par les nuages épais de mon ignorance... Parmi les faveurs sans nombre dont vous m'avez comblée, il en est deux que je place au-dessus de toutes les autres. D'abord vous avez imprimé sur mon cœur les joyaux splendides de vos plaies sacrées. Vous m'avez encore fait une blessure d'amour si profonde et si efficace. Ne m'auriez-vous jamais octroyé d'autre consolation intérieure ou extérieure, dans ces deux seuls bienfaits vous m'avez accordé tant de bonheur que, devrais-je vivre mille ans, je trouverais toujours en eux une source intarissable de joie, de lumière, de béatitude et de reconnaissance.

À ces grâces, vous avez encore ajouté un autre privilège non moins précieux: vous m'avez enrichie de l'incomparable douceur de votre amitié; vous m'avez, pour que j'y prenne mes délices, livré l'arche sainte de votre divinité, votre Sacré Cœur. Tantôt vous me le donniez gratuitement, tantôt vous le changiez contre le mien, afin de me fournir un nouveau gage de votre dilection. Par lui vous m'avez manifesté les intimes secrets de vos jugements; vous m'avez révélé vos charmes infinis; tant de fois vous avez enivré mon âme des témoignages exquis de votre tendresse...  (Sainte Gertrude, Le Héraut de l'Amour divin.)

Gertrude parle de Mechtilde

C’est Jésus qui parle à Mechtilde, mais c’est Gertrude qui rapporte ses paroles confiées à Mechtilde :

Voici que j'offre aux regards de ton âme mon Cœur sacré, instrument mélodieux dont les accents suaves charment toujours l'infinie Trinité. Prie-le de réparer tes fautes, les faiblesses de ta vie; tes œuvres deviendront alors, devant mes yeux, parfaites et agréables... En n'importe quel temps, il [3]  peut réparer tes négligences... Mon Cœur sacré attend, avec une soif dévorante, que tu l'invites, soit par tes paroles, soit par un signe, que tu le presses d'achever, de perfectionner les actes de ta vie, chose que tu es incapable de réaliser de ton propre chef.  (Sainte Gertrude, Le Héraut de l'Amour divin.)

Maintenant, Gertrude parle d’elle-même :

J'avais engagé une personne (Mechtilde) à dire chaque jour à son oraison la prière suivante pour moi: “Ô très aimable Seigneur, je vous prie par votre Cœur transpercé, de transpercer le cœur de Gertrude des traits de votre amour.”

Le dimanche suivant, comme j'allais à la communion, ô mon divin Sauveur, vous excitâtes dans mon intérieur un désir si ardent que je fus contrainte de dire moi-même ces paroles: “Seigneur, je vous supplie par votre infinie bonté que vous daigniez transpercer mon cœur des traits de votre amour.” Et je sentis à l'instant que ma prière avait touché votre divin Cœur. Car je vis que de la plaie de la main droite du crucifix, il partait un rayon de feu en forme d'une flèche aiguë, lequel s'étendait vers moi, et puis se retirait d'une manière ravissante comme pour exciter mes désirs. Cela dura jusqu'au mercredi, auquel jour, la messe étant finie, voilà que tout à coup et comme à l'improviste, vous vous trouvâtes présent devant moi et vous fîtes une blessure à mon cœur. (Sainte Gertrude, Le Héraut de l'Amour divin.)

Puis Gertrude parle du Cœur de Jésus révélé à Mechtilde :

Le Seigneur la fit entrer (Mechtilde) en un lieu admirable plus qu'on ne saurait dire: c'était le Cœur de Jésus lui-même, disposé en forme de maison, où celle-ci devait célébrer la fête de la Dédicace. Lorsqu'elle y fut entrée, il lui sembla qu'elle allait défaillir sous l'influence incroyable des délices qui l'inondaient et elle dit au Seigneur:

-Mon Seigneur, quand vous n'auriez introduit mon esprit qu'en une place que vos pieds auraient foulée, ce serait bien assez pour moi; mais que puis-je essayer pour répondre à la faveur étonnante que vous m'accordez en ce moment?

Le Seigneur répondit :

 Puisque tu cherches habituellement à m'offrir la partie la plus noble de ton être, c'est-à-dire ton cœur, j'ai jugé que, pour te faire plaisir, je devais t'offrir aussi le mien; car je suis le Dieu qui se fait pour toi tout en toute choses: vertu, vie, science, nourriture, vêtement, en un mot tout ce qu'une âme aimante peut désirer.

Elle dit alors :

 Si mon cœur s'est mis en quelque point d'accord avec vous, Seigneur, c'était encore votre don.

Le Seigneur repris :

 Il est de ma nature qu'ayant prévenu une âme des bénédictions de la douceur, je continue à lui prodiguer les bénédictions de la rémunération; et si elle se prête au bon plaisir de mon Cœur, il devient nécessaire que je me conforme aux désirs du sien.  (Sainte Gertrude, Le Héraut de l'Amour divin.)


[1] Mechtilde de Magdebourg fut d’abord béguine.
[2] Seul le livre 2 du Héraut a été écrit par Gertrude elle-même. Les autres chapitres ont été rédigés par des amies moniales.
[3] Le Cœur de Jésus.

   

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