LA VOIE MYSTIQUE

adveniat regnum tuum

Sœur Marie de Saint-Pierre
(Perrine Éluère)
1816-1848

JOURNAL SPIRITUEL

19
La blessure du blasphème

« Il y a près de huit mois que Notre-Seigneur ne s’était communiqué à mon âme au sujet de cette œuvre (de la Réparation); Il me conduisait par une voie de sécheresse et de ténèbres et de tentations. J’ai cependant continué, par la grâce de Dieu, à faire réparation à son divin Nom pour les blasphémateurs. Mais je confesse avoir un peu tombé dans les pièges de Satan, qui faisait tout ce qu’il pouvait pour m’en dégoûter. Après m’être humiliée devant Dieu de ma négligence, en priant Notre-Seigneur de vouloir bien se choisir un plus digne instrument, ce divin Sauveur a bien voulu alors me favoriser de nouvelles lumières malgré mon indignité, en me faisant connaître l’état déchirant où le mettent les blasphémateurs, le désir qu’Il avait de l’établissement de cette œuvre de Réparation pour la gloire de son divin Père. Notre-Seigneur m’a fait entendre qu’il fallait sans cesse prier Dieu par les mérites de son Fils et le désir de sa gloire qu’Il avait quand Il était sur la terre, pour obtenir cette œuvre à la gloire se son Nom. Ce divin Sauveur m’a fait entendre que les hommes ne sont pas capables de comprendre l’injure que Dieu reçoit par ce péché de blasphème;[1] et Il m’a fait entendre que ces pécheurs Lui perçaient le Cœur et faisaient de Lui un second Lazare, couvert de plaies. Il m’a invité à imiter les chiens qui consolaient le pauvre, en venant lécher ses plaies. Il m’a fait comprendre que je Lui rendais un grand service en employant ma langue à glorifier tous les jours les saint Nom de Dieu, méprisé et blasphémé par les pécheurs, sans considérer si cet exercice me donnait des consolations intérieures, mais de penser qu’il cicatrisait ses divines plaies et Lui causait une grande satisfaction. Il me semblait qu’Il me disait :

— Faites tous vos efforts pour l’établissement de cette œuvre. Je vous donne tous mes mérites pour l’obtenir de mon Père; demandez en mon Nom et elle vous sera accordée... ». [2]

« C’est dans le Sacré-Cœur de Jésus que j’ai trouvé cette Œuvre de la Réparation: c’est aussi dans ce divin Cœur brûlant de zèle pour la gloire de son Père, que je la remets, par les mains de la très Sainte Vierge et du glorieux saint Joseph, sous la protection des Anges et des Saints, en implorant la divine miséricorde de Dieu, qui a daigné se servir d’un si vil instrument.

Je déclare avec simplicité, pour la plus grande gloire de Dieu, que c’est moi-même, Sœur Marie de Saint-Pierre de la Sainte Famille, carmélite indigne, qui ai reçu ces lumières pour l’Œuvre de la Réparation des blasphèmes, malgré mon indignité, et qui les ai écrites dans ce présent cahier, par obéissance à mes Supérieurs et pour la plus grande gloire de Dieu, et aussi l’acquit de ma conscience; car je tremble à la vue de la mission que Dieu m’a imposée. Elle doit sauver bien des âmes, si les desseins de Dieu sont accomplis. Je déclare aussi que j’ai parlé dans la vérité et dans la simplicité de mon âme et que j’en ferais le serment s’il était nécessaire pour la gloire de Dieu. Maintenant, je crois inutile de garder ces lettres que j’ai exactement copiées ; c’est pourquoi je vais les brûler. » [3]


[1] Saint Alphonse de Liguori disait: « Le blasphème, sous toutes ses formes, si multipliées de nos jours, est, d’une façon toute spéciale, l’abomination de Dieu. C’est le plus horrible de tous les péchés; c’est un péché qui est d’ordinaire irrémissible, car c’est le crime de lèse-majesté divine, le crime qui s’attaque directement à Dieu; aussi Dieu ne le pardonne-t-il presque jamais » (Tannoia, “Vie de saint Alphonse”, liv. IV, chap. XV).
Dans ses dernières années, la saint docteur, parlant de la France, disait: « Le blasphème est une cause de malédiction sur la terre. Pauvre France! je te plains, et je plains tant de pauvres innocents qui seront enveloppés dans ta disgrâce » (Tannoia, “Vie de saint Alphonse”, liv. IV, chap. XXIV).
[2] Ici se termine la première relation de la Sœur sur les événements qui ont rapport à la Réparation en général.
[3] Lettre du 19 novembre 1844.

   

 

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