LA VOIE MYSTIQUE

adveniat regnum tuum

Dixième LETTRE

Le scandale

 

R., le 15 décembre 2003
 

Mon ami, pour te parler du sujet que tu as choisi, j’ai pris ce petit texte chez l’Évangéliste saint Luc. Il est court, mais si plein d’enseignements.

Espérant ardemment que l’Esprit Saint voudra bien m’aider, je vais donc le commenter pour toi.

Voici ce texte :

« Puis il dit à ses disciples : “Il est impossible que les scandales n'arrivent pas, mais malheur à celui par qui ils arrivent ! Mieux vaudrait pour lui se voir passer autour du cou une pierre à moudre et être jeté à la mer que de scandaliser un seul de ces petits.

Prenez garde à vous !

Si ton frère vient à pécher, réprimande-le et, s'il se repent, remets-lui. Et si sept fois le jour il pèche contre toi et que sept fois il revienne à toi, en disant : Je me repens, tu lui remettras”. » (Lc. 17, 1-4)

Selon le Seigneur Lui-même, “il est impossible que les scandales n’arrivent pas” et, pourquoi ? Tout simplement par manque d’amour.

Le Seigneur nous a recommandé de nous aimer les uns les autres, mais son conseil reste lettre morte pour beaucoup, pour nous-mêmes peut-être, car nous ne sommes pas meilleurs que nos frères : nous sommes tous des pécheurs, des pécheurs pardonnés, si nous osons le demander.

Nous voulons toujours avoir raison ― même quand nous avons tort ― par cupidité, par vanité. Peu importe les conséquences : le principal est que nous ayons raison, que notre “ego” soit flatté et nos désirs satisfaits.

Ce que tu dis ou ce que tu fais risque de provoquer un scandale ? Peu importe : tu auras “gagné”, tu seras ensuite “considéré” par certains et haï par d’autres, mais tu seras content, car ta “renommée” sera faite, le monde te prendra pour un “expert”, pour quelqu’un qui a de la poigne, même si pour y parvenir tu as marché sans vergogne sur les corps des présumés “vaincus”, qui n’en sont pas.

Mais, pour ce genre de vainqueurs, le Seigneur exprime un jugement terrible, car après nous avoir dit : “malheur à celui par qui le scandale arrive”, Il ajoute avec force, utilisant une image très claire et plus qu’explicite : “Mieux vaudrait pour lui se voir passer autour du cou une pierre à moudre et être jeté à la mer”.

Ou encore cet autre non moins terrible : « Le Fils de l'homme enverra ses anges, qui ramasseront de son Royaume tous les scandales et tous les fauteurs d'iniquité, et les jetteront dans la fournaise ardente : là seront les pleurs et les grincements de dents » (Mt 13, 41-42).

Le scandale est donc un péché grave, gravissime même, selon le jugement divin.

Mère Teresa de Calcutta disait que nous serons jugés sur l’amour, ou plutôt sur notre manque d’amour envers notre prochain. Le scandale est le “portrait” parfait de notre manque d’amour, de notre égoïsme, de notre vanité égocentrique.

Saint Augustin, le grand évêque d’Hippone nous conseille au sujet du scandale : nous devons « nous fortifier par la vertu et nous armer d'un courage chrétien contre les scandales qui doivent arriver » (Sermon 81).

Le Seigneur, Lui, Il nous dit : “ Prenez garde à vous !”

Et encore : « Je vous ai dit cela pour vous éviter le scandale » (Jn. 16, 1).

Saint Paul, dans sa lettre aux Romains insiste beaucoup sur le scandale qui doit être évité à tout prix pour le bien de tous y compris de l’Église alors naissante.

« Je vous en prie, frères ― demande-t-il ―, gardez-vous de ces fauteurs de dissensions et de scandales contre l'enseignement que vous avez reçu ; évitez-les » (Rm. 16, 17).

En effet, les scandales ne peuvent amener que des dissensions entre les enfants de Dieu.

« Qu'on se préserve donc du scandale ― conseille le saint évêque d’Hippone ― ; il est moins nécessaire d'échapper à l'affliction ; l'affliction opprime et le scandale oppresse. » (S. Augustin : Sermon 81, 2)

Et encore, à l’adresse d’un ami qui n’est pas nommé ici, le même saint Évêque écrit :

« Tu te demandais où fuir en dehors du monde pour y échapper. Mais où fuir hors du monde, pour se préserver des scandales, sinon vers Celui qui a fait le monde ? Et comment fuir vers Celui qui a fait le monde, sinon en écoutant sa loi publiée partout ? Que dis-je? en l'écoutant ? Il nous faut l'aimer » (S. Augustin : Sermon 81, 1)

Oui, l’aimer, comme Jésus lui-même nous le demande à chaque instant : « Si vous m'aimez, vous garderez mes commandements » (Jn. 14, 15).

