Chapitre II
Le Verbe de Dieu fait homme
7
L'Eucharistie
7-1-Le sacerdoce du Christ
(Livre 2, chapitre 13)
Marie Lataste lisait les paroles du
Psalmiste: "Le Seigneur l’a juré, et il ne s’est point
repenti de son serment. Vous êtes prêtre selon l'ordre de
Melchisédech." Le Seigneur Jésus lui fit comprendre que ces
paroles le concernaient, car lui seul est ce prêtre éternel
selon l'ordre de Melchisédech, qui a été oint de l’huile du
Seigneur, sacré roi et prêtre par Dieu le Père.
Jésus dit: "Je suis venu sur le
Calvaire remplir ma fonction de prêtre en lui offrant le
sacrifice de ma vie, comme un sacrifice d’agréable odeur et seul
capable de l’apaiser. Je fus ainsi prêtre et victime tout à la
fois. Prêtre et Dieu, je m’adressais à Dieu, et lui offrais pour
victime un Dieu immolé pour sa gloire. Ce sacrifice du calvaire,
je le renouvelle chaque jour par le ministère du prêtre au saint
sacrifice de l’autel, qui est une représentation du sacrifice de
la croix. Là, je ne m’offre plus d’une manière sanglante comme
sur la croix, mais, c'est néanmoins un véritable sacrifice qui
est offert, et je suis là encore prêtre et victime,
sacrificateur et sacrifié, Dieu immolant et Dieu immolé. C'est
toujours la même victime qui est offerte à Dieu, parce que c'est
la seule qui lui soit agréable, la seule qu'il demande, la seule
qu'il veuille accepter."
Tous les chrétiens, en assistant à la
messe, peuvent offrir à Dieu la victime de l'autel, pour le
glorifier, pour l'aimer de plus en plus, et de plus en plus
satisfaire pour leurs péchés ainsi que pour les offenses de
leurs parents et amis, et de tous ceux pour qui ils ont quelque
obligation particulière de prier. Ils peuvent offrir à Dieu la
victime de l’autel pour le remercier de toutes les grâces qu'ils
ont reçues de Lui, et pour Lui demander les grâces qui leur sont
nécessaires, à eux et à tous leurs parents et amis, ainsi qu'à
la sainte Église, ou pour les âmes du Purgatoire.
Jésus va plus loin encore: "Le
sacerdoce, selon l’ordre de Melchisédech, vous donne, ma fille,
la continuation du grand bienfait de la rédemption. Ce
sacerdoce, dans sa plénitude, réside en moi. Je l’ai déversé sur
mes apôtres, et mes apôtres, par eux et leurs successeurs, l’ont
transmis et le transmettront à jamais, jusqu'à la fin des temps,
à ceux qui seront élus par mon Père, afin que, par toute la
terre, l’oblation sainte lui soit offerte jusqu'à la
consommation des siècles... Tous les effets du sacrifice de mon
sacerdoce... sont tous contenus dans le sacrement de mon amour,
sacrement qui perpétue le sacrifice de la victime immolée sur le
Calvaire par les mains du souverain prêtre, qui était à la fois
Fils de Dieu et Fils de l'homme." (Livre 2, chapitre 13)
7-2-Le sacrement de l'amour
(Livre 2, chapitre 14)
Jésus parle de son sacrement d'amour
qui est comme le trésor de sa miséricorde. Pourtant les hommes
ne le reconnaissent pas et Jésus se plaint: "Ah! ma fille, je
suis tout amour pour les hommes dans ce sacrement, et eux, ils
n'ont que de la froideur pour moi!… J’épanche quelquefois mon
cœur dans le vôtre, prenez part à ses sentiments, vous que j’ai
mise au nombre de mes amis et de mes confidents. Tandis que mon
cœur brûle d’amour pour les hommes, quelle n'est pas leur
indifférence! Je leur fais entendre ma voix... par mes
serviteurs et par ma grâce: ils méprisent ma grâce, ils
méprisent mes serviteurs... Ah! pourquoi donc faites-vous ainsi?
Que vous ai-je fait pour que vous me traitiez de la sorte? De
quoi vous plaignez-vous?... Quelle est la raison qui vous oblige
à m’abandonner?... Pour vous, ma fille, qui connaissez ces
choses, aimez-moi, unissez-vous à mes serviteurs... réparez en
quelque sorte l’indifférence des autres...
