La spiritualité de sainte
Mechtilde
d’après le Livre de la Grâce spéciale
Le repas de la Pâque juive
s’achève. Jésus est au milieu de ses apôtres et il prie intensément car le
Mystère Pascal va commencer officiellement. Bientôt Jésus se lève, et les yeux
dirigés vers Ciel il dit:
― Père,
glorifie ton Fils!
L’instant est solennel car c’est
l’Heure du plus grand Sacrifice que le monde ait jamais connu, et le Père
accepte le Sacrifice du Fils qu’il glorifie.
Après avoir été effectivement
glorifié, quoique invisiblement et mystérieusement, Jésus peut instituer
l’Eucharistie et dire:
― Prenez
et mangez-en tous, car ceci EST mon Corps livré pour vous... Prenez et buvez-en
tous, car ceci EST mon Sang versé pour vous.
Cette offrande totale du Seigneur
se concrétisera bientôt sur la Croix, par sa mort et par sa Résurrection.
L’Eucharistie fait partie
intégrante du Mystère Pascal. Cependant, la messe, donc l’Eucharistie, ayant eu
une importance prépondérante dans la vie et les révélations de sainte Mechtilde,
nous avons fait de l’Eucharistie un chapitre à part. En conséquence, ce présent
chapitre, consacré au Mystère Pascal, n’abordera que les thèmes liés à la
Passion et à la Résurrection de Notre Seigneur Jésus-Christ.
Un jour de la fête des morts,
Mechtilde vit tout à coup Jésus suspendu dans l’air, pieds et poings liés. Il
dit:
― Chaque
fois qu’un homme pèche mortellement, il me lie ainsi, il me retient lié tant
qu’il persévère dans le péché. (Le Livre de la Grâce spéciale, cinquième
partie, chapitres XVII, 19)
Un Vendredi Saint, Mechtilde
s’inquiétait :
― Ô très
doux Dieu, qu’est-ce que l’homme peut vous rendre pour vous être ainsi laissé
arrêter et garrotter pour son salut?
― Qu’il
se laisse spontanément et librement attacher par les chaînes de l’obéissance,
pour mon amour.
― Et
quelles louanges vous offrira-t-il en compensation des crachats immondes et des
soufflets cruels que vous avez reçus des juifs?
― En
vérité je te le dis, quiconque méprise ses supérieurs, me crache à la face. Si
quelqu’un donc veut réparer cet outrage, qu’il respecte son prélat.
― Et pour
les soufflets, quelles actions de grâce accepterez-vous, ô très miséricordieux
Seigneur?
― Que
l’on tienne aux coutumes et aux statuts de son ordre avec une stricte fidélité.
Et un peu plus tard, elle demanda :
― Quelles
actions de grâces, ô douceur sans égale, doit-on vous rendre pour cette plaie
d’amour que vous avez reçue sur la Croix lorsque l’amour invisible perça de sa
flèche votre très doux Cœur d’où sortirent alors, pour nous guérir, le sang et
l’eau; quand vaincu par l’amour que vous inspirait votre Épouse, vous êtes mort
de la mort d’amour?
― Que
l’homme conforme toujours sa volonté à la mienne, et que ma volonté lui plaise
en tout et par-dessus tout.
Et le Seigneur continua:
― Je te
le dis en vérité, si quelqu’un verse des larmes par dévotion à ma Passion, je
les accepterai comme si celui-là l’avait soufferte pour moi.
― Ô mon
Seigneur, comment obtenir ces larmes?
― Écoute-moi:
pense d’abord à la tendresse avec laquelle je partis à la rencontre des ennemis
qui me cherchaient, armés de glaives et de bâtons, pour me faire mourir comme un
voleur et un brigand. Moi, j’allais vers eux comme une mère vers le fils qu’elle
veut arracher à la dent des loups... (Le Livre de la Grâce spéciale,
première partie, chapitre XVIII, 27)
Le Seigneur dit :
― Quand
une personne est malade, je me revêts de son âme comme d’un manteau de gloire,
et dans la joie de mon Cœur je me présente à mon Père, lui rendant grâces et
louanges pour toutes les soufrances qu’elle endure...
Le Seigneur dit encore :
― Les
soupirs ont de grands effets. Jamais on ne gémit devant Dieu sans se rapprocher
de lui. Les soupirs qui ont pour cause l’amour, le désir de moi-même ou de ma
grâce ont trois bons effets dans l’âme. Premièrement, ils la fortifient, comme
un parfum suave et fort réconforte l’homme. Secondement, ils l’illuminent comme
le soleil éclaire une maison obscure. Troisièmement, en adoucissant ses actions
et ses souffrances, ils leur communiquent une agréable saveur. (Le Livre de
la Grâce spéciale, quatrième partie, chapitre XXX, 29)
Parfois, Mechtilde malade
s’inquiétait quand elle recevait trop de soulagements. Le Seigneur lui dit:
― Ne
crains pas, ne te trouble pas, car c’est moi qui supporte véritablement tout ce
que tu souffres; ainsi je considère comme donnés à moi-même les soins qu’on a
pour toi; je les récompenserai comme si je les avais reçus. (Le Livre de la
Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XLI, 37)
Pendant un ravissement, Mechtilde
se vit dans une grande maison qu’elle reconnut comme étant le Cœur du Christ.