Et encore : « Si quelqu'un m'aime, il gardera ma parole, et mon Père l'aimera et nous viendrons vers lui et nous nous ferons une demeure chez lui » (Jn. 14, 23).

Nous devons non seulement l’aimer de toutes nos forces mais aussi suivre son enseignement, nous montrer attentifs à ses desseins sur nous, afin de mieux le servir : « Si quelqu'un me sert, qu'il me suive, et où je suis, là aussi sera mon serviteur. Si quelqu'un me sert, mon Père l'honorera » (Jn. 12, 26).

Donc, mon ami, fuyons le scandale comme nous fuirions la peste ou toute autre maladie contagieuse ou honteuse ; servons le Seigneur et prions les uns pour les autres, car c’est cela qu’il nous demande.

Que le fait d’être pécheur ne nous retarde pas sur notre route vers l’éternité. Souvenons-nous de ces paroles de Jésus adressés aux juifs lorsque ceux-ci voulaient lapider la femme infidèle :

« Que celui d'entre vous qui est sans péché lui jette le premier une pierre ! » (Jn.8, 7).

Et tu sais, mon ami, ce qui est arrivé : en entendant cela ils ont posé leurs pierres et « s'en allèrent un à un, à commencer par les plus vieux» (Jn. 8, 9).

Être pécheur n’est pas une tare : vouloir y rester est un scandale devant Dieu et devant les hommes.

Il nous faut être fraternels, car tout chrétien qui est fraternel et fait de son mieux pour le rester et même pour progresser dans cette voie, est de ceux dont Jésus disait :

« À ceci tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l'amour les uns pour les autres » (Jn. 12, 35).

En d’autres termes, le grand Apôtre des Nations, dit à peu près la même chose que son divin Maître : « Que chacun d'entre nous plaise à son prochain pour le bien, en vue d'édifier » (Rm. 15, 2).

L’amour entraîne avec lui le pardon. Voila pourquoi dans la seconde partie du texte de saint Luc cité plus haut, Jésus dit :

« Si ton frère vient à pécher, réprimande-le et, s'il se repent, remets-lui. Et si sept fois le jour il pèche contre toi et que sept fois il revienne à toi, en disant : Je me repens, tu lui remettras”. »

Souvenons-nous encore de la réponse de Jésus à Pierre, lorsque celui-ci lui demanda : « “Seigneur, combien de fois mon frère pourra-t-il pécher contre moi et devrai-je lui pardonner ? Irai-je jusqu'à sept fois ?” Jésus lui dit : “Je ne te dis pas jusqu'à sept fois, mais jusqu'à 77 fois » (Mt. 10, 21-22).

Suivons cette consigne et en nous pardonnant les uns les autres, nous nous aimerons les uns les autres également, car le pardon découle de l’amour et seul l’amour vaincra, comme l’affirme saint Paul.

Main dans la main, « marchons tant que nous avons la lumière, de peur que les ténèbres ne nous saisissent : celui qui marche dans les ténèbres ne sait pas où il va. Tant que nous avons la lumière, croyons en la lumière, afin de devenir des fils de lumière » (Jn. 12, 35-36). Car, dit encore le Seigneur, « Moi, lumière, je suis venu dans le monde, pour que quiconque croit en moi ne demeure pas dans les ténèbres » (Jn. 12, 46).

« Poursuivons donc ce qui favorise la paix et l'édification mutuelle » (Rm. 14, 19), comme nous le dit encore le même apôtre saint Paul, car rester dans les ténèbres serait scandale et preuve évidente de notre manque d’amour ; alors d’un cœur humble mais plein d’espoir, souhaitons et, faisons tout pour que Seigneur nous accueille dans sa maison, comme Lui-même nous l’a expliqué et promis :

« Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures ; sinon, je vous l'aurais dit ; je vais vous préparer une place. Et quand je serai allé et que je vous aurai préparé une place, à nouveau je viendrai et je vous prendrai près de moi, afin que, là où je suis, vous aussi, vous soyez » (Jn. 14, 2-3).

Je n’ai plus rien à te dire, mon ami, sinon te rapporter les paroles que Jésus a adressées à ses amis :

« Je vous laisse la paix ; c'est ma paix que je vous donne » (Jn. 14, 27).

Ton ami dévoué qui te souhaite une joyeuse fête de Noël.

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