Ne croyez-vous pas qu'il faille toute
la force de l’amour d'un Dieu pour rester toujours dans
ce sacrement, malgré les sacrilèges, les outrages, les
irrévérences, les injures que j’y reçois tous les jours et à
toutes les heures?... Sachez que je connaissais jusqu'à la
moindre parole, jusqu'à la moindre pensée de mépris, les
offenses contre mon Père et contre moi-même... Mais je voyais
une infinité de biens produits par ce sacrement: tant de malades
y trouveront leur remède et leur guérison; tant de faibles, la
force; tant de pécheurs, le sceau de leur réconciliation et de
leur sanctification; tant de justes, leur consolation et de
nouvelles grâces pour se sanctifier davantage!... La vue... de
tant d'âmes qui ne seraient pas sauvées sans ce sacrement, me le
fit instituer malgré tous les outrages, tous les mépris que j'y
recevrais! Ah! Ne faut-il pas toute la force de l'amour d’un
Dieu, ne faut-il pas un amour comme celui d’un Dieu pour faire
une pareille chose, et cela sans jamais se démentir?"
Brusquement Jésus s'adresse
directement à la mystique qu'il s'est choisie: "Allons, ma
fille, resserrons de nouveau les doux liens qui nous unissent.
Aimez-moi de plus en plus: nous avons eu le bonheur d'être unis
si souvent!... Vous ne pourrez jamais comprendre le plaisir que
j'ai à visiter les âmes qui m’aiment..."
Dans le sacrement de l'Eucharistie
Dieu montre sa puissance. Jésus explique: "Cette
petite hostie est ce qu'il y a de plus auguste dans la religion,
puisqu’elle renferme Dieu lui-même, toutes les perfections de
Dieu, tous mes mérites, en sorte que celui que la reçoit peut
dire: je possède dans mon cœur Celui qui a tout fait, qui
soutient tout, Celui que le ciel et la terre ne peuvent
contenir, tous les mérites de mon Sauveur, enfin je possède
tout..."
Dans le mystère de l’Incarnation,
Dieu... cache sa divinité en prenant la nature humaine. Mais
dans ce sacrement, il cache sa divinité et son humanité sous la
forme d'un peu de pain. Jésus est dans mille hosties, aussi bien
que dans une; il est également présent dans tous les lieux où
il y a une hostie consacrée.
Jésus s'écrie: "Quel amour pour
les hommes! Non content de prendre leur forme et de vivre au
milieu d’eux... et d'être mort pour eux, je ne peux me résoudre
à me séparer d’eux. Et comme l'amour est insatiable et ne
peut se satisfaire que dans l'amour même, qu’un cœur dévoré et
consumé par l'amour ne peut se désaltérer qu’en aimant davantage,
ainsi j’instituai ce divin sacrement, afin d’être toujours
auprès d’eux pour les aider, les fortifier et les assister dans
leurs besoins... Je ne suis pas dans mon sacrement pour
quelques-uns, dans quelques endroits en particulier, ou pour
quelque temps, mais pour tous, par toute la terre, et dans tous
les temps que le monde subsistera...
C’est dans ce sacrement de son amour
que le Seigneur a ouvert le trésor de sa miséricorde...
Dans cette hostie sont toutes les perfections de Dieu, toutes
les vertus, toutes les grâces, puisque celui qui y réside est
l'auteur de la grâce et le Dieu des vertus. C’est là que Dieu
aime à faire miséricorde, y étant par bonté et par
miséricorde... Ah! ma fille, je vous le dis en Vérité, si les
hommes sont si faibles, si dépourvus de vertus, c'est qu'ils ne
demandent pas assez: la plus grande partie se rassemble dans ma
maison, dit quelques prières, avec quelque ferveur, parfois;
d’autres les disent du bout des lèvres, dans l’égarement et la
dissipation de leur esprit. Et comment voulez-vous qu'un Dieu
jaloux et juste puisse recevoir et exaucer ces prières?...