Elle entra, se prosterna et trouva sur le pavé, une grande croix. Elle entendit
le Seigneur lui dire:
― Tout ce
qui est sur la terre ne saurait donner de joie; mais le salut, la souveraine
gloire sont dans les souffrances et la tribulation... Comme une étoffe de soie
est souple et mœlleuse, ainsi toute souffrance et tribulation est douce pour
l’âme qui aime vraiment Dieu.
Cette vision était le présage de
la maladie qui lui arriva peu après... elle fut alors saisie d’une douleur
aiguë. Cette douleur dura très longtemps, mais Mechtilde ne se plaignit
jamais. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXV, 22)
Pour expliquer sa patience
Mechtilde utilisa une comparaison: La brebis au pâturage bêle souvent; mais,
conduite à la mort, elle se tait devant le bourreau. Ainsi l’âme fidèle doit
être dans la crainte quand elle ne ressent aucun genre de peine; mais au temps
de la tribulation, elle est en pleine sécurité. (Le Livre de la Grâce
spéciale, troisième partie, chapitre XVI, 16)
Par sa Croix le Seigneur a sauvé
tous les pécheurs, donc tous les hommes. Mais nous ne pouvons bénéficier des
grâces de la Croix de Jésus que si nous regrettons nos péchés. Un jour de fête
de dédicace, Mechtilde vit la Jérusalem céleste et le trône de Dieu qui y est
établi. Cette cité était construite de pierres précieuses: les saints. Les anges
étaient placés devant le trône, selon leur ordre.
Bientôt le Seigneur lui dit :
― Demande
pour toi la rémission de tous tes péchés, car c’est ce qu’il y a de plus
salutaire pour l’homme et le meilleur moyen d’obtenir la joie véritable.
Quiconque, en effet, vraiment pénitent, avoue ses péchés, se jette à mes pieds
avec la volonté sincère de les confesser pour obtenir le pardon, celui-là sera
certain d’avoir pleine rémission, pourvu qu’il trouve dans son cœur un sentiment
assez humble pour être prêt à l’obéissance envers toute créature. (Le Livre
de la Grâce spéciale, première partie, chapitre XXXV , 61)
Un étonnant festin.
Nous avons déjà dit que Dieu se
faisait généralement connaître par des images que nous pouvons comprendre. Pour
décrire sa joie du soir de Pâques, il nous invite à un étonnant festin.
Un soir de Pâques, Jésus dit:
― Voici
que je veux ce soir vous offrir un festin composé de cinq mets; je vous servirai
d’abord la joie mutuelle que ma Divinité et mon Humanité se sont données
aujourd’hui; puis la joie que j’ai ressentie lorsque, pour compenser les
amertumes de ma passion, l’amour fit tressaillir mes membres sous l’effet des
délices surabondantes de sa douceur. Je vous servirai aussi la joie que j’ai
éprouvée lorsque je présentai à mon Père comme un gage de haut prix, mon âme
avec toutes les âmes que j’ai rachetées; et cette autre joie que me donna mon
Père en me communiquant la pleine puissance d’honorer, d’enrichir et de
récompenser mes amis acquis par moi au prix de tant de labeurs. Enfin, le
dernier de ces mets sera la joie que j’éprouvai en voyant le Père associer à mon
règne éternel, mes rachetés devenus mes cohéritiers et les convives de ma
table... Si donc quelqu’un veut me faire ressouvenir de ces cinq joies
spéciales, pour la première je lui donnerai, dès ce monde, s’il le désire, le
goût de ma divinité; pour la seconde, le don de me connaître; pour la troisième,
je présenterai son âme à mon Père à l’heure du trépas; pour la quatrième, je
l’associerai au fruit de ma Passion et de mes souffrances; enfin, pour la
cinquième, je lui donnerai l’aimable société de mes saints. (Le Livre de la
Grâce spéciale, première partie, chapitre XIX, 34)
Mechtilde rend grâce, et le
Seigneur lui dit qu’il considère la gloire de ses membres comme étant sa
propre gloire... et qu’il a le pouvoir de récompenser, honorer et élever ses
amis et celui de leur témoigner son amour selon sa libre volonté... La gloire
donnée à son corps, c’est qu’il puisse être partout, en son Humanité, comme il
l’est par sa Divinité, avec tous et chacun de ses amis, partout où il veut.
Aucun homme, si puissant qu’il soit, n’a jamais et ne pourra jamais posséder ce
pouvoir. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre XIX, 35)
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