Neuvième LETTRE
L'Hôte divin
R., le 20
novembre 2003
Mon bien cher ami, je vais encore continuer “sur ma lancée”, à te parler des choses du Seigneur, me servant encore du Livre de l'Apocalypse de saint Jean.
Je te parlerai de l'“Hôte divin”, Celui qui veut venir habiter chez nous, dans notre âme et dans notre cœur, car il aime ses enfants à la folie. Écoute ce qu'il a à nous dire aujourd'hui:
« Voici, je me tiens à la porte et je frappe ; si quelqu'un entend ma voix et ouvre la porte, j'entrerai chez lui pour souper, moi près de lui et lui près de moi » (Ap. 3, 20).
Voila que le Seigneur vient : il veut entrer dans notre demeure ; Il veut “souper” avec nous, nous tenir compagnie, mais une “compagnie” très resserrée, très rapprochée, car Il dit bien : « moi près de lui et lui près de moi » ; un peu comme un époux amoureusement serré contre son épouse.
Mais, pour que cette amoureuse rencontre ait lieu, il faut un premier pas, un pas décisif, très important : ouvrir la porte à Celui qui frappe. C’est pourquoi le Seigneur précise bien : « si quelqu'un entend ma voix et ouvre la porte j'entrerai chez lui ».
Et, chose extraordinaire, si nous acceptons de Lui ouvrir, Lui-même fera le “ménage”, rendant propre cette maison qui a accepté de l’héberger et, pour remercier et honorer le maître de cette demeure, il deviendra en cette maison accueillante, un Hôte permanent et attentif, veillant aux moindres besoins. S’y plaisant, le Seigneur y invite également son Père et l’Esprit Saint et ensemble, font de cette demeure le Royaume de Dieu sur la terre.
Oui, celui qui écoute la voix du Seigneur et Lui ouvre sa porte, se laissant guider par Lui, ne faisant que sa divine volonté, verra chez lui l’eau se transformer en vin pour ses fêtes, se multiplier le pain et les poissons, verra guéries toutes ses plaies ; il verra aussi se calmer la mer agitée de toutes ses passions ; s’apaiser toute tempête, afin qu’il ne craigne ni ne périsse.
Le Seigneur fera brûler d’amour son cœur lorsqu’il lui expliquera les mystères du Royaume des Cieux ; il sera transporté au Thabor et verra la Face de Dieu.
Comme Marie et Jean, il sera admis au pied de la Croix et recevra, comme l’apôtre que Jésus aimait, Marie pour Mère.
« Comme il est bon le Seigneur ! » (Ps. 35, 9)
Comme Marie, nous pouvons, nous aussi chanter à un tel Hôte : « Le Tout-Puissant fait pour moi de grandes choses, Saint est son nom » (Lc. 1, 49)
Mais, pour qu’il en soit ainsi, il faut écouter son appel et lui ouvrir, quand Il frappe à la porte de notre âme.
Pour y parvenir, il nous faut lutter, “espérer contre toute espérance”, car lutter en ayant Jésus comme compagnon et hôte, c’est avoir la certitude de vaincre, stimulé par cette promesse qu’il nous fait encore :
« Au vainqueur, je lui donnerai de siéger avec moi sur mon trône, comme moi-même, après ma victoire, j'ai siégé avec mon Père sur son trône » (Ap. 3, 21).
Alors, avec courage, avec héroïsme, luttons et suivons le Maître qui nous conseille et nous rappelle :
« N'allez pas croire que je sois venu apporter la paix sur la terre ; je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. Car je suis venu opposer l'homme à son père, la fille à sa mère et la bru à sa belle-mère : on aura pour ennemis les gens de sa famille » (Mt. 10, 34-36).
Et encore cet avertissement :
« Qui aime son père ou sa mère plus que moi n'est pas digne de moi. Qui aime son fils ou sa fille plus que moi n'est pas digne de moi. Qui ne prend pas sa croix et ne suit pas derrière moi n'est pas digne de moi. Qui aura trouvé sa vie la perdra et qui aura perdu sa vie à cause de moi la trouvera » (Mt. 10, 37-39).
Que, « celui qui a des oreilles, qu'il entende ce que dit l'Esprit » (Ap. 3, 22)
Ouvrons donc nos portes au Seigneur, acceptons-le comme notre seul et unique hôte, car, ô divine surprise, nous devenons nous aussi des hôtes de notre Créateur et Seigneur et, comme le chante le psalmiste, « heureux qui s'abrite en lui ! » (Ps. 34, 9) Car, « Dieu est pour nous refuge et force, secours dans l'angoisse toujours offert » (Ps. 46, 2).
Lorsque cette rencontre se produit, rencontre entre l’homme et son Créateur qui veut venir “souper” chez lui, il nous faut, non seulement lui ouvrir la porte, mais aussi, en toute humilité, lui dire :
« Seigneur, crée pour moi un cœur pur, restaure en ma poitrine un esprit ferme ; ne me repousse pas loin de ta face, ne m'enlève pas ton esprit de sainteté » (Ps. 51, 12-13)
L’humilité, qui découle de l’amour, est une vertu que le Seigneur aime particulièrement, car elle est comme un signe avant-coureur de l’offrande sincère, de l’acceptation inconditionnelle des desseins divins sur l’âme.
L’âme humble, qui a accepté d’héberger son Seigneur et son Dieu, peut alors chanter comme Marie : « Mon esprit tressaille de joie en Dieu mon sauveur, parce qu'il a jeté les yeux sur l'abaissement de sa servante » (Lc. 1, 47-48).
Á quoi l’Hôte divin pourrait répondre, comme Isabelle le fit envers Marie : « Oui, bienheureuse celle qui a cru en l'accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur! » (Lc. 1, 45).
Ne préjugeons pas de nos forces ou des vertus que nous pensons avoir en nous, suivons se sage conseil du directeur spirituel de saint Jean-Baptiste de La Salle, fondateur des Écoles Chrétiennes :
« Prenez un plus haut vol en vous livrant sans restriction à l’unique Bonté et Beauté. Contentez-vous de Lui seul : Il sera votre lumière, votre force et votre asile en tout temps » (Bx. Nicolas Roland ; Manuscrit 5 A ; Lettre 19).
Ou encore cet autre de l’un des plus grands mystiques de l’Église catholique :
« Celui qui est doué de bonne volonté, s'engage en lui-même, et désire ardemment aimer Dieu et le servir, non seulement en cette vie, mais pendant toute l'éternité » (Bx. Jean de Ruysbroeck. Les sept degrés de l’amour, chap. 1).
Restons en union de prières et demandons au Seigneur de venir habiter chez nous, afin que nos âmes et nos cœurs soient “dépoussièrés” par le divin Maître, qui veut bien être notre hôte, et Hôte de “marque”.
Ton ami dévoué.