J'ai dit: 'Venez à moi, vous tous qui
êtes chargés, et je vous soulagerai.' J’invite non seulement les
justes, mais encore les pécheurs, pourvu qu'ils veuillent
renoncer sincèrement à leurs péchés... et à leurs habitudes
coupables... et je suis prêt... à déverser sur eux toute la
miséricorde de mon cœur, à leur donner tout mon amour, à les
prendre dans mes bras comme des brebis errantes retournées au
bercail... N’est-ce point un mystère insondable de miséricorde
divine que l'abaissement par lequel le Fils de Dieu se met tout
entier à la disposition des hommes avec tout ce qu'il est, avec
tout ce qu'il a?..."
7-3-Il faut recevoir ce sacrement
dignement
Cet enseignement de Jésus, si
important, se renouvela durant plusieurs jours. Tous les aspects
du sacrement de l'Eucharistie furent abordés y compris les
problèmes de discipline, car c'est dans le sacrement de son
amour que le Seigneur fait connaître la sévérité de ses
jugements et la rigueur de sa justice envers ceux qui le
profanent. Jésus dit: "Ces jugements retomberont sur deux
sortes de personnes: sur celles qui ne me reçoivent pas et sur
celles qui me reçoivent indignement. Les premières sont dans un
état de mort... Celui qui ne mange point ma chair eucharistique
et ne boit point mon sang, n’aura point la vie; il meurt chaque
jour davantage. Quant aux sacrilèges, on ne peut trouver de
termes pour exprimer la noirceur de leur crime..."
Jésus va très loin dans sa
condamnation: "De quels châtiments ne vous rendez-vous pas
dignes, que vous soyez instruits ou ignorants? Vous qui êtes
instruits et qui connaissez mieux la grandeur de ce sacrement,
vous êtes plus coupables, ministres de Satan, que les docteurs
et les princes des prêtres, puisque vous devez connaître mieux
qu’eux ma divinité. Ils me livrèrent entre les mains des hommes,
et vous me livrez entre les mains de mes plus grands ennemis,
les démons. Et vous, qui êtes ignorants, faites-vous instruire.
Êtes-vous si ignorants que vous ne sachiez pas que recevoir
ce sacrement en état de péché mortel, c'est faire un sacrilège?
Celui qui communie indignement se
rend coupable du sang d’un Dieu... et sur sa tête pèse la
justice. La communion indigne est un si grand péché que tout le
monde en a horreur; et cependant, il n'y a rien de plus
ordinaire... Celui qui communie indignement tombe dans une
indifférence, qui le rend insensible à tout... et le conduit
dans une léthargie mortelle... La plus grande partie de ces
gens-là meurt dans cette insensibilité, et souvent en pensant à
toute autre chose qu’à moi... Ainsi, il est vrai de dire que le
Seigneur fait paraître dans ce sacrement la sévérité de ses
jugements et la rigueur de sa justice. Il ne punit aucun autre
péché aussi sévèrement que la communion sacrilège. Enfin, tout
est renfermé dans ces paroles que j'ai dites: 'Celui qui me
reçoit indignement mange et boit sa condamnation'."
7-4-Les communions indignes.
L'idole de Dagon (Livre 13, chapitre 7)
Le Sauveur Jésus
parla encore de la communion indigne. Il dit: "Ma fille, ceux
qui me reçoivent indignement imitent les Philistins, qui s’étant
emparés de l’arche d’alliance la placèrent dans leur temple près
de l’idole de Dagon. Oui, ma fille, on me place non seulement
près d’une idole, mais encore près de Satan. Qui pourra
comprendre l’énormité de ce crime et les châtiments qu'il attire
sur celui qui le commet?
Vous savez, ma
fille, que je suis réellement présent dans la sainte hostie avec
ma divinité et mon humanité, avec toutes mes grâces et tous mes
mérite. Or, je vous le dis en vérité, le crime de celui qui
prendrait une hostie consacrée pour la fouler aux pieds ou la
couvrir d’injures serait inférieur au crime de celui qui me
reçoit dans un cœur impur et souillé. Quelle témérité, quelle
insolence, quelle audace! Oui, ma fille, la communion indigne
est le plus grand de tous les crimes; tous les autres ne sont
qu'une attaque à la loi de Dieu; celui-ci est une attaque contre
Dieu lui-même.
Communier
indignement, c'est me couvrir d’ignominie, d’injures et
d’affronts... c'est prendre mon sang et signer avec ce sang
l’acte de renoncement à ma loi, à mes mérites, à ma passion, à
ma mort. La communion indigne est, par sa nature, un acte plus
coupable que celui des Juifs qui me crucifièrent... car je suis
constamment dans le tabernacle à vous attendre pour être votre
nourriture, votre vie... Je suis là comme votre Dieu, votre
frère et votre ami, et communier indignement, c'est abuser de
mon amour et de ma bonté. C'est un crime abominable... Ma fille,
autant une communion bonne, fervente et sainte donne à l'âme
grâces et bénédiction0s, autant une communion indigne et
sacrilège attire sur elle la malédiction et la colère de Dieu."
(Livre 13, chapitre 7)
Marie Lataste avoue être très
malheureuse quand elle pense aux pécheurs, aux injures que Jésus
reçoit, et à la peine qui l'afflige; alors, elle souffre plus
que la mort... Jésus lui dit: "Ma fille... vous avez raison
de vous attrister à la vue des outrages que je reçois, à la vue
de l’ingratitude et de l’indifférence des pécheurs, à la vue
surtout des nombreux sacrilèges qui se commettent chaque jour.
Vous vous attristeriez bien plus encore si vous compreniez la
grandeur et la réalité des offenses que je reçois, mais vous ne
pouvez le comprendre: votre intelligence est trop bornée pour
cela et même votre amour encore trop faible..."
D'où le conseil: "Ah! du moins,
pénétrez chaque jour de plus en plus dans mon cœur: étudiez-en
chaque jour de plus en plus tous les secrets et toutes les
amabilités... Vous me dédommagerez ainsi, ma chère fille, de
l’indifférence de tant d’autres par l'ardeur de votre amour. Ma
fille, ma bien-aimée, l’épouse de mon cœur... Pourquoi m’est-il
agréable de vous donner de si hauts témoignages de mon amour?
C'est pour que vous ne me refusiez rien... pour que vous soyez
humble comme moi, soumise et obéissante comme moi, sainte comme
moi, en un mot, pour que vous m’aimiez comme je vous aime."
(Livre 2, chapitre 14)
7-5-Notre âme a soif du Dieu
vivant...
Le sacrement de l'Eucharistie,
mystère ineffable de miséricorde pour le temps et pour
l’éternité, permet, à ceux qui le reçoivent avec amour, de
resserrer leurs liens avec Jésus. Jésus parla de l'attrait que
beaucoup ressentent près du tabernacle. L'âme est "comme le
cerf altéré qui soupire après une source d’eau vive", et qui
la trouve près du saint Sacrement. L'âme ressent aussi le besoin
d’épancher son cœur dans celui de Jésus, de lui parler comme à
un ami. On comprend les réflexions de Marie Lataste disant à
Jésus présent dans l'hostie consacrée: "Vous êtes tout pour
moi, mon Dieu, et je comprends bien la vérité des paroles de
votre Prophète, qui s’écriait: 'Mon Dieu, que vos tabernacles
sont pleins d’amabilité: un seul jour passé près de vous vaut
mieux que mille passés sous les tentes des pécheurs.' Votre cœur
est tout brûlant d’amour... et je suis toujours heureuse...
quand je ne pense qu’à vous... parce que je sais que vous
m’aimez et que je veux vous aimer de plus en plus."
Un autre jour,
Marie Lataste, très émue par les paroles du Sauveur Jésus,
"se sentit pénétrée par une force intérieure qu'elle n’avait
encore jamais ressentie encore et... elle fut saisie du plus
profond respect pour la présence de Dieu... À la consécration,
elle vit Jésus descendre sur l’autel couvert de gloire et les
mains pleines de grâces." Un ange prit ces grâces des mains
du Sauveur et les répandit sur les fidèles, et spécialement sur
Marie. Son bonheur était immense. Elle se sentait transformée
tant son âme était pleine de Dieu, son cœur plein de Dieu, tout
son être plein de Dieu. Au moment de la communion, elle se
reposa sur Jésus et s’endormit comme un enfant près de sa mère;
cependant ce sommeil n’était pas un sommeil véritable. Ce
n’était pas le réveil non plus. Qu’était-ce? Marie Lataste fut
incapable d'exprimer son bonheur. |